Nice-Matin (Cannes)

Mémoire de Grassois Maria Martino-Sette

- CORINNE JULIEN BOTTONI

Retrouvez cette rubrique qui donne la parole à un habitant de la cité des parfums ou du pays grassois. Aujourd’hui , Maria MartinoSet­te parle de ses souvenirs de la rue de la Fontette.

Née en Calabre, le 10 mars 1956, Maria Martino-Sette a quitté sa région natale, à l’âge de huit ans. La situation économique de l’Italie de l’immédiat après-guerre, incite ses parents, sur les conseils d’un cousin déjà émigré, à s’installer à Grasse. L’industrie de la parfumerie connaît alors son apogée et le travail ne manque pas. « Nous avons d’abord trouvé un logement dans la rue de la Fontette et nous sommes aperçus que de nombreux compatriot­es habitaient déjà l’endroit. »

Une ambiance italienne

Au sein du quartier tout évoque l’Italie : linge séchant aux fenêtres, étals colorés des commerçant­s alignés sur les trottoirs et ambiance chaleureus­e aux terrasses des petits cafés. De nombreux Italiens entonnent quelques chansons de chez eux, en s’accompagna­nt d’un petit accordéon, la giorgina, dont le son nostalgiqu­e s’élève dans les ruelles. Au fil du temps, la rue de la Fontette se transforme en une véritable allée italienne. Des QuatreCoin­s jusqu’à la rue Droite, se succèdent de petits commerces, des cafés et autres restaurant­s tenus par des ultramonta­ins, venus du Nord et du Sud de la péninsule. Rocco, le père de la fillette trouve aussitôt un emploi de maçon et laisse son épouse Agnès se consacrer à sa famille. « Nous formions une fratrie de quatre enfants. J’étais la benjamine. Mes deux frères aînés travaillai­ent déjà, alors que j’allais à l’école, accompagné­e du petit dernier dont je m’occupais beaucoup. » Les deux bambins vont acheter du pain chez Civatte, le boulanger qui ne manque jamais de leur offrir une brioche. Les courses sont l’occasion pour Maria et sa maman de se rendre sur la place aux Herbes, le marché couvert où l’on trouve de nombreux producteur­s locaux dont les prix restent abordables. L’endroit était plus populaire que la place aux Aires. La plupart des ouvriers qui habitaient la ville y effectuaie­nt régulièrem­ent leurs achats. Une fois par semaine, la fillette accompagne Agnès au lavoir municipal, établi dans la rue de la Lauve, au coeur du Rouachier. C’est l’occasion pour les ménagères de se retrouver et d’évoquer leur quotidien. « La vie n’était pas facile, mais on était heureux. On allait aussi cueillir le jasmin et la rose. Mes parents travaillai­ent sans cesse. »

Voitures à pédales et chevaux à roulettes

Le jeudi, la petite fille et ses amies du quartier jouent au ballon, à la marelle et à l’élastique dans les rues avoisinant­es. Parfois, munies de quelques pièces, elles rejoignent le Cours pour monter sur les chevaux à roulettes et les voitures à pédales. « On pouvait traverser toute l’esplanade et le temps n’était pas limité. Comme nous ne possédions pas de télévision, la voisine du rez-de-chaussée nous accueillai­t chez elle pour regarder Bonne nuit les petits et le feuilleton, Oncle Bill. » Une fois sa scolarité effectuée à l’école Gambetta, Maria entre dans la vie active à seize ans. Employée par la société de confection, Lucie France, sise à Château-Folie, elle doit bientôt trouver un autre travail, l’entreprise devant fermer ses portes. Elle entre alors chez Roure avant de poursuivre sa carrière chez Robertet, autre fleuron de la parfumerie grassoise, où elle demeure jusqu’à l’âge de sa retraite, en officiant au restaurant de l’entreprise. Aujourd’hui, Maria et son mari Roger habitent à Saint-Cézaire. Très dynamiques, ils entretienn­ent leur jardin, s’adonnent à la marche et reçoivent leurs amis. Ils sont très proches de leur fille Manon qui travaille dans le domaine social. Toujours tournés vers les autres, les deux époux privilégie­nt les contacts et Maria a conservé des liens très forts avec ses anciens collègues de travail. Si elle regrette aujourd’hui l’animation passée de la rue de la Fontette, elle y revient toujours avec plaisir. Le flux continuel des passants s’est tari, mais le pittoresqu­e de l’endroit demeure et la rue reste attachante. Une occasion de renouer avec son passé qui somme toute, n’est pas si lointain.

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(Photos DR et C.J.-B.) Hier : avec ses camarades de classe de l’école Gambetta. Aujourd’hui : Maria vit à Saint-Cézaire mais n’oublie pas la ville des Parfums où elle retourne fréquemmen­t.
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