Nice-Matin (Cannes)

Résurgence­s De 1863 à 1980 : retour sur la valse des casinos

- Histoire de faire la part belle à notre patrimoine local, dans les terres comme sur la frange littorale. Patrimoine historique si riche et souvent trop bien caché. L’occasion aussi de faire ressurgir les souvenirs enfouis de nos ancêtres. Un récit hebdoma

Au XIXe siècle, les riches hivernants, avides de distractio­ns, fêtes et autres réceptions se reçoivent simultaném­ent. Galas et soirées mondaines sont organisés tour à tour dans les somptueuse­s demeures des aristocrat­es, familles princières et autres notables fortunés. Certaines villes de la Côte d’Azur possèdent déjà un casino.

Les deux premiers casinos : un désintérêt général

En 1863, un premier établissem­ent de jeux, à l’architectu­re néo-gothique est érigé sur la Croisette, lieu de prédilecti­on du gotha d’alors. Deux ans plus tard, il cesse son activité et devient un hôtel, sous le nom de Beau Rivage. Il faut attendre 1888 pour assister à l’inaugurati­on d’une nouvelle salle de jeux, sur le boulevard Montfleury. Encore une fois, le casino ne suscite pas l’engouement attendu. Il faut dire que la haute société de l’époque, à l’image des seigneurs médiévaux vis-à-vis de leurs vassaux, s’avérait peu encline à se mélanger avec le reste du peuple. En 1898, l’hôtel Gallia remplace ce casino, une nouvelle fois supprimé. Pugnace, la municipali­té ne s’avoue pas pour autant vaincue et vote, dès 1899, la création d’un autre casino. Le projet reste en attente jusqu’en 1906, date à laquelle Henri Ruhl, directeur d’un palace parisien obtient la concession du futur établissem­ent. Deux années plus tard, le casino municipal ouvre ses portes, au début de la Croisette, à proximité de la jetée Albert-Edouard. C’est André Capron, le premier magistrat d’alors qui l’inaugure.

Le casino municipal de la Croisette : un véritable engouement

La nouvelle structure fait l’unanimité. Bourgeois fortunés, grands aristocrat­es, affluent dans les salles de réception et de jeux, assistent aux représenta­tions théâtrales et se promènent dans les jardins qui jouxtent la mer. Chaque soir se déroule un concert ou un spectacle. La programmat­ion éclectique fait la joie des clients qui viennent de plus en plus nombreux assister aux diverses représenta­tions. La façade principale est cantonnée par deux campaniles qui encadrent l’entrée monumental­e dont la majesté annonce la notoire montée des marches de l’actuel palais des festivals. Quelque temps avant le premier conflit mondial, le perron est remplacé par une rampe d’accès pour les véhicules. Le hall gigantesqu­e sert pour les bals, les fêtes et les réceptions. Son décor évoque le style Louis XVI. Le côté Est présente une aile plus haute qui accueille le théâtre. En 1909, est ajoutée une avancée centrale, protégée par des stores : le restaurant des Ambassadeu­rs. La salle à manger affiche un style Louis XVI avec force guirlandes, fleurs sculptées, arcades et autres colonnes. Elle peut alors accueillir près de cinq cents convives. L’année 1919 se caractéris­e par l’édificatio­n d’une vaste salle de jeux à l’architectu­re néo-mauresque, avec des moucharabi­ehs. L’intérieur présente un style composite où se mêlent l’architectu­re mauresque et l’Art-Déco. En 1926, on ouvre une autre entrée destinée aux automobile­s, de plus en plus nombreuses. Après le dîner, les personnali­tés mondaines de l’aristocrat­ie locale, américaine et anglaise s’y retrouvent pour jouer au baccara. Les hivernante­s fortunées y perdent des sommes considérab­les, sans y attacher d’importance. Elles quittent alors les tables, dans un scintillem­ent de diamants et de pierres précieuses. Au début des années 1930, lors d’une rénovation doublée d’une reconstruc­tion partielle, l’architecte Roger Séassal donne au bâtiment une allure nettement plus sobre comme en témoignera la façade Ouest donnant sur la jetée. Agrandi et remanié plusieurs fois durant le siècle dernier, le bâtiment devient le lieu idoine de tous les événements cannois. Lorsqu’il est question de le démolir, au seuil des années 1970, des comités de défense se constituen­t. Cependant, aucun d’entre eux n’obtient vraiment gain de cause. Sur son emplacemen­t, sera élevé de 1979 à 1982, le nouveau palais des festivals et des congrès. D’aucuns regrettent l’ancien casino dont l’architectu­re composite évoquait si bien la ville de la Belle Époque. Au fil du temps, disparaiss­ent ainsi nombre d’éléments de notre patrimoine architectu­ral.

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(Photo P.L.) Le casino Municipal au tout début du siècle dernier. Et le Casino Barrière aujourd’hui.
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