Un exceptionnel livre des morts estimé à M€
Rarissime, un papyrus de plus de 17 mètres de long et datant du VIe siècle av. J.-C. s’apprête à passer sous le marteau à Monaco
Les collectionneurs amateurs d’Histoire vont être comblés. Le 13 octobre, l’Hotel des Ventes de MonteCarlo consacre une vente à l’art d’Egypte. 200 lots en tout seront présentés, réunissant plusieurs collections privées. Pièce majeure de la vacation, un exceptionnel Livre des morts égyptien pourrait bien s’envoler à 2 millions d’euros ! « Il s’agit d’un papyrus datant de la XXVIe dynastie, sous le règne de Psammétique II, entre 594 et 588 av. J.-C. Il mesure environ 17,40 mètres de long et 30 centimètres de hauteur, et a été trouvé enroulé et protégé dans un tissu », confie Bianca Massard, en charge du département des Antiquités pour HVMC. Apparu sous l’Ancien Empire, le Livre des morts était un véritable guide de l’au-delà dans l’Egypte antique, censé aider le défunt à réussir son passage dans le nouveau monde. Il consistait en un ensemble de formules écrites sur papyrus, et placées à proximité de la momie, parfois même insérées dans ses bandelettes. Le papyrus proposé aux enchères par l’Hôtel des ventes de Monte-Carlo appartenait à l’origine à un certain HorWedja, dont le nom est mentionné à plusieurs reprises dans le texte. « On s’est rendu compte que ce papyrus a en réalité appartenu à deux propriétaires. Le dernier propriétaire a usurpé le nom du premier, Hor-Wedja, et l’a fait effacer pour écrire le sien. Çaearrive assez fréquemment sous la XXVI dynastie. Depuis le Nouvel Empire, avoir un Livre des morts dans sa tombe n’est plus réservé au roi ou à son entourage. Ça c’est un peu démocratisé, mais c’est un objet qui coûte toujours extrêmement cher, et tout le monde ne possède pas les moyens de s’en faire fabriquer un. Donc, parfois, certains Livres des morts sont subtilisés pour être réemployés », explique Bianca Massard.
Un ouvrage « extraordinaire »
Le papyrus de Hor-Wedja est une version de la « recension saïte ». Sous la XXVIe dynastie en effet, le Livre des morts est révisé, et de nouveaux chapitres sont ajoutés aux chapitres des périodes originelles. L’ouvrage mis en vente contient ces différents paragraphes, 192 en tout, à la fois anciens et additionnels. Une particularité « extraordinaire », selon Bianca Massard. Le texte est en écriture hiératique rétrograde à l’encre noire. « Il s’agit essentiellement de formules magiques et de prières, illustrées par 227 vignettes peintes en rouge et noir. Les sections importantes sont rédigées à l’encre rouge afin d’accentuer leur pouvoir », souligne l’experte. On y retrouve les grandes scènes traditionnelles, telles que le Jugement du mort par Osiris ou l’Au-delà dans les Champs de Roseaux. Issu d’une collection privée française, le papyrus a été acquis en 1952 auprès de la galerie Khawam Brothers, l’une des plus anciennes familles d’antiquaires du Caire. D’autres pièces remarquables figurent également au catalogue de la vente. Parmi elles : la collection d’amulettes du consul de France et épigraphiste Aimé Noël Giron (18841941), un bas-relief Ancien-Empire provenant de la succession du grand collectionneur d’antiquités parisien Armand Trampitsch (1890-1975), ou encore, un cercueil en bois au nom de la Dame Neith Emhat ayant appartenu à l’illustre archéologue C.F.-A Schaeffer (1898-1982). Un véritable voyage au coeur de 3000 ans d’histoire.