Nice-Matin (Cannes)

 ans de combat pour faire éclater la vérité

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Eté . Sophie, alors âgée de  ans, accouche dans une clinique de Cannes, fermée depuis. Sa toute petite fille, atteinte de jaunisse, est placée sous une lampe à rayons avec un autre nourrisson né à quelques heures d’intervalle. L’impensable se produit lorsque les deux bébés sont rendus à leurs parents. Les deux mères s’interrogen­t face au personnel médical : l’une trouve que son enfant à plus de cheveux, l’autre moins. Malgré cela, leurs doutes sont balayés par les infirmière­s. « J’ai pensé que cela pouvait être dû aux rayons de la lampe. Et je faisais confiance aux médecins et pédiatres », se souvient Sophie, alors jeune et impression­nable. Ce n’est que  ans plus tard que l’atroce vérité est découverte. Le couple bat de l’aile, le père demande un test ADN. Sa fille ne lui ressemble pas. Coup de massue à l’annonce des résultats : la petite fille n’a aucun lien génétique ni avec son père, ni avec sa mère. Des recherches sont lancées. D’autres tests effectués. La sentence tombe : leur fille a été élevée par une autre famille, à seulement quelques kilomètres de chez eux. Eux-mêmes ont élevé l’enfant de cet autre couple. Après la brutalité de cette annonce, comment gérer la suite ? Aucune logique, aucune histoire similaire ne peut les aiguiller sur le comporteme­nt à adopter face à cette situation inédite. Tous sont effrayés, désemparés et impuissant­s devant ce cataclysme. Faut-il “renvoyer” les fillettes, alors âgées d’une dizaine d’années, auprès de leurs parents biologique­s ? Personne ne le souhaite. Chacune reste dans la famille qui l’a élevée. Les tentatives de renouer les liens sont compliquée­s d’un côté comme de l’autre. Parfois douloureus­es. Tous tentent de reprendre le fil de leurs existences, et de trouver leur place au sein de cet improbable scénario. Une première plainte au pénal est classée sans suite en . Les familles assignent au civil la clinique, les médecins et une infirmière. Des années de combat judiciaire pour faire reconnaîtr­e leur statut de victime. Évaluer le préjudice de l’inconcevab­le. Le  février , le tribunal rend son verdict : l’assurance de la clinique est condamnée à verser , million.   € pour chaque enfant échangé,  € pour les parents,  € pour les frères et soeurs. Une première qui fera jurisprude­nce... Mais qui laissera des séquelles indélébile­s au sein des deux familles.

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