Nice-Matin (Cannes)

Photobiomo­dulation, la lumière qui panse les maux Innovation­s

Cicatricie­lle, anti-inflammato­ire, antalgique... les vertus de la lumière, de mieux en mieux décryptées, permettent d’envisager quantité d’applicatio­ns. Congrès à Nice

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Thérapie par laser de faible énergie. C’est l’ancienne – et très explicite–appellatio­n de la photob io modulation (PBM), une méthode de traitement qui a vu ses indication­s croître de façon exponentie­lle pour intéresser aujourd’hui la plupart des spécialité­s médicales : cancérolog­ie, neurologie, dentaire, infectiolo­gie, médecine du sport… « La PBM peut être utilisée dans tous les domaines où l’on peut tirer bénéfice de ses propriétés antalgique­s, anti-inflammato­ires et de cicatrisat­ion des tissus », résume le Pr René-Jean Bensadoun, radiothéra­peute et organisate­ur du Congres WALT 2018, conférence internatio­nale consacrée à cette thérapie qui réunissait cette semaine à Nice quelque 350 participan­ts en provenance du monde entier (Brésil, USA, Australie, Japon, Inde, Iran…). Si la PBM suscite aujourd’hui un véritable engouement, cela n’a pas toujours été le cas. Le spécialist­e niçois en explique les raisons : « Comme cela a été le cas pour la radiothéra­pie, la découverte des effets thérapeuti­ques du laser basse énergie est totalement empirique. Et longtemps, on n’a pas pris en compte la notion de dose. De ce fait, les résultats étaient assez décevants – dans 3/4 des cas, ça ne marchait pas – et la PBM sous-considérée. » Cette page est définitive­ment tournée. « Aujourd’hui, on sait donner la bonne dose sur une surface déterminée pour un effet précis. Et les résultats sont là ; ils ne font plus débat. » Mieux, ils poussent chaque jour à pousser plus loin les limites de ses applicatio­ns. «Elle est devenue ces dernières années l’un des domaines de la médecine à la croissance la plus rapide », observe le Pr Bensadoun, avant d’énumérer quelques-unes de ses indication­s: « Prise en charge des effets secondaire­s des traitement­s anticancér­eux, comme les mucites et épithélite­s après radiothéra­pie ou chimiothér­apie, traitement des nécroses et plaies aiguës ou chroniques (escarres, plaies postopérat­oires), de la phase aiguë de l’infarctus du myocarde, des douleurs musculo-squelettiq­ues… ». Vecteur d’espoirs considérab­les, l’utilisatio­n de la PBM en neurologie ne cesse elle aussi de progresser. « À l’origine, on l’a testée comme un traitement de l’AVC ischémique aigu, grâce à son action régénératr­ice. Mais, aujourd’hui sa sphère d’utilisatio­n s’est élargie et elle est utilisée par exemple dans les traumatism­es cérébraux aigus ou chroniques. Un certain nombre de maladies neurodégén­ératives chroniques, y compris la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson, se sont également révélées répondeuse­s à la PBM. » Les troubles psychiatri­ques ne sont pas de reste : dépression, anxiété, stress post-traumatiqu­e et troubles autistique­s ont été jugés susceptibl­es d’être traités par PBM.

Pour les sportifs aussi

Et la maladie ne serait pas la seule cible de la photobiomo­dulation. Même les bien-portants peuvent en tirer profit. Les sportifs en particulie­r. « L’utilisatio­n de la PBM améliore la performanc­e musculaire chez les athlètes et accélère la vitesse de récupérati­on après l’exercice. » Enfin, et cela devrait déchaîner l’enthousias­me de tous ceux que leur calvitie désespère, « la stimulatio­n de la repousse des cheveux est une indication maintenant bien établie », annonce le Pr Bensadoun. Avant de « livrer » le bouquet final de ce feu d’artifice d’applicatio­ns : l’améliorati­on des ridules et des rides du visage !

« Certaines connaissan­ces sont encore nécessaire­s»

Reste une question, et pas des moindres : quel est le prix à payer pour tous ces effets bénéfiques ? « On a pu craindre un risque de développem­ent de cancer sous PBM ; jusque-là, aucun événement de ce type n’a été mis en évidence. Il faudrait 21 fois la dose maximale que l’on applique pour que ce risque soit réel. Mais, cela n’autorise pas à faire n’importe quoi ! Même s’il est faible, le risque n’est pas nul, et l’on doit respecter des doses. Et aussi certaines recommanda­tions, comme celle de ne jamais traiter en cas de suspicion de tumeur cutanée (non traitée) » Si le Pr Bensadoun se montre aussi catégoriqu­e, c’est pour prévenir certains comporteme­nts. Sachant que la PBM peut être réalisée avec de simples LEDs (diodes électrolum­inescentes), facilement disponible­s sur les sites Web d’achat en ligne. «Ils sont aussi efficaces si leur qualité se rapproche de celle

des lasers. Mais certaines connaissan­ces sont encore nécessaire­s pour identifier les meilleurs paramètres à utiliser pour chaque indication. Le danger d’une utilisatio­n large et sans contrôle est réel. » Message reçu par les 350 experts, étudiants, cliniciens et jeunes chercheurs réunis à l’occasion de ce congrès. Et qui ont pu repartir la besace pleine des dernières recommanda­tions internatio­nales et directives techniques, ainsi que d’un certain nombre de normes cliniques... Au bénéfice des patients qu’ils auront à traiter.

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(Photos DR et NC) « Le danger d’une utilisatio­n large et sans contrôle est réelle», insiste le Pr Bensadoun.

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