Nice-Matin (Cannes)

Cinq ans pour une agression sexuelle

Agressée par un ami de la famille, la victime âgée de 15 ans au moment des faits, a raconté son calvaire à la barre mercredi

- JEAN STIERLÉ

Accompagné­e de ses parents, c’est une jeune fille timide mais déterminée qui se présente mercredi à la barre du tribunal correction­nel de Grasse, présidé par Pierre Kuentz. Petites lunettes rondes qui cachent en partie son visage et longs cheveux tressés, elle a aujourd’hui 18 ans. Son calvaire, elle va le décrire avec une voix claire et posée, sans éclat ni sanglot. Pourtant ce qu’elle a vécu dans la nuit du 25 au 26 octobre 2015 aurait pu conduire son bourreau aux Assises.

L’agresseur en fuite

Âgée de 15 ans au moment des faits, elle est victime d’une agression sexuelle par un ami de la famille. Celui-ci avait pris soin de se retrouver seul avec elle, dans sa chambre, sous prétexte de lui offrir une cigarette. Là, il la précipite sur son lit et lui impose un acte sexuel : « Il a baissé ma culotte et mon pantalon jusqu’au bas de mes chaussures et s’est retrouvé sur moi », livre-t-elle au magistrat qui l’interrogea­it sur les circonstan­ces de ce qu’il n’a pas hésité à qualifier de viol. Luis, l’auteur présumé des faits, est un Angolais de 28 ans. Il vit chez sa tante et les familles se fréquenten­t régulièrem­ent puisque voisines à Grasse. Il est en fuite, sous mandat d’arrêt du 6 juillet 2015. On juge donc en ce mercredi un prévenu absent. Après une période de détention provisoire de 8 mois Luis avait été remis en liberté sous contrôle judiciaire à la suite d’une demande de confrontat­ion refusée par la victime. Trop d’angoisse et d’anxiété pour se retrouver face à son agresseur qu’elle avait ellemême blessée, peu de temps après son agression, avec une lime à ongles, lors d’une rencontre fortuite en pleine ville. Elle sera alors interpellé­e par la police passant du statut de victime à celui d’agresseur : « J’ai voulu me défendre, car il s’est approché de moi en me menaçant », déclarera-t-elle. Cet incident s’était déroulé le 6 novembre 2015 car au cours de l’instructio­n on apprendra que la famille n’avait pas jusque-là porté plainte : « La peur de l’émeute », témoignera le père à la barre. Il voulait dire la peur du scandale.

Violée à six ans

Autre révélation stupéfiant­e, il décrit un premier viol de son enfant à l’âge de six ans. Cela s’était passé à Riom, sur une aire de jeux. L’individu finalement interpellé avait été condamné aux Assises à 15 ans de réclusion. La famille aujourd’hui séparée avait déménagé pour s’éloigner des lieux du crime. C’était un inconnu, là il s’agit d’un « ami ». Ce qui poussera les familles, après que leur fille ait relaté l’agression, à convenir d’une sorte de négociatio­n. On jette la culotte distendue et tachée de sang, on fait les démarches médicales nécessaire­s qui aboutissen­t… à la prise de la pilule du lendemain. Pas de traces ADN, pas de preuves, rien qui pourrait être démontré par l’examen médical pratiqué, ce qui conduit à la correction­nalisation des faits de viol en agression sexuelle imposée à un mineur de 15 ans. Révélés par la jeune fille à la suite de son interpella­tion par la police, ils conduiront enfin à mettre l’Angolais en prison. Aux intérêts de la partie civile Me Luc Tran Duy rappelle que la victime n’a jamais été prise en défaut dans ses déclaratio­ns. Luis aurait prétendu qu’elle était amoureuse de lui. En tant qu’époux fidèle, il ne pouvait selon lui accepter cette liaison. « C’est un menteur, il se prenait en photo le sexe en érection, fréquentai­t les sites pornos et avait de nombreuses relations extraconju­gales », s’exclame l’avocat. Le procureur de la République Marie-Nina Valli rappelle que le prévenu n’a pas de casier judiciaire en France, et qu’il avait fuit sentant son sort scellé. Elle requiert 3 ans de prison avec mandat d’arrêt. Le tribunal condamnera le prévenu à cinq ans de prison ferme avec mandat d’arrêt, interdicti­on de séjour dans les Alpes-Maritimes pendant cinq ans, 12 000 euros de dommages et intérêts pour la jeune fille, et 4 000 euros chacun pour le père et la mère.

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Le calvaire d’une adolescent­e de  ans raconté à la barre du TGI de Grasse. (Photo d’illustrati­on S.H.)

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