Nice-Matin (Cannes)

Laurent : « J’ai vu passer les cinq voitures sous mes yeux sans pouvoir rien faire »

- CHRISTIANE GEORGES cgeorges@nicematin.fr

Traumatisé. Laurent, artisan maximois, se repasse en boucle le film terrible de la soirée de mercredi. « Nous étions partis pêcher dans le cours d’eau de la Garonnette avec des amis vers 21h30. Arrivés sur place, on s’est vite rendu compte qu’il serait impossible de pêcher alors on est resté là à surveiller le cours d’eau, pour voir si le niveau descendait. Tout à coup, nous avons vu passer une voiture dans le cours d’eau, les feux allumés. On n’en croyait pas nos yeux. Il faisait nuit noire et on ne savait pas s’il y avait quelqu’un à l’intérieur. Puis, une deuxième voiture, les feux allumés également. Là, même scénario : impossible de voir si quelqu’un était dans l’habitacle. C’est alors qu’est arrivée la troisième voiture. Là, les feux étaient allumés et surtout le plafonnier et on a distingué du monde à l’intérieur. On a surtout vu le conducteur. Le pauvre, il avait la main sur le volant. Je n’oublierai jamais cette image. Je vois encore ce monsieur avec son pull gris et des cheveux blancs. C’était horrible. On était là, impuissant­s, à regarder la voiture emportée par les eaux se diriger vers la mer. On ne pouvait rien faire, le courant était terrible. C’est nous qui avons prévenu les secours, mais c’est tellement frustrant de ne pouvoir rien faire de plus pour les aider. Quand les gendarmes sont arrivés, une quatrième automobile était traînée par le cours d’eau, les feux éteints. Les forces de l’ordre ont mis un coup de projecteur et vu qu’il n’y avait personne. Les quatre voitures sont passées à quelques minutes d’intervalle l’une de l’autre. C’était un vrai cauchemar. On n’avait jamais vu ça. Puis une cinquième voiture est passée et on n’a rien pu distinguer. Ce qu’on a vécu est monstrueux, c’est comme si le temps s’était arrêté. Il y avait une houle terrible. L’eau est arrivée jusqu’à 50 cm sous le pont. La RD559 n’était plus qu’un lac. Il y avait au moins 30 cm d’eau sur la route ». Au moment de rentrer chez lui, Laurent s’est dit écoeuré: « On était là avec les forces de l’ordre, impuissant­s. Je m’en veux même si je savais que je ne pouvais rien faire. J’ai pensé à ma famille qui m’attendait à la maison. J’ai revécu le film mille fois. J’étais fixé sur ce monsieur au volant, statique, comme tétanisé. J’ai rêvé que je plongeais pour aller le secourir. Tout cela s’est passé tellement vite. C’est l’horreur de regarder quelqu’un partir peut-être vers la mort. On a tous espéré une issue moins dramatique. Hélas, le destin en a décidé autrement ».

 ??  ?? C’est sur ce pont de la Garonnette, de nuit, que Laurent le pêcheur et ses amis ont vu passer, interloqué­s, une puis deux puis trois et jusqu’à cinq voitures emportées par les eaux vers la mer. (Photo Ch. C.)
C’est sur ce pont de la Garonnette, de nuit, que Laurent le pêcheur et ses amis ont vu passer, interloqué­s, une puis deux puis trois et jusqu’à cinq voitures emportées par les eaux vers la mer. (Photo Ch. C.)

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