Atteintes à la laïcité à l’école: l’inquiétude
Un millier de cas signalés en trois mois. Le phénomène du communautarisme est « bel et bien réel » mais l’islam est loin d’être la seule religion concernée
Un millier de cas signalés sur trois mois, plus de quatre cents « traités » : le ministère de l’Education a publié, hier, un premier bilan des atteintes à la laïcité, émanant notamment d’élèves de confession musulmane, un phénomène dont l’ampleur reste toutefois difficile à mesurer. Il s’agit des premiers chiffres sur cette question sensible, allant du refus de certaines activités à la contestation d’enseignements, recensés par le ministère. L’an dernier, le ministre Jean-Michel Blanquer assurait qu’aucun professeur ne devait plus jamais « se sentir seul » en cas de remise en cause du principe de laïcité dans sa classe. Depuis, une adresse de saisine a été créée, permettant de faire part des difficultés rencontrées. Ce dispositif est un des volets du plan laïcité dévoilé au printemps, qui comprend également la distribution d’un vade-mecum servant de référence commune à tous les établissements, la mise en place d’un « conseil des sages » et la création d’une équipe laïcité dans tous les rectorats (qui ne disposaient jusqu’alors que d’un référent laïcité). En ouvrant un séminaire national des coordonnateurs de ces équipes, Jean-Michel Blanquer a fait état, hier, d’un premier bilan : entre avril et juin, un millier de faits ont été « signalés ». Parmi eux, 402 cas ont été « traités » par les équipes des rectorats, qui ont «apporté une réponse appropriée». Cela a nécessité un déplacement de leur part dans les établissements concernés pour soixante cas.
Des enseignements contestés
« Les remontées que nous avons montrent des remises en cause diverses de la laïcité », a souligné le ministre : « habits vestimentaires, certificats médicaux de complaisance, refus de se rendre à la piscine de la part de certaines jeunes filles, refus de certains hommes de serrer la main des femmes, contestation au nom de la foi d’enseignements » comme les sciences ou la musique..., a détaillé le ministre. L’islam n’est pas la seule religion concernée: « plusieurs religions peuvent être impliquées », a-t-il précisé. Pour Jean-Pierre Obin, inspecteur général honoraire, auteur en 2004 d’un rapport sur « les signes et manifestations d’appartenance religieuses dans les établissements scolaires », « peu de choses ont changé par rapport à ce qu’on décrivait déjà à l’époque ». Mais les chiffres publiés « ne sont sans doute que la partie émergée de l’iceberg », estime-t-il. Iannis Roder, professeur d’histoire-géo à Saint-Denis, juge de son côté « plausible » le bilan du ministère: «le nombre de cas recensés n’est pas énorme, cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas les prendre au sérieux ». Depuis vingt ans, il constate « une pratique de la religion musulmane qui est devenue plus stricte, plus étendue, avec une forte pression pour respecter certaines règles alimentaires ou vestimentaires ».