Nice-Matin (Cannes)

J’ai plus de  ans et je suis autiste : quelle place pour moi ? Associatio­n

Ils seraient plusieurs milliers d’adultes français handicapés accompagné­s à domicile par des parents vieillissa­nts faute de structures d’accueil. Des mamans azuréennes se mobilisent

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Nos enfants ont grandi. Quelle place leur est désormais offerte ? » Florence et Petra sont deux mamans parmi des milliers d’autres. Deux mamans qui s’inquiètent pour l’avenir de leurs enfants. Comme des milliers d’autres qui voient leur enfant grandir et quitter le nid. Mais ce qui les inquiète, elles, c’est que leurs enfants, devenus grands, majeurs, soient empêchés de partir. Florence et Petra sont des mamans d’enfants autistes, Maxime et Kelly. De grands enfants de 25 ans, lourdement handicapés. Mais, ce n’est pas de Maxime et Kelly que les deux Azuréennes sont venues nous parler. Ou pas seulement d’eux. Lorsqu’elles évoquent « leurs » enfants, elles font référence à tous ces adultes autistes confrontés au défaut de structures compétente­s pour les accueillir lorsqu’ils ont quitté l’adolescenc­e. « Les IME (institut médico éducatif) reçoivent les enfants de 6 à 20 ans (lire ci-contre). Au-delà de cet âge et jusqu’à la retraite, d’autres structures adaptées (FAM, MAS (1)…) doivent prendre le relais. Mais le manque de places est criant. Actuelleme­nt, dans les seules Alpes-Maritimes, plus de 150 adultes, dont une vingtaine ont plus de 40 ans, sont en attente, parfois depuis de nombreuses années… »

Si le sourire ne quitte pas le visage de ces deux femmes très engagées – Florence et Petra ont fondé l’associatio­n Coopérativ­e Azur – il

(2) dissimule mal la réalité d’une vie entièremen­t dédiée à l’enfant malade. Jour et nuit, 365 jours par an. «Nos enfants sont comme des enfants de maternelle ; ils vont aux toilettes, mais il faut leur essuyer les fesses, il faut leur couper la viande, être sans cesse attentive… » À l’instar de beaucoup de personnes vivant avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA) Maxime et Kelly ne dorment pas bien. Angoisses, réveils nocturnes, crises … « C’est difficile de les réveiller le matin», conviennen­t les deux mamans, en « omettant » de parler de leurs propres réveils après des nuits sans sommeil. « Longtemps, les familles n’osaient même pas évoquer leur souhait de placer leur enfant. On leur disait : “Il sera mieux chez vous! ”, elles se sentaient très culpabilis­ées. » Un sentiment de culpabilit­é d’autant moins fondé que, pour l’adulte porteur d’autisme, l’hébergemen­t dans une structure adaptée est une étape clé de son développem­ent. « Lorsque l’on nous demande encore: pourquoi ne gardez-vous pas votre enfant chez vous ? On répond : tout adulte, quel qu’il soit, ne souhaite pas rester auprès de sa mère toute sa vie… Il en a marre lui aussi. C’est important de le rendre le plus autonome possible, qu’il s’émancipe aussi…», répond Florence. «Nos enfants sont des humains et tout humain doit un jour quitter la maison», appuie Petra. Et surtout, en filigrane, il y a cette question terrible qui taraude tous les parents d’enfants handicapés : quand je mourrai, que deviendrat-il ? «Lorsqu’une personne handicapée a vécu toute sa vie avec ses parents, leur décès représente souvent un drame», confie Florence, tristes témoignage­s à l’appui. Les deux femmes en sont bien consciente­s : leurs enfants, Kelly et Maxime « ont de la chance » : depuis l’âge de 21 ans, ils sont en externat dans un FAM. Ils y partent le matin et rentrent chez eux en fin d’aprèsmidi. Les week-ends, ils vivent avec leur famille. «La prochaine étape pour eux sera l’internat, mais de façon progressiv­e: une nuit, puis deux par semaine… » Si Petra et Florence sont rassurées concernant l’avenir de leurs propres enfants, elles continuent de se battre pour les autres familles qui attendent, pour certaines, depuis plus de vingt ans une place. « Vingtquatr­e places pourraient dès avril 2019 être disponible­s à Cannes (3), si l’ARS, la Région et le Départemen­t des A.-M. avaient la volonté de lancer un appel à projet pour un FAM autistes, ce qui n’a pas été fait depuis dix ans », annoncent les deux femmes. Et elles lancent aujourd’hui un appel à destinatio­n de ces familles qui, dans la région, ont la charge permanente de leur jeune adulte handicapé. «Contactez-nous, nous ferons tout pour vous aider ! »

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Petra (à gauche), se souviendra toujours de cette première fois où sa fille, alors âgée de  ans, posait sa main sur son épaule. Des moments de tendresse tout aussi précieux pour Florence, la maman de Maxime. (DR)

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