Nice-Matin (Cannes)

CharlElie casque nu mais tête pleine à Saint-Tropez

Juré tropézien du 20e Festival du cinéma des Antipodes, le chanteur-plasticien, échaudé par Trump, s’est résolu à quitter New York mais revient revigoré sur tous les tableaux début 2019

- LAURENT AMALRIC lamalric@nicematin.fr

L’art d’être Couture » titrait en 1985 un grand mensuel musical à propos de CharlElie. À l’époque déjà, l’artiste-plasticien s’évertuait à décoller les étiquettes le confinant au statut de poète rock. Il aura fallu l’exil américain pour obtenir cette reconnaiss­ance même si désormais, l’homme au casque nu, écoeuré par Trump, a retrouvé son bercail hexagonal. Ce qui lui permet d’intégrer, jusqu’à aujourd’hui, le jury du 20e Festival du cinéma des Antipodes. L’occasion aussi de rallier Saint-Tropez, la «cité des peintres» qu’il fréquenta en chanteur dès les années 80, lors du festival du vidéoclip, événement mort-né tombé aux oubliettes. Depuis, véritable sismograph­e en sentiments, libre-penseur au langage métaphoriq­ue, CharlElie poursuit son épopée créative entre exposition­s, édition et nouvel album crucial en janvier 2019. Cet érudit très urbain en parle avec un double expresso décaféiné pour tout carburant.

Gardez-vous un lien étroit avec l’Australie qui a infusé plusieurs de vos albums et publicatio­ns ?

Oui, car j’ai passé pas mal de temps dans ma tête et physiqueme­nt dans ce pays. Entre  et . J’y louais des appartemen­ts pour y rester par séquence. Essentiell­ement à Melbourne. L’Australie a correspond­u, pour moi, à une autre manière de comprendre le monde. C’est là où la civilisati­on occidental­e est la plus récemment implantée et en même temps la société aborigène, qui est très spirituell­e, me fascinait. Elle a ceci de particulie­r d’avoir existé sans rien créer contrairem­ent à notre société du remplaceme­nt où l’on va jusqu’à se créer des choses même lorsqu’il n’y a pas de besoins.

Après  ans à New York, comment gérez-vous le « retour au port » ?

Je suis de retour un peu sur tous les fronts avec une série d’exposition­s, à Strasbourg, Valence, Montréal, Rodez, au musée de Sète... La publicatio­n d’un recueil de poésie, des entretiens pour une future biographie signée David Desvérité, une émission sur Radio Perfecto où je revisitera­i ma discothèqu­e par ordre alphabétiq­ue... Pour l’instant je vis encore entre Paris et New York, mais là j’y retourne prochainem­ent avec l’idée de vendre mon appartemen­t pour garder juste un pied-à-terre car je ne suis pas milliardai­re ! (rire)

Toulon demeure-t-il l’un de ces ports d’attache ?

Oui au Mourillon, j’y ai ma belle-mère qui est quelqu’un d’incroyable, de solide ! À  ans quand

‘‘ elle part dans des marches, tout le monde croit qu’elle en a vingt de moins !

Vous vous défendez de faire de la politique mais Donald Trump en a pris pour son grade à votre départ américain... Oui, mais les milliers de Scuds tirés dans sa direction ne l’ont toujours pas atteint ! L’Amérique est en train de se déliter et derrière les ébullition­s de ce personnage imbécile ignorant, bien d’autres essaient de profiter de ce magma... À l’inverse, je ne tire pas à boulets rouge sur Emmanuel Macron qui a suscité une effervesce­nce d’espoir après trois mandats juste dramatique­s. J’attends encore de voir... Mais je ne suis pas dupe. Il a dû faire serment d’allégeance à des puissants à qui il paie ses dettes en accordant des privilèges ineffables et iniques...

Le prochain album Même pas sommeil arrive-t-il en réaction à Fort rêveur, un des CD de la période new-yorkaise ?

Le titre est venu le jour où j’ai enterré consécutiv­ement mes amis Véronique Colucci le matin et Jacques Higelin l’après-midi... Je me retrouve à l’aéroport pour faire un concert en Suisse et je vois la vie qui continue... Je me dis qu’eux se sont endormis, oui, mais moi j’ai pas envie de ça. D’où ce titre en réaction Même pas sommeil comme on dit aussi « Même pas peur » de la mort ! J’ai encore tellement de choses à faire.

Quelle sera la tonalité de cet album ?

J’ai du mal à la définir. Si je dis « voyage intérieur », ça fait chier (rire). Disons que c’est ce que je sais faire de mieux. L’influence de la Louisiane du précédent album Lafayette est sous-jacente mais la couleur est plus... (il hésite) C’est une sorte de Poèmes rock [son album de , ndlr] pour ceux qui ont aimé, mais plus blues. Alors disons Poèmes blues !Je pense aussi à Quoi faire ? (). En tout cas, c’est un disque passionnan­t. Il a été enregistré cet été au nord de Paris, au MidiLive Studios [anciens studios des disques Vogue, ndlr] sous les yeux de gens qui étaient invités à assister au processus de création. Une première très enrichissa­nte pour moi.

Avez-vous fini par graver votre titre Les Chevaux froids ?

Oui ça y est ! Elle ouvrira le disque.

Alors ce n’est pas bon signe pour vos fans...

C’est-à-dire ?...

En , à l’époque du -tours Art & Scalp, vous affirmiez que ce serait votre dernière chanson...

En fait, je gardais cette chanson comme une fève en attendant le grand moment de la sortir car elle est très importante pour moi. À un moment donné je me suis dit : “Si je ne l’a fait pas maintenant, quand la ferai-je ?” Il faut arrêter de repousser l’échéance. Mais ce que tu dis n’est pas si menaçant... Chaque disque peut être le dernier, ne serait-ce que pour des raisons de santé... Le tsunami médical ça arrive. Tu peux en entendre de toutes les couleurs, mais j’ai pas envie de m’étendre là-dessus.

Toulon fait partie de mes ports d’attache” Chaque disque peut être le dernier... ”

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