Nice-Matin (Cannes)

La femme mosaïque

Cédric Garoyan met en scène L’Alouette de Jean Anouilh à Antibéa demain. Une adaptation défendant la recherche théâtrale comme organe vital de la création

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr 1. L’Alouette fait partie des Pièces costumées.

Exploratio­n. Dès demain, les douze comédiens du théâtre Antibéa vont partir en quête. Une expédition où chacun creuse dans l’intime profondeur de ses ressentis. Pas le choix : L’Alouette de Jean Anouilh requiert de l’intensité. De la sincère intensité que Cédric Garoyan souhaite mettre en lumière dans sa première adaptation pour le public de cette oeuvre si peu jouée...

Pourquoi adapter cette pièce ?

Au départ, nous avons travaillé le texte dans le cadre d’un atelier avec les élèves confirmés de l’école. C’était il y a deux ans. J’ai choisi cette pièce parce que je voulais les confronter à quelque chose de complexe. Puis, quand Dominique Czapski a vu ce travail de laboratoir­e, il m’a demandé de le présenter au public. Alors quand je l’ai repris, j’ai à tout prix voulu garder cet esprit « atelier » dans lequel les comédiens l’ont appréhendé…

C’est-à-dire ?

Je l’ai voulu comme un hommage à ce lieu unique qu’est Antibéa, à la création, à l’école également. C’est pour cela que j’ai choisi de ne pas la mettre en scène en costumes (), je ne suis pas dans une démarche réaliste.

Sur scène, ça se traduit dans l’épure ?

Pas exactement. On peut dire qu’au centre du plateau c’est le cas, oui. Mais j’ai voulu amener les coulisses sur scène pour rendre encore plus évident cet esprit « atelier ». C’est la conception même du théâtre. On voit des comédiens qui cherchent leur personnage.

Le parti pris de choisir deux « Jeanne » était une évidence ?

Oh, il pourrait en avoir encore plus ! [sourire] Il y a autant de Jeanne que de personnes au final. Chacun a la sienne. On le voit déjà avec la gauche pour qui elle est une pauvre, trahie par le roi. L’église également la voit différemme­nt, l’extrême droite l’a reprise aussi… Chacun la mange à sa « sauce » si j’ose dire.

Et les vôtres?

Disons qu’il y en a une qui est plus dans la réflexion que l’autre, une qui est plus illuminée que l’autre… J’ai voulu une comédienne brune et une comédienne blonde également, pour avoir cet effet tranché.

Vous avez dû procéder à des coupures dans le texte : exercice difficile, non ?

Ce n’est jamais évident. Mais rien que pour une question de format, c’était une obligation. Au total, la pièce dure quatre heures, je voulais la ramener à moins de deux heures. Il fallait également garder le côté percutant de cette recherche qui prend place sur scène. Mais bien évidemment le texte est beau. Il faut faire des choix. Et comme toujours il n’y a pas une seule vérité au théâtre. Et comme toujours, le texte est un prétexte.

À quoi?

Pour parler du théâtre, d’Antibéa et de son école, de Jeanne d’Arc comme personnage historique – de la réhabilite­r pourquoi pas–, de dire aussi ces mots-là tout en restant modeste face au texte. Parce que derrière l’idée de création il y a la modestie. C’est un personnage que l’on n’atteint pas, et cela devient alors une pièce que l’on n’atteint pas.

Vous dîtes que Jeanne d’Arc est une cousine d’Antigone ici…

On retrouve des similitude­s. Toutes les deux rencontren­t des figures d’autorité – masculines – qui argumenten­t pour leur faire changer de voie. Mais elles refusent de les écouter, elles refusent la facilité.

Savoir +

L’Alouette de Jean Anouilh, demain et samedi à 20 h 30, dimanche à 16 heures, vendredi 26 et samedi 27 octobre à 20 h 30 et dimanche 28 octobre à 16 heures, au théâtre Antibéa, 15 rue GeorgesCle­menceau à Antibes. Tarifs : 14 à 16 euros. Rens. 04.93.34.24.30.

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