Nice-Matin (Cannes)

Toujours prendre au sérieux un traumatism­e sonore Prévention

Une séance de bricolage avec une scie circulaire, un concert... les occasions de s’abîmer les oreilles sont nombreuses. Prudence, les dommages peuvent être irréversib­les

- AXELLE TRUQUET atruquet@nicematin.fr

Vous avez assisté à un concert. C’était super, vous étiez près de la scène, pas loin des enceintes. Sauf que de retour chez vous, vous ressentez un bourdonnem­ent dans vos oreilles inconforta­ble. Manifestem­ent, vous avez mis en danger votre capital auditif. Car un traumatism­e sonore peut l’endommager de manière irréversib­le. « Le traumatism­e sonore dépend de la durée d’exposition et de l’intensité, résume le Dr Nicolas Guevara, chirurgien ORL et vice-président de l’IUFC (Institut universita­ire de la face et du cou). Et il indique des échelles de niveaux sonores qui permettent de se faire une idée. «Les dommages surviennen­t au bout de 8 h d’exposition continue à un son de 85 dB, 4 heures pour 88 dB, 2h à 91 dB et il ne faut pas s’exposer plus de 15 minutes maximum à 100 dB. »

Après le bruit, du repos

Pour prendre la mesure des dégâts provoqués par une écoute trop longue et/ou trop intense, il faut bien comprendre le fonctionne­ment physiologi­que. «Dans l’oreille interne, ce sont les cellules ciliées qui transforme­nt l’énergie acoustique en énergie électrique. L’onde acoustique va les mettre en action. Or un bruit très fort peut provoquer comme un tsunami et donc les mettre en péril. Sauf que ce type de cellules ne se reconstitu­e pas. Si elles sont trop abîmées, elles sont détruites. Nous disposons d’un capital à la naissance qui ne se régénère pas au cours de la vie. » Un peu comme un muscle, fatigué d’avoir été sollicité après une séance de sport, l’oreille a besoin de repos après avoir été durement sollicitée. « Le temps de pause doit être au moins égal à la durée d’exposition au bruit pour être efficace», l’ORL Niçois. Si malgré cela, vous ressentez une gêne : vous avez l’oreille « cotonneuse », percevez un sifflement aigu qui persiste… cela signifie qu’il y a une souffrance au niveau des cellules cillées. Et là, une seule chose à faire : consulter en urgence (c’est-àdire, idéalement, dans les premières heures) un chirurgien ORL pour optimiser les chances de récupérati­on. En ne faisant rien, les choses ne vont pas se rétablir d’elles-mêmes, au contraire. assure « Le traitement est basé sur des corticoïde­s qui permettent de limiter l’oedème, résume le Dr Guevara. Il est prescrit pour 5 à 8 jours.» Un

Dr Nicolas Guevara

Chirurgien ORL

traitement de courte durée n’aura que peu d’effets secondaire­s. Les séquelles liées à un traumatism­e sonore aigu peuvent ainsi être plus ou moins graves : des acouphènes jusqu’à la perte auditive. Autant dire qu’il faut prendre très au sérieux le problème. Et ce type de risques est bien plus répandu qu’on le croit : le cas classique c’est le concert. Mais beaucoup de personnes s’exposent à d’importants traumatism­es chez eux : lorsqu’ils bricolent, qu’ils jardinent car les outils (tronçonneu­se, scie circulaire, tondeuse) sont très bruyants. Il est donc vivement conseillé de porter un casque pour faire son jardin ou réparer une clôture ! (1) le Dr Guevara est aussi responsabl­e médical du départemen­t ORL, chirurgie de la face et du cou, chirurgie maxillo-faciale du CHU de Nice et responsabl­e de la filière otologie et oto-neurologie La loi a récemment changé. Elle préconise, dans les lieux tels que les salles de concert, les boîtes de nuit, la mise à dispositio­n gratuite du public de protection­s auditives (bouchons en mousse). Ils doivent par ailleurs s’équiper de zones de repos auditif : des salles par exemple insonorisé­es dans lesquelles il serait possible de faire une pause pour soulager les oreilles. Pour se protéger efficaceme­nt, il est conseillé de porter des bouchons : cela ne vous empêchera pas de profiter de votre chanteur préféré mais surtout vous ne ressortire­z pas du concert avec ce fameux bourdonnem­ent. Les bouchons en mousse sont peu chers. Un peu plus sophistiqu­és, les bouchons mécaniques avec des petites ailettes : ils permettent d’absorber les ondes de manière assez linéaire et retranscri­vent donc bien le son diffusé. Les profession­nels, bien au courant des risques encourus, se munissent tous de bouchons réalisés sur mesure chez un audio-prothésist­e. Ils sont plus chers mais très efficaces.

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Le capital auditif dont nous disposons à la naissance ne se régénère pas. Il faut donc en prendre grand soin. (Photo Cyril Dodergny)
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