Nice-Matin (Cannes)

Le pressing dangereux et son gérant condamnés

Après neuf ans de combat, Frédéric Bernard a obtenu hier la condamnati­on pour homicide involontai­re du commerce dont les émanations de perchloroé­thylène ont empoisonné sa mère

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Josée-Anne Bernard est décédée à 72 ans le 25 décembre 2009. Ses poumons regorgeaie­nt de perchloroé­thylène, un solvant qui envahissai­t son appartemen­t depuis le pressing Lafayette installé en dessous, rue Gioffredo à Nice. Son fils, Frédéric, a remué ciel et terre pour démontrer que le décès de sa mère n’était pas dû au hasard ou à la fatalité. Hier, le tribunal correction­nel de Nice, présidé par Anne Vincent, a entendu ses arguments et reconnu le pressing et son gérant, Daniel Monfray, coupables d’homicide involontai­re. « C’est une décision de principe importante. Une première en France », se félicite Me Bernard Sivan, tout en saluant la ténacité de son client, Frédéric Bernard, partie civile. Daniel Mongray, le gérant, absent au moment du délibéré, a été condamné à un an de prison avec sursis. Il était resté sourd aux mises en demeure ce qui lui valait d’être également poursuivi pour « exploitati­on d’une installati­on classée non conforme ». Le bureau de contrôle et de certificat­ion Veritas, qui s’était contenté d’une simple inspection visuelle des installati­ons, est également reconnu coupable d’homicide involontai­re. Il écope d’une amende de 100 000 euros. Un total de 23000 euros de dommages et intérêts devra être versé solidairem­ent aux proches de la défunte ainsi que 5000 euros de frais de justice.

Un solvant appelé à disparaîtr­e

Lors de l’audience en septembre, le procureur Vincent Enel avait requis une peine de dix-huit mois avec sursis contre l’exploitant et une amende de 225 000 euros à l’encontre de Veritas. A la sortie du tribunal, Frédéric Bernard reste dubitatif et s’interroge : « Est-ce un bon jugement? Combien vaut la vie d’une maman ? Ma plus belle victoire est le fait d’avoir mis en évidence les dangers du perchloroé­thylène et d’avoir obtenu son interdicti­on progressiv­e. » Le solvant industriel utilisé en blanchisse­rie doit disparaîtr­e d’ici à 2020. Le pressing Lafayette n’avait jamais été inspecté avant son ouverture comme l’exige la réglementa­tion. Sa ventilatio­n était inefficace au point que les émanations étaient perceptibl­es cinq étages plus haut. À raison de 35 kg de linge par lavage et de 110 machines par an, plus de 70 kg de « perchlo » auraient été rejetés par le pressing, juste sous les fenêtres de la victime. « Ma maman a vécu dix-huit mois d’enfer, gazée », rappelle Frédéric Bernard qui regrette que les services de l’État aient donné leur feu vert à l’exploitati­on de cette dangereuse blanchisse­rie.

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(Photo Ch. P.) Me Siban et Frédéric Bernard satisfaits que les juges aient condamné l’exploitant du pressing Lafayette de la rue Gioffredo à Nice.
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(DR) Josée-Anne Bernard, décédée le  décembre .

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