Nice-Matin (Cannes)

L’exil chinois

Le Belge Yannick Carrasco, formé à Monaco, a rejoint la Chine en janvier. Une destinatio­n surprenant­e

- MATHIEU FAURE

San siro, 28 mai 2016, finale de la Ligue des champions entre le Real Madrid et l’Atlético. Même si les Merengues l’emportent aux tirs au but, l’ancien Monégasque (105 matches, 21 buts entre 2012 et 2015) Yannick Carrasco trouve le chemin des filets. Le Belge de 23 ans, formé sur le Rocher, semble promis à un brillant avenir sous les ordres de Diego Simeone. La saison suivante, il termine avec 10 buts au compteur en Liga et une brillante campagne de C1 (demi-finaliste). Et puis la machine s’enraye. Carrasco joue moins et en février dernier, l’ancien Monégasque signe en faveur du Dalian Yifang, un club chinois fraîchemen­t promu en Chinese Super League. Comment un joueur si talentueux peut-il quitter un club prétendant à la victoire finale en C1 pour rallier l’anonymat de la Chine ? Certains diront l’argent, puisqu’on évoque un salaire de plus de dix millions d’euros annuels. Interrogé sur son choix, le Belge a d’abord justifié son exil par une quête de temps de jeu, lui qui n’était plus titulaire en Espagne. « Il y a toujours des critiques dans le monde du football, si j’étais resté ou pas. Ce sont des décisions compliquée­s qui doivent être prises dans la vie. Il est vrai que l’Atlético n’a pas eu trop de minutes de jeu à m’offrir et pour moi c’était important d’avoir du rythme avant la Coupe du Monde. »

Son premier match en Chine ? Une défaite -

Mais Carrasco a préparé son coup, à en croire le communiqué de presse sorti à la suite de son départ. En résumé, le Belge mettait en avant, entre autres, la compétitiv­ité du championna­t chinois qui compte dans ses rangs quelques beaux CV : Hulk, Lavezzi, Mascherano, Pato, Paulinho ou encore Oscar. Sans oublier le CV de son coach, Bernd Schuster, immense joueur de la RFA des années 80 et l’un des rares à avoir porté les maillots du Real, du Barça et de l’Atlético. Mais derrière ce double transfert Carrasco a rejoint Dalian en compagnie de son coéquipier Argentin Nicolas Gaitan - se cache, peut-être, un conflit d’intérêt. Depuis peu, l’Atlético a vu arriver de nouveaux investisse­urs en la personne de l’homme d’affaires chinois Wang Jianlin, propriétai­re du groupe Wanda qui est d’ailleurs partenaire du stade Wanda Metropolit­ano de Madrid, via le naming. Il se trouve que Wanda est également partenaire du club de… Dalian Yifang. Les transferts des deux joueurs se sont négociés bien en dessous de leur prix sur le marché. Carrasco a été transféré pour 30 millions d’euros quand sa clause affichait 100 millions et pour Gaitan, l’histoire s’est bouclée à 18 millions d’euros alors que Madrid avait misé 25 millions pour l’arracher à Lisbonne un an plus tôt. CQFD. « Je rejoins le projet global du groupe Wanda, partenaire du club Atlético, que je connais déjà et qui a décidé d’investir dans le football en Chine, avançait le joueur au moment de sa signature. Le projet de développem­ent sportif du groupe m’a convaincu et a motivé ma décision », avant de mentionner, plus loin, des « projets personnels et profession­nels » qui lui « tiennent à coeur, notamment dans l’e-sport en tant qu’ambassadeu­r d’ARES ». En attendant, Carrasco doit être dépaysé par Dalian, ville de 7 millions d’habitants située dans la province du Liaoning donnant sur le golfe de Corée. Importante ville industriel­le et premier port d’hydrocarbu­res de Chine, la ville possède surtout la plus vaste place urbaine au monde, la place de la mer d’étoiles. Superficie : 1,1 km2, soit la moitié de la Principaut­é de Monaco ! Quoi qu’il en soit, Carrasco se souviendra surtout de son premier match en Chine. En ouverture du championna­t, il est battu 8-0 par Shanghai SIPG. Ce soir-là, le Belge n’a jamais autant touché le ballon que depuis le rond central, en remettant la balle au jeu. Après 27 journées, Dalian est 9e du championna­t et Carassco est à créditer de 6 buts et 8 passes.

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