«Etern-ailes», la stèle dédiée aux familles
Au Crématorium de Cannes, les parents endeuillés peuvent désormais se recueillir au jardin du souvenir. Il s’agit du second monument du département voué au deuil périnatal
Ils étaient là. Comme flottant au-dessus de la cérémonie. Ces jeunes êtres partis trop vite. Trop tôt. Le soleil était de plomb. Comme les coeurs. Serrés. Forcément touchés par le drame insondable de la perte d’un enfant. Au crématorium de Cannes, dans le jardin du souvenir créé il y a deux ans, la stèle Etern-ailes permet désormais aux parents confrontés au deuil périnatal de se recueillir. C’est l’artiste cannois Gregory Berben qui a imaginé et conçu cette sculpture de fer noir, élégante et sobre, qui laisse s’échapper vers le ciel des petits l comme autant de petits anges. « J’ai vécu il y a un an une naissance compliquée pour ma fille. J’aurais pu en avoir besoin, de cette stèle… » a-t-il expliqué, la gorge nouée par l’émotion.
« Voir représentés nos enfants »
Charline et Johan, jeune couple de Cannois, ont traversé cette terrible épreuve il y a trois semaines à peine. Ils tenaient à être là. « Cela n’enlève pas la peine, mais c’est bien. Cela permet de rendre hommage à notre fils même s’il a été inhumé », glissent-ils courageusement. Lysiane aussi a perdu un petit il y a trois ans. Né trop prématurément. « C’est important que dans les cimetières, on puisse représenter nos enfants », confie-t-elle, aujourd’hui maman d’un petit Daniel, en poussette. « Pour ce travail de deuil, de mémoire, il est nécessaire d’accompagner ces familles. Par le dialogue. Par l’art », a déclaré, touché, le maire David Lisnard, en père de famille. Après celle du crématorium de Nice imaginée par Moya, la stèle des bébés de Cannes est la seconde du département. Son installation a été concrétisée grâce à l’association Nos tout-petits de Nice, créée en 2012, qui rassemble 200 familles concernées dans les AM. La stèle cannoise a été son cheval de bataille depuis trois ans. «Le deuil d’un petit, ce n’est pas un petit deuil, c’est le deuil de l’avenir, du futur, et des projets qui vont avec. C’est très important de reconnaître ce deuil d’un point de vue sociétal. Car les gens en minimisent souvent l’impact», a indiqué Isabelle De Jesus, vice-présidente de l’association et gynécologue obstétricienne à l’hôpital de Cannes.
La bataille de la filiation
D’autres combats sont à venir. Comme la filiation. « Depuis 2009, les enfants décédés in utero peuvent être inscrits au livret de famille, mais ils ne bénéficient pas de la filiation, c’est-à-dire qu’ils n’ont pas de nom, juste un prénom. C’est un travail de longue haleine avec des implications législatives. » Autre bataille, la prise en charge de la crémation des enfants morts in utero. « Elle est réalisée avec d’autres pièces anatomiques. Notre objectif, c’est de pouvoir obtenir une crémation collective de bébés décédés. » Dans ces drames, l’accompagnement des parents mais aussi du personnel hospitalier est essentiel. Cette association aide les premiers via des groupes de parole et mène des formations auprès des seconds dans les maternités.