Le téléphone fixe : passé,
« Ici, on vit un peu à l’ancienne... » Ici, c’est sur les hauteurs de Bellet, dans un écrin de verdure niché à douze kilomètres du centre-ville de Nice. Ici, on célébrait la bénédiction des tombes, jeudi, pour la Toussaint. Ce jour-là, une dame âgée s’approche de Mireille Roux et lui glisse : « Vous vous rendez compte, si on n’a plus le téléphone, en cas de maladie ? » Et d’ajouter, en niçois : « Mais comment on va faire ? » Mireille Roux, 70 ans, a rassuré son aînée : non, le téléphone ne va pas disparaître. Mais elle le reconnaît : « Vivre avec son temps n’est pas toujours facile. » Mireille, présidente du comité de quartier Lou Belletan, est un peu le réseau social du secteur. Mais la fin prochaine du réseau téléphonique commuté lui laisse en bouche un goût amer, teinté de nostalgie. « Je revois mes parents, à 95 ans, s’asseoir côte à côte le dimanche à 17 h, avant la soupe. C’était le rituel. Ils appelaient la famille en Italie, dans un mélange de français, d’italien et de niçois. Ils parlaient fort, en même temps... On se demandait comment ils arrivaient à se faire comprendre ! », s’esclaffe Mireille, attendrie et émue. La septuagénaire exhume un vieux téléphone à cadran poussiéreux, vestige d’un âge d’or bientôt révolu. Retraitée – très active – depuis trois ans, Mireille s’est convertie à la téléphonie mobile et au Web. «La technologie s’est développée très vite. On n’a pas le temps de s’habituer au rythme. On est obligé de subir. Consulter sa facture téléphonique, établir une carte grise, payer ses impôts en ligne... Je m’y fais petit à petit. Mais je comprends que les personnes plus âgées aient du mal. »
«Ici,çaramebien!»
Mireille se souvient de l’arrivée du téléphone fixe dans les foyers, au milieu des années 70. « Une révolution agréable. » Fini, le temps où il fallait faire le tour de la famille pour prendre des nouvelles de chacun. Puis est arrivé le téléphone portable, devenu indispensable aux activités associatives de Mireille. Un outil à la fiabilité aléatoire : la communication a été interrompue deux fois lors de notre prise de rendez-vous... Désormais, c’est Internet qui s’immisce dans tous les usages. Non sans mal sur cette colline excentrée. « Ici, Internet, ça rame bien ! Tout un côté de la route attend d’être fibré. Parfois, ça ne marche pas du tout pendant des heures... Est-ce que ce sera pareil pour le téléphone ? »