Dans les méandres de l’anorexie Psycho
Potentiellement grave, l’anorexie mentale touche surtout des jeunes filles. Si bien des mystères entourent encore ce trouble psychique, la prise en charge s’organise dans la région
Elle frappe chaque année des milliers de jeunes gens. Et leurs familles. Qu’elle que soit la forme sous laquelle elle se manifeste [lire interview ci-dessous], l’anorexie mentale entraîne l’individu – une jeune fille dans 90 % des cas – dans une spirale morbide, face à laquelle les proches, les parents, la fratrie se sentent souvent impuissants. « Ces jeunes filles vont tout mettre en place pour maigrir encore et encore: tri des aliments, réduction des quantités, puis exclusion de familles entières d’aliments, jusqu’à ne plus rien manger, résume le Dr Emmanuelle Dor, pédopsychiatre (service du Pr Florence Askenazy) à Lenval. Discrètement, elles vont donner à manger au chien, vider leur assiette dans la poubelle, se faire vomir, mentir en disant qu’elles mangent à la cantine… » Des attitudes dont les parents ne sont un jour plus dupes et qui vont les pousser à tout suspecter. « Après une phase de déni, ils deviennent méfiants, surveillent en permanence leur enfant, quantifient les aliments… C’est un véritable rapport de force qui peut s’instaurer entre eux et leur enfant malade.» Mais le « combat doit être mené contre la maladie et non contre l’enfant», insiste le Dr Dor, soucieuse de dissiper un malentendu aux effets délétères. « Chacun ressent – à tort – un sentiment de trahison, d’incompréhension et aussi de la culpabilité, à l’origine de tensions qui vont, ellesmêmes, entretenir les symptômes de l’anorexie». D’autant que LA grande question : «Pourquoi?» reste sans réponse. « On ne connaît toujours pas les causes, comme on continue d’étudier les mécanismes psycho-pathologiques », reconnaît le Dr Dor.
Chronique annoncée ?
Les spécialistes ont néanmoins pu identifier quelques points communs entre ces jeunes gens malades d’anorexie. «On retrouve très et que quelqu’un leur a fait une remarque sur leur poids, sur leur aspect physique. Démarre alors insidieusement la mise en place d’une maîtrise des apports alimentaires. Et lorsque la jeune fille constate l’amaigrissement, cette sensation de prise du contrôle vient dans un premier temps la rassurer et la conforter dans son comportement.» Mais rapidement les angoisses réapparaissent. Et, « lorsque la spirale de la maladie s’enclenche, toutes passent par une phase de déni et la perte de poids n’est jamais suffisante, elles continuent de se trouver trop grosses même quand elles ont atteint 35 kg ! Elles ont une image très dévalorisée d’elles-mêmes.» Triste rappel : l’anorexie est aujourd’hui la maladie psychiatrique qui tue le plus. Soit par suicide, soit du fait des complications somatiques: infection, insuffisance cardiaque, rénale par déshydratation, occlusion intestinale… Ne nous hâtons pas de conclure que toutes ces jeunes filles flirtent volontairement avec la mort. «Même à des stades avancés, elles ne se représentent pas la mort. Et même si on leur dit qu’elles sont en train d’aller tout droit vers cette issue, elles ne le croient pas.»