Nice-Matin (Cannes)

« L’objectif? Me qualifier aux Jeux Paralympiq­ues »

Né sans bras gauche, Benoit Grasset joue à l’OAJLP comme pongiste valide, tout en étant membre de l’Équipe de France handisport. Un handicap qui ne freine pas sa progressio­n, ni ses ambitions

- PROPOS RECUEILLIS PAR VIVIEN SEILLER sports-antibes @nicematin.fr

Il n’est pas l’arme numéro 1 des pongistes antibois en Nationale 2 mais Benoit Grasset a su se faire sa place. Tranquille­ment. Souffrant d’une malformati­on de naissance qui l’a privé de son bras gauche, le Vendéen de 27 ans a fait du tennis de table sa passion et défend les couleurs de l’OAJLP chez les valides en même temps qu’il évolue avec l’Équipe de France handisport. Ingénieur à Cannes-la-Bocca, il bénéficie d’un aménagemen­t de son emploi du temps en tant que sportifs de haut niveau et ne s’empêche pas de rêver pour la suite.

L’équipe s’est inclinée chez le leader ce week-end. Logique ?

C’est une équipe très compétitiv­e [Saint-Égrève] .Jesuisle quatrième joueur de l’équipe en Nationale  mais je commence à grappiller pas mal de matchs. On a joué l’équipe la plus difficile de la poule avec deux Polonais qui s’entraînent deux fois par jour. Ce sont des joueurs profession­nels. J’ai eu un match accroché mais les autres étaient quand même au-dessus de moi.

Le début de saison reste positif ?

Oui, la Nationale  c’est quand même un peu au-dessus de mon niveau et malgré ça j’ai gagné deux fois deux matchs sur trois à domicile donc c’est plutôt pas mal. Sur le plan collectif aussi. On ne pensait pas viser la montée [en Nationale ] et on avait

‘‘ l’occasion de la viser. On a perdu - donc on la manque pour pas grand-chose. On verra quand la deuxième phase commencera en janvier (). Ça reste possible.

L’équipe antiboise a belle allure !

Ah oui ! On a deux joueurs Grecs. Le premier est numéro  dans son pays et e Français c’est pas mal. Il a joué au niveau internatio­nal pour la Grèce. Le deuxième est en forte progressio­n, il joue mieux que l’année dernière. Mais ce weekend les quatre joueurs en face étaient meilleurs que Clément [Blanc] et moi, qui sommes troisième et quatrième joueurs de l’équipe. On essaie de grappiller des matchs mais contre des équipes très fortes c’est difficile. Ça joue fort.

Quel rôle jouez-vous à l’OAJLP ?

J’ai des meilleurs résultats actuelleme­nt que le numéro  mais ce n’est que sur quelques matchs. Je gagne environ un match sur , pour un quatrième joueur c’est très bien. Je le prends comme du bonus, mon niveau se situe ” plus en Nationale .

Comment s’organisent vos semaines ?

Je m’entraîne avec les joueurs valides à Antibes mais j’ai beaucoup de stages nationaux et de compétitio­ns avec l’Équipe de France handisport. J’ai aussi des entraîneur­s et des séances individuel­les au CREPS de Boulouris [Var]. En moyenne je fais quatre ou cinq stages nationaux par an en France.

L’Équipe de France ?

J’y suis depuis deux ans et dès ma deuxième année j’ai fait une médaille de bronze aux championna­ts du monde qui m’a permis d’avoir le statut de sportif de haut niveau et d’avoir un aménagemen­t d’horaires avec le travail. J’ai  jours dans l’année qui me sont donnés pour la pratique du tennis de table.

Vous devez vous adapter pour passer d’une pratique à l’autre ?

Comme je n’ai pas un gros handicap il n’y a pas forcément d’adaptation à faire. Les joueurs que j’affronte au niveau internatio­nal en handisport sont comme ceux dans ma classe () donc ils ont à peu près le même jeu que les valides.

Il y a un équilibre à trouver ?

C’est ça. Il y a un impact sur l’équilibre. Quand je fais un mouvement d’un côté après j’ai du mal à repartir de l’autre. Il y a des coups que j’ai un peu plus de mal à faire, notamment

‘‘ pour me replacer derrière. Pour le service je dois tenir la balle dans la même main.

Le regard des autres joueurs ?

Maintenant ils me “connaissen­t”, il n’y a aucun problème.

Le fait de grandir avec le handicap vous a pénalisé ?

C’était peut-être un peu plus compliqué quand j’étais adolescent mais les gens font attention. Je joue même avec, je fais des blagues avec mes potes. Il n’y a aucun problème. C’est peut-être plus difficile pour ceux qui ont un accident et qui n’ont jamais vécu avec mais moi il n’y a aucun problème. C’est même presque un atout des fois.

L’affaire des “bébés nés sans bras” () vous touche particuliè­rement ?

Je suis un peu, oui, mais il y a beaucoup de politique et je ne sais pas démêler le vrai du faux. Je regarde quand même parce qu’on m’a toujours dit que mon problème était aléatoire donc par curiosité je suis l’affaire pour voir s’ils découvrent une raison .

Quelles difficulté­s peuvent vous freiner au quotidien ?

J’ai étudié la musique pendant presque quinze ans et je ne pouvais faire qu’une seule note avec la main gauche. Dans la vie de tous les jours le seul problème que j’ai c’est que je ne sais pas nager mais je pourrais, c’est juste que je n’ai pas appris en étant petit. Pour tout le reste il n’y a aucune adaptation particuliè­re.

Quels sont les objectifs à venir ?

Me qualifier pour les Jeux Paralympiq­ues de Tokyo en  et après Paris en  [sourire]. Les joueurs que je joue sur le plan national sont quasiment tous profession­nels. Chinois, Polonais, Anglais... Actuelleme­nt je suis trentième mondial dans ma catégorie. L’objectif ? Rentrer dans le top  voire le top  mondial pour être aux Jeux.

1. Les Antibois évolueront toujours en Nationale 2 lors de la deuxième phase et viseront la montée en Nationale 1 à l’issue de celle-ci. 2. Il existe 11 classes pour différenci­er les handicaps. Benoit Grasset fait partie de la classe 10. 3. « En quelques années, au moins huit enfants sont nés avec des malformati­ons dans le départemen­t [de l’Ain], sans que les causes aient été identifiée­s », explique le journal Le Monde.

Un impact sur l’équilibre Le regard des autres ? Aucun problème

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(Photo Eric Ottino)

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