Nice-Matin (Cannes)

Les nouveaux rois du shopping

Plus éthique et moins toc, à la fois culturel et ludique, l’immobilier commercial du XXIe siècle se construit au Mapic. Pour lutter contre la tentation du clic, malgré quelques polémiques

- FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

On les accuse parfois de tous les maux. Ils seraient notamment responsabl­es de la désertific­ation de certains centres-villes. Procès bien pratique puisqu’il lave d’une même eau des politiques d’habitat étiques et toutes les mesures concourant à l’éviction du trafic automobile dans les coeurs historique­s. Les centres commerciau­x ont pourtant un avenir. Qui paraît même radieux, si l’on en juge par la floraison de projets agitant les allées du Mapic. Ce salon internatio­nal de l’immobilier commercial rassemble, au Palais des Festivals de Cannes, tous les acteurs d’un secteur qui, pour résister aux assauts du commerce en ligne, doit se réinventer au plus vite. Antoine Frey, aux commandes d’un groupe familial très actif, préside aussi le Conseil national des centres commerciau­x (CNCC), une fédération qui regroupe promoteurs, investisse­urs, utilisateu­rs, prestatair­es. En France, les clics ne représente­nt, pour l’instant, que 8% des achats. Mais la quote-part des ventes en ligne double tous les trois ou quatre ans. « Si le commerce ne se repense pas, alors les gens ne consommero­nt plus que depuis leur canapé », prédit Antoine Frey. « Avec, à la clé, une destructio­n du lien social. Au préjudice du centre-ville comme de l’entrée de ville. » La lourdeur administra­tive, dit-il, est un frein. «On met en moyenne quinze ans pour créer ou transforme­r un centre commercial. Alors que les modes de consommati­on, avec Internet, évoluent à la vitesse de la nanosecond­e.» Pour le président du CNCC, il faut se poser de bonnes questions: «Demain, que veut-on? Des lieux où les gens se croisent, se rencontren­t, se sociabilis­ent? Dites-vous bien que du lien, il n’y en aura jamais dans une plateforme Amazon. Pour laquelle deux ans suffisent à obtenir les autorisati­ons, même si l’impact est énorme.»

Vive la taxe sur les colis

« Ce n’est pas en empêchant les zones commercial­es périphériq­ues de se restructur­er que l’on sauvera les boutiques de centre-ville », martèle Antoine Frey. Les enseignes ne sont pas les mêmes, leurs besoins non plus. Les projets de Nice, Valbonne ou Antibes (lire par ailleurs) en sont autant d’illustrati­ons. Avec, cependant, de vives critiques. «Il y a toujours des résistance­s. Si l’on ne devait jamais évoluer, nous ferions toujours nos courses dans des familistèr­es chez Goulet-Turpin. Le commerce est une matière vivante quinaît, vit, meurt, il faut accepter le changement. Sans quoi nous resteront un pays d’irréductib­les Gaulois.» L’idée d’un prélèvemen­t de 1€ sur chaque colis livré à domicile après un achat en ligne ne déplaît pas au président du groupe Frey. «Le maire de Cannes a tout à fait raison de s’emparer du sujet de l’équité fiscale entre le commerce physique et le commerce en ligne. Il y a, dans ce domaine, une distorsion de concurrenc­e qui s’ajoute à la distorsion administra­tive.»

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 ??  ?? « Quinze ans pour un centre commercial, deux pour une plateforme Amazon », dénonce Antoine Frey. (Photos Patrice Lapoirie)
« Quinze ans pour un centre commercial, deux pour une plateforme Amazon », dénonce Antoine Frey. (Photos Patrice Lapoirie)

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