« La peur du déclassement »
Comment expliquer que, par temps de crise du pouvoir d’achat, le cru « Black Friday » s’annonce exceptionnel ? Nathalie Lazaric, directrice de recherche CNRS au groupe de recherche en droit et gestion à Sophia Antipolis, nous aide à comprendre ce phénomène paradoxal.
Déclassement et rattrapage
« Entre et , les chiffres de l’Insee montrent que le pouvoir d’achat des classes moyennes a connu une dégradation. Dans le même temps, les classes les plus populaires ont connu un rattrapage, notamment grâce à la revalorisation du RSA et de certaines prestations sociales.» .Faceàla « peur du déclassement » qui touche toutes les couches de la société, le consommateur serait tenté d’acheter, afin de maintenir un statut qu’il sent menacé.
Consignes paradoxales
« La société envoie au consommateur des consignes paradoxales, du coup le consommateur l’est aussi. On lui demande d’être éthique, écologique, et en même temps de consommer plus pour faire fonctionner l’économie. Le président Macron lui-même avait envoyé des signaux pour lutter contre l’épargne et relancer l’économie par la consommation. »
Course à la conso
Nathalie Lazaric évoque la théorie de Tibor Scitovsky sur la « course à la consommation » : « Le consommateur est conscient que le bonheur de l’achat est éphémère, que cette course-poursuite est vaine et que la satisfaction n’est que temporaire. Pourtant, impossible de s’empêcher de céder à cette pulsion, comme un comportement addictif. »
Euphorie puis auto-justification
« Les consommateurs sont plus souvent des victimes que de véritables chasseurs de bonnes affaires. Dans cette euphorie ambiante, ils ont l’impression de faire des bonnes affaires alors qu’ils consomment plus qu’ils ne devraient. Ils ont du mal à identifier leurs besoins réels et se réveillent avec une gueule de bois. » Pour éviter ce piège, Nathalie Lazaric conseille de « prendre le temps de comparer les prix. »