Colère et détermination chez les avocats
Les avocats du Barreau de Grasse ont témoigné leur colère et leur détermination contre le projet de loi qui pose les bases d’une justice qu’ils jugent « déshumanisée »
L’atmosphère était bien calme hier au palais de justice. Pas d’audience, mais une forte mobilisation des avocats du barreau qui ont manifesté leur mécontentement face au projet de loi de la ministre de la justice. Ils étaient une soixantaine à s’être réunis sur le parvis du tribunal de grande instance dans le cadre d’une journée « justice morte ». Un bras de fer entamé depuis bien des mois déjà. « Lorsque Madame la ministre est venue à notre rencontre à Grasse le 28 juin dernier, pour répondre à nos inquiétudes sur le projet de loi de programmation pour la justice. Elle s’est voulue rassurante sur la pérennité du tribunal de grande instance de Grasse comme juridiction de pleine compétence. Nous lui avions fait part de nos réserves et avions demandé de lever les ambiguïtés. Après un été de discussion avec les représentants de la profession, le constat est sans appel. Les engagements ne sont pas tenus. En l’état, rien ne permet d’assurer que le tribunal de grande instance de Grasse restera un tribunal de “pleine compétence” contrairement à ce qui est affirmé », a clamé le bâtonnier de l’Ordre Roland Rodriguez. Selon lui, le projet de loi de réforme judiciaire prévoit toujours la possibilité d’une concentration des contentieux au sein d’un seul tribunal départemental.
Une ministre «cost-killer »
Le discours du bâtonnier fustige également la numérisation de certaines procédures comme les injonctions à payer qui passeraient sous l’égide d’un centre de traitement national, « éloigné des justiciables précaires. » « Ce projet de loi préfigure une justice déshumanisée, porté par une ministre qui se comporte comme une cost-killer d’une grande entreprise », souligne le bâtonnier de Grasse. D’autres avocats présents dénoncent une « politique du chiffre impulsée par un président banquier et un gouvernement de comptables. » « Nous sommes très inquiets pour la suite, évoquent maître Jean-Yves Lepaul et maître Julie Dupy. L’État se désengage d’une tâche régalienne. La justice est en train de perdre cette notion d’humanité. Pour un litige du quotidien, les gens devront aller jusqu’à Toulon ou passer par une société privée. Ce que nous craignons, et que nous entendons déjà, c’est qu’ils vont vouloir se faire justice eux-mêmes. C’est une atteinte du droit humain. » Le bâtonnier a laissé entendre qu’il attendait le positionnement des élus locaux sur le sujet. Retrouvez, sur nicematin.com ,les déclarations du bâtonnier Roland Rodriguez sur cette mobilisation en vidéo.