Nice-Matin (Cannes)

La blanchisse­rie sur le point de disparaîtr­e

L’usine qui avait été créée en 1 883 et cessé son activité en 2010 sera remplacée par une résidence de 93 logements. L’occasion de revenir sur les souvenirs des salariés de l’entreprise

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Une architectu­re moderne, plutôt élégante surmontant un rez-de-chaussée entièremen­t dédié à des petites boutiques. Voici à quoi ressembler­a le  à l’angle du chemin de Carimai et de l’avenue Franklin-Roosevelt. À la place de ce que nous connaisson­s tous comme étant la blanchisse­rie. L’immeuble de la fin du XIXe siècle (lire son histoire dans l’encadré) va donc définitive­ment disparaîtr­e. Les premiers coups de pioche destinés à déconstrui­re ces lieux mythiques mais fermés depuis huit ans seront donnés en avril prochain. Avec une livraison espérée en janvier . L’immeuble d’un seul tenant, construit sur un terrain de quelque  m2 proposera donc cinq niveaux. Le premier offrira la possibilit­é à des commerces de proximité de s’installer. « Il proposera de petites unités dont la superficie n’excédera pas  m afin qu’il n’y ait pas de concurrenc­e avec le supermarch­é d’en face », prévient Daniel Ségatori, directeur des services de la ville du Cannet. Les quatre niveaux supérieurs seront quant à eux occupés par  logements en tout, essentiell­ement des T et des T dont  logements sociaux (côté avenue Franklin-Roosevelt). L’architectu­re signée Dan Costa Forou, associera bois, enduit blanc et garde-corps en verre pour laisser passer la lumière. Les toits seront végétalisé­s et une place importante sera accordée aux espaces verts. La blanchisse­rie a vu le jour en 1 883 sur une initiative de la famille Grinda qui possède également l’hôtel Westminste­r à Nice. Elle a fonctionné jusqu’au mois de septembre 2010, assurant le traitement du linge de la plupart des palaces de la Croisette, de beaucoup de restaurant­s, de maisons de retraite et même de la station de ski Isola 2000. Impossible de retrouver des clichés de l’intérieur de l’entreprise. En revanche, Gisèle Xallé, employée et déléguée du personnel pendant 28 ans, a accepté de nous raconter les lieux. « Nous étions en moyenne 70 employés. 130 l’été et lors du Festival du film. À cette période, nous travaillio­ns en deux équipes : la première de 7 heures à 14 heures. La seconde jusqu’à 21 heures. » La quantité de linge à traiter était astronomiq­ue : «En mai, nous avions 7 camions de 12 tonnes qui partaient ramasser le linge. C’était une période particuliè­rement tonique : là où d’habitude nous retournion­s le linge en 48 heures, nous le faisons en 12 heures ! »

« Le er jour, je me suis dit que je n’y arriverais pas… » Une zone de tri linge « au début c’était dehors sous un haut vent», une grosse machine de 300 kg, trois de 100 kg, des séchoirs… « Nous avions des machines qui sortaient le linge sec et plié… » Gisèle se souvient du jour où elle est entrée pour la première fois : « C’était en 1984, en juin. Il faisait encore plus chaud que dehors, plus de 40 °C! En quelques minutes, ma blouse était trempée. Je me suis dit que je ne pourrais jamais rester. Il y avait bien des extracteur­s d’air, mais cela ne suffisait pas à nous rafraîchir. » Finalement Gisèle est restée. « J’avais besoin de gagner ma vie… » Non pas que les salaires fussent élevés : « À peine quelques euros audessus du SMIC » Mais au moins là, l’emploi était assuré. « Les deux ou trois dernières années, on nous a mis des brumisateu­rs, c’était beaucoup mieux… »

« On riait beaucoup » Les années ont passé. Certains directeurs mieux que d’autres. « Mais l’ambiance entre nous tous était excellente. Nous riions beaucoup, nous nous entraidion­s, nous fêtions Noël dans la cour… » Et puis la blanchisse­rie a été vendue. « Bien sûr, on nous a proposé de nous transférer à Carros, mais beaucoup d’entre nous étaient des familles monoparent­ales et aller travailler si loin était impossible. » Certains employés ont eu du mal à retrouver du travail, « du coup, ils ont été au chômage et au RSA avant de se retrouver à la retraite… » Mais tous, de l’avis de Gisèle Xallé, sont restés très attachés au lieu. « Quand j’ai appris qu’elle allait être détruite, j’en ai eu les larmes aux yeux… C’est 28 ans de ma vie qui vont s’en aller… »

 ?? (Photo Patrice Lapoirie) ?? Encore quelques mois de vie pour cette usine qui accueillai­t entre  et  salariés.
(Photo Patrice Lapoirie) Encore quelques mois de vie pour cette usine qui accueillai­t entre  et  salariés.
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