Nice-Matin (Cannes)

Chems Sallah pose ses jalons Repères

Démissionn­aire du conseil municipal, il pourrait mener une liste à Grasse en 2020

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Son nom — Chems El Dine Sallah — se traduit par « Soleil de la religion. » Mais ce n’est pas de la poésie que déclame, ci-après, le jeune dissident de la majorité grassoise. Plutôt une intention assez ferme de se soumettre, en 2020, au suffrage de la population locale. Démissionn­aire de son poste de conseiller municipal en octobre dernier suite à un désaccord profond avec son ancien ami, Jérôme Viaud, l’homme se découvre des ambitions. Et de l’audace. D’aucuns le surnomment déjà « Iznogoud ». Il lui reste quelques mois pour convaincre que son projet est plus profond que celui d’être calife à la place du calife...

Vous êtes resté quatre ans dans la majorité grassoise...

Oui. Et j’ai été très fier d’exercer mon mandat municipal en portant la délégation de la promotion des jeunes, notamment à travers le dispositif Cité Rêves qui avait été créé par l’ancien maire, Jean-Pierre Leleux. Très fier aussi d’avoir accompagné cette majorité pour redresser la situation financière de la Ville et réduire sa dette abyssale. Mon action a toujours été guidée par le seul intérêt général.

Mais vous avez décidé de prendre le large...

Je n’ai jamais souhaité être en contradict­ion avec les délibérati­ons présentées par mes collègues car, dans une équipe, on travaille en confiance et on ne freine pas l’action de ses colistiers et donc celle du maire. C’est sur la durée que l’on peut évaluer cette action.

Et donc ?

Et bien, au bout de quatre ans, j’ai évalué les choix politiques qui ont été pris par Jérôme Viaud. Avec ce constat : dès le début du mandat, ils étaient erronés. J’estime qu’il aurait pu geler des lignes budgétaire­s, notamment celles à fond perdu des manifestat­ions, ou regrouper des événements qui coûtent  M€ par an : la Fête de la bière, la Fête de la Toscane, Exporose qui aurait pu avoir lieu une année sur deux, certaines réceptions organisées par le maire, etc. Cela aurait permis de créer de la liquidité et de dégager des marges supplément­aires.

Vous pensez que Jérôme Viaud en fait trop ?

Je pense qu’il aurait mieux fait d’organiser son mandat en trois phases : dans un premier temps, gel des dépenses inutiles avec audit des dépenses publiques, des bâtiments communaux, du parc automobile, etc. ; ensuite, une fois la Ville placée dans une situation financière plus stable — ce qui aurait évité le recours aux ventes d’actifs —, lancement des chantiers majeurs qui concernent le quotidien des Grassois ; enfin, finalisati­on et livraison de ces projets et préparatio­n de la campagne de . Cette prise de conscience a conforté ma décision de démissionn­er mais sans volonté d’abandonner la majorité municipale.

Cela est un peu contradict­oire, non ?

Non, parce que dans une équipe, on peut ne pas être en phase avec les choix proposés, mais les accepter par souci de servir l’intérêt général.

Mais pourquoi avoir attendu quatre ans pour exprimer votre désaccord ?

Je ne peux pas avoir un oeil sur tout. J’ai fait confiance au maire parce qu’il a dit qu’il allait mettre en oeuvre certaines actions eu égard à la situation catastroph­ique de la Ville qui était à la limite de la mise sous tutelle. Je voulais lui laisser du temps pour, ensuite, voir les effets de ses décisions. Quand le maire dit “Je gère la situation”, je n’ai pas à m’opposer, d’autant qu’il n’y avait de ma part aucun calcul politique. Sinon, j’aurais pu me présenter aux deux élections intermédia­ires — les départemen­tales et les législativ­es — avec En Marche. Cela aurait été une trahison vis-àvis du maire. Je suis donc resté concentré sur mon mandat municipal.

Votre avis sur les grands projets de la Ville ?

Je suis favorable à tout ce qui peut améliorer la situation des Grassois. Cela dit, je pense que la médiathèqu­e ne correspond ni à une attente ni à une utilité urgente pour les habitants. Je défends la culture mais il ne faut pas accepter n’importe quel projet. Je rappelle que nous disposons d’une bibliothèq­ue à la Villa Saint-Hilaire, qui a été rénovée avec plus de  M€ de travaux.

D’autres constats, dans la gestion de Jérôme Viaud, vous rendent perplexe...

Oui. Il n’a pas nommé d’adjoint à la culture, ce qui sous-entend qu’il n’en est pas fervent. Il a aussi attendu un an pour désigner un adjoint au Plan-de-Grasse, créant des frustratio­ns parmi mes collègues. Et il n’y a pas eu non plus de remplaceme­nt, par un adjoint de plein exercice, du poste des finances. À mon avis, Jérôme Viaud souhaite exercer le contrôle en solitaire. Mais je salue tout de même sa réactivité : après les trois derniers départs enregistré­s par sa majorité, il a très rapidement nommé des élus aux postes vacants.

Quel est aujourd’hui votre relationne­l avec lui ?

Il n’y en a aucun. Je l’ai revu à une assemblée du club de tir et on s’est dit bonjour de loin. Et il m’a supprimé de ses amis sur Facebook.

La majorité a enregistré six départs, dont le vôtre, depuis . Selon vous, quelle en est la cause ?

Il y a plusieurs éléments. D’abord, Viaud n’a pas

‘‘ confiance en lui et ne prend pas les décisions dans des délais corrects. Ensuite, il ne souhaite pas s’entourer des bonnes personnes. Un exemple : la ville de Grasse compte   employés mais fonctionne sans DGS depuis deux ans. Par contre, les effectifs du cabinet ont explosé avec des gens qui ne sont même pas de Grasse. Le maire a pourtant reçu  candidats au poste de DGS il y a quelques mois. Il a réalisé tous les entretiens en trois heures. Je suis enseignant et je me demande comment il a pu évaluer tous ces gens en si peu de temps. Mon sentiment, c’est qu’il n’a pas envie d’avoir un « Jérôme Viaud bis » à ses côtés pour éviter de le retrouver contre lui en . Quant à la ligne politique qu’il défend en se positionna­nt pour Laurent Wauquiez et Eric Ciotti, elle est liée à son poste de viceprésid­ent au Départemen­t, mais ne correspond ni à ses valeurs ni à ses conviction­s.

Désormais, vous vous considérez comme un opposant ?

Mes propos et mon positionne­ment pourraient le laisser croire. Mais je suis plutôt dans le schéma d’un citoyen grassois engagé qui aime sa ville, qui veut faire participer les habitants au débat, aux projets, et qui veut réfléchir à trouver des solutions pour l’avenir. Je pense à la circulatio­n : rien n’a été fait. Au stationnem­ent qui a été mal calibré. À l’attractivi­té commercial­e, aux transports en commun en centre-ville, à l’animation des hameaux, etc.

Quelle est votre intention ?

Poursuivre mon engagement pour la Ville, être à l’écoute des habitants et réfléchir à trouver des solutions aux problémati­ques communes.

Donc, vous serez candidat à la mairie en  ?

Il n’est pas exclu, dès lors que les conditions seront réunies pour rassembler, que je puisse présenter ce projet lors des prochaines municipale­s. Je ne serai pas l’opposant de Jérôme Viaud mais celui qui essaiera de proposer le meilleur programme aux Grassois.

Vous pourriez faire alliance avec l’opposition ?

Si l’on affine, je ne suis pas dans une perspectiv­e de rejoindre une candidatur­e portée par Paul Euzière mais j’accepterai­s de travailler avec lui au regard de sa légitimité, de sa connaissan­ce et de son expérience. Concernant Jean-Marc Degioanni (RBM, Ndlr) ses belles phrases n’apportent aucune solution concrète et réalisable. Il est plutôt orienté sur des sujets nationaux comme l’immigratio­n, ce qui n’est pas attendu dans les compétence­s d’un élu municipal. Il devrait plutôt s’orienter vers une candidatur­e de député ou de sénateur... si Jérôme Viaud ne le prend pas sur sa liste en . Stéphane Cassarini ? On peut rêver d’être maire de Grasse, mais il faudrait commencer par y habiter. Quant à vouloir gagner avec des stratégies d’alliance et de verrouilla­ge des candidats, les Grassois ne sont pas dupes. Enfin, Philippe-Emmanuel de Fontmichel a un nom. Mais je ne vois pas comment, en étant les trois quarts du temps à Paris, il peut proposer une cohérence dans son engagement. Ses interventi­ons en conseil n’en sont pas moins pertinente­s, et il ferait un excellent premier adjoint (sic) voire un bon président d’agglomérat­ion.

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