Nice-Matin (Cannes)

Tête-à-tête à la barbe de l’ennui

Jean-Michel Ribes propose une échappée belle au public avec Sulki et Sulku ont des conversati­ons intelligen­tes. Dès ce soir à Anthéa

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr

Parler pour ne rien dire ? Ce n’est pas leur genre. Gare à ceux qui s’arrêteraie­nt sur cette idée. Parce que si Sulki et Sulku ont des conversati­ons intelligen­tes , ce n’est pas pour rester dans une impasse et s’y complaire. Aucune limite, aucune frontière. Chantres de la pensée décomplexé­e, de la raison déraisonné­e, les deux oeuvres d’art que Romain Cottard et Damien Zanoly incarnent n’ont pas besoin de briser les murs érigés par les stéréotype­s. Ils jouent à saute-mouton par-dessus. Tout simplement. Une fantaisie tout droit sortie de l’esprit de Jean-Michel Ribes.

Qui sont Sulki et Sulku ?

Sulki et Sulku ‘‘ sont deux personnage­s de Musée haut musée bas .Ils ont quitté la pièce et se sont mis à parler tous les deux. Ils m’ont assuré que leurs conversati­ons étaient intelligen­tes. Je n’en suis pas sûr, avec eux on ne sait jamais. Parfois cela va au-delà : dans le magique, dans le fou.

De quoi discutent-ils ?

Je crois qu’ils discutent du monde d’une façon tout à fait différente de la plupart des gens.

C’est-à-dire ?

Ils vont prendre les choses à l’envers, parler du monde… Ils sont allergique­s à la réalité, ils sont des issues de secours à la morosité.

Ils montrent l’absurdité de notre quotidien ?

Ce ne sont pas des porteurs de message. Ils appréhende­nt le monde à l’envers pour nous montrer à quel point il peut se révéler ridicule à l’endroit.

Des combattant­s de l’ennui ?

Normalemen­t le théâtre, c’est fait pour ça. Sulki et Sulku ne se pendent pas au sérieux [sic.] Leur ennemi premier c’est le sérieux d’ailleurs, ce cholestéro­l de l’imaginaire…

Ont-ils une limite ?

Non. À partir du moment où l’on a une limite on ne peut pas penser librement. Ce sont des librespens­eurs, ils creusent des galeries vers le ciel.

Ilyaune musicalité, un rythme…

C’est vrai, c’est écrit comme une partition. Le rythme donne le sens.

Le texte est au centre…

C’est un texte qui est pour des acteurs. En ce sens qu’il ne s’agit pas de théâtre avec de la vidéo par exemple. Le

‘‘ théâtre c’est l’endroit où le mot s’incarne et devient chair… Cher.

Comment avez-vous dirigé les comédiens en ce sens?

Avec un vrai travail. Jusqu’à ce qu’on trouve le rythme, les ruptures…

Le choix des comédiens : une évidence ?

Oui, j’avais envie de quitter un peu ma famille d’acteurs alors j’ai fait des castings pour découvrir ces deux comédiens qui ne se connaissai­ent pas. Ce sont des acteurs virtuoses.

Intéressan­t pour créer un tandem aussi fort…

Quand on ne se connaît pas, que l’on n’a pas de réflexes, d’automatism­es dans la relation cela crée autre chose. Une énergie. Ils étaient dans la curiosité constante, dans le sursaut : ce qui apporte un piquant, une tension.

Avez-vous un processus d’écriture ?

Non. On me demande d’où me viennent mes idées. Je n’en sais rien. Je n’ouvre pas un journal en voyant un article sur les bébés congelés et en me disant : je vais écrire là-dessus. Je ne parle pas de la réalité. Et curieuseme­nt, ces incongruit­és parlent à beaucoup.

Que vous disent-ils ?

Qu’ils aiment les mots, l’écriture. Il y a un très bel article qui parlait de « l’esprit français » qui lie la potacherie, Racine, la truculence de Rabelais… Le public aime s’amuser sans avoir de répit. Et visiblemen­t il y a un public fidèle aux bêtises que j’écris…

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(DR)

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