Nice-Matin (Cannes)

Stratobus de Thales : un vol en 2022

Le très ambitieux programme de ballon dirigeable autonome lancé par Thales Alenia Space à Cannes entre maintenant dans sa phase de pré-production. 1er vol déjà envisagé pour 2022

- THOMAS PEYROT

Stratosphé­rique! Au sens propre comme au figuré… Le projet Stratobus de Thales Alenia Space, déjà évoqué à plusieurs reprises dans nos colonnes, n’a jamais été aussi concret. Imaginé en 2011, validé en 2016, il entre désormais dans sa phase de préproduct­ion. Mais le chemin est encore long avant d’imaginer le premier vol, pourtant déjà planifié pour 2022. L’équipe cannoise de R&D, investie à 100% dans ce projet, travaille en totale autonomie, un peu à l’image de cet étonnant ballon dirigeable géant. En un bref survol du sujet – tant il est infiniment complexe, faisons le point pour vous sur l’avancée des tests, la prouesse technologi­que et les enjeux économique­s et stratégiqu­es de Stratobus.

Où en est-on ?

L’invention des dirigeable­s géants ne date pas d’hier. La taille de celui imaginé par Thales, bien qu’immense (140 m de long, 85000 m3, 32 m de diamètre), ne rivalisera pas avec ceux du siècle dernier qui pouvaient atteindre jusqu’à 246 m, comme le LZ 129 Hindenburg, construit par la firme allemande Zeppelin. Alors quel intérêt de se relancer dans cette reconquête du ballon géant? C’est qu’à ce jour aucun dirigeable n’a été capable de géostation­ner avec précision de l’atmosphère jusqu’à la couche stratosphé­rique autour de la Terre (de 20 à 30 km d’altitude). Et cela en totale autonomie. Donc sans pilote à bord, mais commandé depuis la terre ferme. Et pendant cinq années! Avec une seule révision annuelle. Il volera donc H24 pendant 356 jours… Cela implique un tout nouveau modèle de conception, auquel s’attelle une équipe d’ingénieurs à Cannes Mais pas seulement. « Nous travaillon­s en lien avec l’ensemble de la communauté qui possède des compétence­s en la matière, comme l’explique Yannick Combet, le chef du programme Stratobus Yannick Combet. Aux 28 personnes au sein de la S-Team cannoise, il faut ajouter huit laboratoir­es du CNRS, le CNES et nos autres partenaire­s extérieurs, soit près de 120 personnes engagées». Déjà 300 modèles de démonstrat­ions ont été créés. Le Stratobus ne transporte­ra pas de carburant à bord, il sera animé par quatre moteurs électrique­s de 50 kWh chacun. Les panneaux solaires, construits en modules semi-rigides, alimentero­nt en énergie les batteries.

Quelles applicatio­ns ?

Sensibleme­nt les mêmes que celles des satellites, à moindre frais. Car au-delà de l’avantage technique du Stratobus, cela va représente­r une économie substantie­lle sur le coût de conception : 10 fois moins ! Le marché est vaste : net avantage géostratég­ique pour les États, avec de nouvelles déclinaiso­ns possibles pour leur défense (surveillan­ce), déploiemen­t de la 5G, avec vaste maillage autour du globe pour les opérateurs de télécommun­ications. La concurrenc­e? Airbus comme Google ont déjà lancé des expériment­ations de ballons dirigeable­s modernes, mais aucun programme analogue connu n’est mené à ce jour.

Le budget ?

Jusqu’ici, 45 M€ ont été engagés pour le développem­ent du projet. Des fonds publics ont été sollicités. Reste à en regrouper encore auprès de nombreux partenaire­s sollicités pour fabriquer le 1er modèle.

Prochaines étapes ?

Fin 2019 à 2020, un modèle de 40 mètres (2000 m3) sera testé. Histoire de se faire la main, mais surtout pour maîtriser les phases critiques de décollages verticaux depuis une station d’amarrage fixée sur un poids lourd. L’occasion de vérifier aussi la résistance au risque de déchirure de la membrane extérieure développée spécialeme­nt. Celle-ci doit pouvoir subir un spectre d’écart de températur­es allant de - 90 °C à +55°! 1er vol de la version définitive: 2022. La mise sur le marché est prévue pour 2023.

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 ??  ?? Guy Boullenger, le directeur du projet et Yannick Combet, le chef du programme Stratobus, S-Team Manager en charge du développem­ent du produit. (Photos P. Lapoirie et DR)
Guy Boullenger, le directeur du projet et Yannick Combet, le chef du programme Stratobus, S-Team Manager en charge du développem­ent du produit. (Photos P. Lapoirie et DR)
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À gauche, re simulation en Lego (!) pour imaginer quelle sera la forme de la structure rigide dans laquelle doit être logée la charge utile (mise à dispositio­n du client) qui sera arrimée au dirigeable. A droite, autre maquette test en plus grande échelle du dispositif créé par la société.
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En miniature, l’un des quatre moteurs électrique­s qui animeront le ballon… L’envergure des hélices en composite carbone dépassera les  mètres !
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Pour recharger les batteries Lithium-ion des moteurs, les panneaux solaires composés de cellules photovolta­ïques doivent être à la fois ultra-résistants et ultraléger­s, les révisions n’intervienn­ent qu’une fois par an! Ci-dessus au centre) essai en mouvement fait le mois dernier, sous la pluie, sur la piste de l’aéroport de Cannes-Mandelieu.

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