Nice-Matin (Cannes)

État d’urgence économique?

Commerçant­s, artisans, chefs d’entreprise, sans être anti-« gilets jaunes », ne cachent pas pour autant leur angoisse. Si le mouvement se poursuit, certains sont en danger…

- STÉPHANIE GASIGLIA sgasiglia@nicematin.fr

Il faut que Macron éteigne l’incendie. Vite, il n’a pas le choix. On va vers une catastroph­e économique. On ne peut pas trembler comme ça tous les jours en ouvrant nos commerces. Et pleurer en relevant la caisse le soir», se désespère Sophie, patronne d’une boutique du centre-ville de Nice. «La facture est déjà lourde pour les petits commerçant­s », confirme Philippe Desjardins. Le président de la Fédération du commerce niçois et de l’artisanat (FCNA) ne cache pas sa «vive inquiétude. On y est ! On faisait le dos rond jusqu’à présent, mais on y est… Encore un week-end comme ça et c’est la catastroph­e», souffle-t-il, en annonçant une réunion de crise, demain, des «vingt-deux présidents d’associatio­ns de commerçant­s niçois». «Pour nous, décembre, c’est deux mois de chiffre d’affaires et on en est déjà, en moyenne, entre 15 et 30 % de baisse en une quinzaine de jours», déplore-t-il. «On a des employés à payer! Et l’Urssaf, les impôts, la Sacem… Je suis très pessimiste car je me rends compte qu’il n’y a pas de retour politique qui nous ferait espérer une sortie de crise, appuie Philippe Desjardins. On fera les comptes à la fin, mais Noël, si ça continue, ne sera pas rose pour la profession». Sans compter, dit-il encore, les de livraison »… «difficulté­s

Ruptures de produits livraisons

Des problèmes d’approvisio­nnement qui touchent, aussi, les grandes surfaces. À Auchan à La Trinité, par exemple, certains rayons sont vides. Notamment les produits secs, comme le café, les pâtes, les huiles. Ou bien la parfumerie. «Les blocages d’entrepôts comme celui de Nîmes-Saint-Césaire, ont un impact sur nos livraisons. Notamment pour ce magasin-là. En revanche, il n’y a aucun problème pour les produits frais et les boissons, confirme un porteparol­e de l’hypermarch­é. On est en train de travailler sur des solutions d’approvisio­nnement pour remédier à ces ruptures.» Car, qui dit rayons vides, dit allées moins remplies. Et baisse du chiffre d’affaires. D’autres commerces sont impactés. Selon l’institut Quantaflow, les centres commerciau­x ont accusé, samedi, au niveau national, une baisse de fréquentat­ion moyenne de 14 %.

« Des signes inquiétant­s »

La chambre de commerce et d’industrie (CCI) Nice-Côte d’Azur ne souhaite pas « juger du bien fondé du mouvement des “gilets jaunes”. » Mais son président alerte «sur l’impact économique d’une situation qui serait dramatique dans le temps.» Les dégâts ne sont pas chiffrés avec exactitude, mais Jean-Pierre Savarino avance que «sans préjuger de l’enquête en cours auprès d’un panel d’entreprise­s, tous secteurs confondus, nous avons déjà constaté des signes inquiétant­s.» Selon la CCI, «la grande distributi­on enregistre une baisse de fréquentat­ion allant jusqu’à 50 % avec une baisse constante, y compris en semaine.» Jean-Pierre Savarino rejoint ainsi la FCNA: «Les commerces à proximité des lieux de manifestat­ions sont dramatique­ment impactés et on déplore des problèmes d’approvisio­nnement en produits frais, carburants qui laissent présager de difficulté­s accrues. » Et, là aussi, cette crainte pour la période des fêtes de fin d’année: «Elle est vitale pour de nombreux profession­nels.» La CCI a déjà anticipé l’accompagne­ment des entreprise­s avec la mise en place d’un guichet unique qui sera proposé aux services de l’État vendredi. Attention, ils ne sont pas anti-« gilets jaunes ». Ils ont juste décidé, entre eux – une douzaine de chefs d’entreprise des Alpes-Maritimes – de trouver des solutions. Pas miracles, mais peut-être lettre au Premier ministre. Le moratoire annoncé sur les taxes sur le carburant ? Ces chefs de PME sont prêts à monter à Paris pour en parler. Parmi eux : Cap assurance, le cabinet Merengone, la Biscuiteri­e alpine, Ortseel light, ou encore Kapitalium, Eirel immobilier et Max Estin… La plus petite PME a un seul salarié, la plus importante en compte vingt. Très représenta­tif des entreprise­s azuréennes.

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