Nice-Matin (Cannes)

Six mois de prison pour les casseurs d’Antibes

Virgile Poncet, 31 ans, voulait récupérer 30 000 euros. Son créancier est accusé de l’avoir tué en septembre 2013 et d’avoir abandonné son cadavre dans un ravin. Il est jugé depuis hier

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Virgile Poncet, 31 ans, un garçon sans histoire, a été abattu d’une balle dans la tête. Pendant des mois, il est resté introuvabl­e. Pas le moindre signe de vie depuis le 20 septembre 2013. Jusqu’à ce qu’un suspect, Mickaël Lakebal, quatorze mois plus tard, conduise les policiers dans un ravin, dans la forêt de Tourrettes, aux confins des Alpes-Maritimes et du Var. Les enquêteurs tombent alors sur des ossements épars. Mickaël Lakebal explique qu’il a été menacé dans son fourgon. Il aurait désarmé Virgile Poncet avant de le blesser mortelleme­nt. Il a ensuite déshabillé la victime, jeté le corps en pleine nature. Avec un étonnant sang-froid, il s’est ensuite débarrassé des vêtements et du téléphone du défunt L’artisan maçon a ensuite repris le cours normal de sa vie.

«Je n’ai rien prémédité »

Lundi matin, au premier jour de son procès, l’accusé présente à nouveau cette version du drame à la cour d’assises des Alpes-Maritimes. « C’est bien moi qui ai donné le coup mortel à Virgile Poncet mais je n’ai rien prémédité », affirme-t-il, d’une voix assurée. La chambre de l’instructio­n a une vision différente de l’affaire. Elle a souhaité que l’accusé soit jugé pour un meurtre avec préméditat­ion. Georges Pied, major de la brigade criminelle de la PJ de Nice, appelé à détailler les investigat­ions, privilégie lui aussi l’hypothèse d’un assassinat, crime mûrement réfléchi, préparé et méticuleus­ement exécuté.

Calme olympien en garde à vue

Les enquêteurs niçois, qui ont pris le relais de leurs collègues cannois, avaient établi une liste d’éléments troublants au sujet de ce paisible artisan, père de deux enfants, inconnu à ce jour de la justice. Mickaël Lakebal avait créé à Mougins une jeune entreprise de rénovation qui connaissai­t des difficulté­s. Virgile Poncet lui réclamait 30 000 euros après un projet commun d’achat d’appartemen­t. L’artisan avait signé de sa main deux chèques censés rembourser cette avance sur travaux mais ils étaient sans provisions… Les deux hommes avaient aussi un litige sur des travaux et s’étaient plusieurs fois téléphonés le 20 septembre 2013. Il faut ajouter une déambulati­on étrange du suspect ce même jour à Saint-Vallier, Escragnoll­es, Mons... La première audition de Mickaël Lakebal en garde à vue est décevante : « Pour moi, il avait un encéphalog­ramme plat. Un calme olympien. Cela m’interpella­it », souligne le policier. A la quatrième audition, le suspect craque. Il aurait agi sous pression de Virgile Poncet.

Une victime handicapée

Virgile Poncet, garçon décrit par ses amis comme «gentil», «jovial» ,« solaire», aurait-il été capable d’être violent pour récupérer son dû ? Depuis un grave accident en 2006, très affaibli, il vivait appuyé sur une canne, le dos déformé, une jambe détruite. Ses amis confirment qu’il fumait quasi quotidienn­ement de l’herbe de cannabis pour atténuer ses douleurs. Le président Didier Guissart rappelle que le jeune homme avait perçu plus de 700 000 euros de dommages et intérêts. Une rente annuelle de 16 000 euros et une allocation d’adulte handicapé lui étaient versées. Cette aisance financière avait permis à Virigle Poncet d’acheter deux appartemen­ts à rénover et d’aider des amis. Une générosité qui lui sera fatale. Claire, la petite amie de Virgile, se souvient « qu’il était très insatisfai­t des travaux entrepris » par Mickaël Lakebal dans l’un des appartemen­ts de Cannes et qu’il était «bien décidé à récupérer son argent». Le 20 septembre 2013, Mickaël Lakebal a donné rendez-vous à Virgile Poncet pour lui montrer, dit-il, au volant de sa camionnett­e Peugeot, quelques chantiers en cours, gages de vitalité de son entreprise. En réalité, la victime a été tuée dans un fourgon Renault rapidement revendu. L’acheteur du véhicule, qui a appris le drame par la presse, a contacté la PJ. Le Blue star, produit qui révèle les traces de sang malgré le nettoyage du véhicule, atteste de la présence de l’ADN de Virgile Poncet dans l’habitacle. L’arme du crime, que le suspect dit avoir jeté à la mer, est finalement découverte chez l’un des amis de Mickaël Lakebal. Une goutte de sang du défunt est isolée sur le pistolet 22 long rifle. Il reste quatre jours à l’accusé (et à son avocat Me Audrey Vazzana) pour démontrer qu’il n’avait pas l’intention de tuer Virgile Poncet. Parce que pour l’instant, les vents sont contraires.

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(DR) Virgile Poncet serait mort pour   euros, tué d’une balle dans la tête.

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