MACRON LÂCHE ENFIN DU LEST
Du relèvement du Smic à l’annulation de la hausse de CSG pour certains retraités, le chef de l’Etat a annoncé des mesures en faveur du pouvoir d’achat, ainsi qu’une consultation dans tout le pays
Augmentation de 100 € du Smic, annulation de la hausse de la CSG pour les retraités touchant moins de 2000 € par mois, défiscalisation des heures supplémentaires : Emmanuel Macron a annoncé des mesures fortes et concrètes hier soir. Suffisant pour apaiser la crise ? Rien n’est moins sûr...
Le regard contrit d’un gamin qui vient de faire une grosse bêtise. La voix éteinte. Une barbe de deux ou trois jours qui en rajoutait dans l’autoflagellation débraillée… Un instant, on a pu croire hier soir qu’Emmanuel Macron allait fondre en larmes et démissionner. Mais non ! Le Président a certes cédé sur de nombreux points, mais en s’efforçant d’habiller sa capitulation d’un volontarisme passablement amoché. Pour autant, à entendre leurs premières réactions, Emmanuel Macron est encore bien loin d’avoir convaincu les « gilets jaunes », remontés à l’envi. Le président de la République, pourtant, n’a pas lésiné sur les annonces. Un virage social pour le moins concret. Toute la journée, les professionnels de la glose médiatique l’avaient incité à parler simple et clair. Il s’y est
‘‘ astreint, à grand renfort de mesures tangibles, aisément quantifiables, qui viennent largement infléchir son cap libéral initial. Reconnaissant « une colère juste à bien des égards, qui peut s’avérer notre chance pour ouvrir des chemins jamais explorés», égrenant tel Zola les situations de ceux qui se lèvent tôt pour aller loin et bosser dur, de la veuve, de l’orphelin et des plus fragiles en général, le locataire de l’Elysée a d’abord pris « sa part d’une réponse insuffisamment rapide et forte ». «Il m’est arrivé de blesser. Si je me suis battu pour bousculer le système politique en place, les habitudes et les hypocrisies, c’est précisément parce que je crois que nous pouvons trouver une voie pour en sortir tous ensemble. Je veux décréter l’état d’urgence économique et social. »
■ Smic augmenté de cent euros, prime de Noël, heures sup’ défiscalisées…
En pratique, le chef de l’Etat a mis sur la table trois mesures précises et immédiates, qui entreront en vigueur dès 2019 « pour qu’on puisse vivre mieux de son travail»: l’augmentation de 100 € du Smic ; la restauration des heures supplémentaires sans impôt ni charges; les employeurs «qui le peuvent » incités à verser une prime de fin d’année à leurs salariés, sans impôt ni charges là encore. De plus, la hausse de la CSG sera annulée pour les retraités touchant moins de 2 000 € par mois. Le Président a également demandé au gouvernement de mettre en oeuvre des mesures en faveur des entreprises. Il a, en revanche, assumé de ne pas revenir sur la suppression de l’ISF, « qui vise à aider ceux qui investissent dans l’économie », invitant seulement le gouvernement et le Parlement à « aller plus loin dans la lutte contre l’évasion fiscale ». Après avoir beaucoup cédé aux revendications du pays, quoi qu’en pensent les « gilets jaunes » les plus intransigeants, Emmanuel Macron s’est essayé à montrer qu’il gardait malgré tout «le cap de la transformation du pays choisi il y a dix-huit mois ».
■ Un grand débat autour des maires
Il a ainsi appelé à la mise en oeuvre de « règles d’indemnisation du chômage plus claires et plus justes qui récompensent ceux qui travaillent ». Et, surtout, sonné l’ouverture d’un « grand débat démocratique » qui balaiera aussi bien les questions de représentation, d’équilibre de notre fiscalité, d’adaptation quotidienne au changement climatique, d’organisation de l’Etat et des services publics dans les territoires ou encore d’immigration. «Ce débat se déroulera au niveau national pour prendre le pouls vivant de notre pays, mais sera décliné partout sur le terrain avec les interlocuteurs naturels que sont les maires. Les bonnes solutions viendront du terrain », a concédé Jupiter automutilé. « Nous ne reprendrons pas le cours de nos vies sans que rien n’ait changé. Par le dialogue, nous réussirons. Mon seul combat, c’est pour vous, ma seule bataille, c’est pour la France», a-t-il conclu dans un convulsif sursaut de voix. Reste à financer cet « état d’urgence social », dont l’enveloppe globale va se chiffrer autour d’une dizaine de milliards, sans garantie de faire tomber une fièvre jaune visiblement tenace.
Une chance pour ouvrir des chemins jamais explorés” ‘‘ Les bonnes solutions viendront du terrain”