Un routier est mort en marge d’un barrage de «gilets jaunes» à La Seyne
Fatih avait 50 ans. Le
(1) samedi 1er décembre, à La Seyne (Var), alors que ce routier turc attendait d’embarquer sur un navire de fret de la compagnie UN Roro, il a fait un malaise cardiaque sur un parking du port de commerce de Brégaillon. D’abord réanimé et envoyé vers l’hôpital d’Aubagne par le « 15 », Fatih est finalement décédé au centre hospitalier. « Il était fragile du coeur, il aurait pu mourir en allant acheter son pain», nous confie
un employé de la zone portuaire. Sauf que cet aprèsmidi-là, Fatih ne se rendait pas à la boulangerie. Il était, comme 150 de ses camarades chauffeurs poids lourd, retenu à Brégaillon par des «gilets jaunes» déterminés à bloquer les accès à l’enceinte portuaire pour faire entendre leurs revendications. Quand il a fait son malaise, les personnels de la Chambre de commerce l’ont d’abord pris en charge avant d’appeler les secours.
« Une intervention difficile » des secours
Dans le rapport de police, il est ensuite fait mention d’une « intervention difficile » des pompiers et du Samu pour « entrer et sortir du site », sans d’autres précisions. D’ailleurs, les précisions, c’est un peu ce qu’il manque dans cette affaire, où il est difficile d’obtenir des informations (2). « Nous n’avons jamais empêché le personnel soignant d’intervenir, que cela soit à Brégaillon ou sur d’autres barrages d’ailleurs», balaie un «gilet jaune» longtemps mobilisé au rond-point de La Seyne. Est-ce que les minutes perdues par l’ambulance à contourner les barricades ont pu avoir des conséquences sur la santé du malheureux routier ? C’est ce que laissent à penser des témoignages sur les réseaux sociaux.
« Tout cela est connecté »
La préfecture, elle, assure que non, pas plus que le Service départemental d’incendie et de secours. Et aucune enquête judiciaire n’a d’ailleurs été ouverte. Mais au consulat général de Turquie, à Marseille, ce n’est pas la même chanson : « Des témoins nous ont effectivement raconté qu’à cause du blocage, le Samu est intervenu trop tard… » déplore-ton. Ces témoins, ce sont les autres routiers turcs, dont certains auraient été « choqués » que leur collègue ne parvienne pas, finalement, à être sauvé. Du côté de la chambre de commerce et d’industrie (CCI), on se refuse à faire un lien entre ce drame et les manifestations qui ont coupé du monde le terminal de fret pendant six jours. À notre connaissance, la famille de Fatih, originaire d’Anatolie, ne s’est pas manifestée. Le barrage, lui, a été levé mercredi dernier par les dockers. 1. Son prénom a été modifié. 2. Contacté, l’agent maritime représentant la compagnie turque UN Roro n’a pas souhaité répondre à nos questions.