Prime exceptionnelle : ce n’est pas encore Noël
Favorables sur le principe, les entreprises azuréennes sont très réservées sur leur capacité à verser la prime de fin d’année défiscalisée. Paradoxe : l’effet « gilets jaunes » y serait pour beaucoup
Total, Iliad, Kering, Publicis, LVMH, ou hier encore Michelin... Les grandes entreprises cotées au Cac 40 ont été les premières à annoncer, haut et fort, qu’elles verseraient une prime exceptionnelle de fin d’année à leurs salariés. Elles répondent ainsi à l’appel d’Emmanuel Macron : lundi soir, le président de la République a invité les employeurs « qui le peuvent » à accorder une prime exonérée d’impôts et de charges patronales. De bon augure. Las, sur la Côte d’Azur comme dans bien d’autres régions, ce n’est pas encore Noël pour tout le monde. Les acteurs économiques ne s’y risquent pas à des annonces tonitruantes. Et pour cause. « Pour les entreprises qui peuvent verser la prime, c’est banco ! Mais ce sont principalement les grosses, celles qui distribuent des dividendes. Ce n’est pas le tissu économique français », tempère Julien Riera, directeur général de l’UPE 06 (Union pour l’entreprise).
Un tissu de TPE-PME
Dans son immense majorité, le maillage économique des AlpesMaritimes est composé de PME et TPE. « Seront d’accord les entreprises qui ont les moyens de le faire. Cela fait partie d’une dynamique », insiste Julien Riera. Problème : la dynamique, en cette fin d’année, s’annonce plombée par les actions des « gilets jaunes ». « Beaucoup de secteurs d’activité ont été impactés. Des entreprises déjà en difficulté n’avaient pas besoin de ça... » Denis Cippolini, président de l’UMIH 06 (union des métiers et des industries de l’hôtellerie), confirme. Les blocages, conjugués au préjudice d’image, auraient d’ores et déjà affecté de 5 à 15 % le chiffre d’affaires du secteur. « Nous ne pouvons qu’être favorables à une prime, dans la mesure où nos entreprises le peuvent. Mais pour l’instant, personne n’a parlé de l’appliquer. Il est un peu tôt pour se prononcer. La vraie problématique, c’est l’issue de ce mois de décembre... »
Mise en oeuvre floue
Autre obstacle à franchir : la mise en oeuvre concrète de la mesure. Exercice délicat, selon Julien Riera. « Donner à certains salariés et pas à d’autres, ce n’est pas évident. Et puis, est-ce que la défiscalisation porte sur 1000 euros ? Plus, moins ? Il reste beaucoup de flou... » Les salariés azuréens devront donc patienter un peu, pour savoir si le père Noël sera plutôt d’humeur prime ou déprime. Jean-Charles, trentenaire niçois, est pour sa part fixé. Ce fonctionnaire nous fait remarquer qu’ «il n’y a qu’une catégorie d’employeurs dont on parle peu, et le comble, c’est que l’un d’entre eux est l’instigateur de cette prime : aucune annonce concernant les agents de l’État et des collectivités territoriales. » Entre gel du point d’indice et rabot sur la dépense publique, Jean-Charles s’attend à ce que les fonctionnaires « paient la note de ce qu’auront obtenu les “gilets jaunes” » .Etdeconclure, amer : « Nous sommes les grands oubliés de ce conflit. »