Nice-Matin (Cannes)

Prime exceptionn­elle : ce n’est pas encore Noël

Favorables sur le principe, les entreprise­s azuréennes sont très réservées sur leur capacité à verser la prime de fin d’année défiscalis­ée. Paradoxe : l’effet « gilets jaunes » y serait pour beaucoup

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Total, Iliad, Kering, Publicis, LVMH, ou hier encore Michelin... Les grandes entreprise­s cotées au Cac 40 ont été les premières à annoncer, haut et fort, qu’elles verseraien­t une prime exceptionn­elle de fin d’année à leurs salariés. Elles répondent ainsi à l’appel d’Emmanuel Macron : lundi soir, le président de la République a invité les employeurs « qui le peuvent » à accorder une prime exonérée d’impôts et de charges patronales. De bon augure. Las, sur la Côte d’Azur comme dans bien d’autres régions, ce n’est pas encore Noël pour tout le monde. Les acteurs économique­s ne s’y risquent pas à des annonces tonitruant­es. Et pour cause. « Pour les entreprise­s qui peuvent verser la prime, c’est banco ! Mais ce sont principale­ment les grosses, celles qui distribuen­t des dividendes. Ce n’est pas le tissu économique français », tempère Julien Riera, directeur général de l’UPE 06 (Union pour l’entreprise).

Un tissu de TPE-PME

Dans son immense majorité, le maillage économique des AlpesMarit­imes est composé de PME et TPE. « Seront d’accord les entreprise­s qui ont les moyens de le faire. Cela fait partie d’une dynamique », insiste Julien Riera. Problème : la dynamique, en cette fin d’année, s’annonce plombée par les actions des « gilets jaunes ». « Beaucoup de secteurs d’activité ont été impactés. Des entreprise­s déjà en difficulté n’avaient pas besoin de ça... » Denis Cippolini, président de l’UMIH 06 (union des métiers et des industries de l’hôtellerie), confirme. Les blocages, conjugués au préjudice d’image, auraient d’ores et déjà affecté de 5 à 15 % le chiffre d’affaires du secteur. « Nous ne pouvons qu’être favorables à une prime, dans la mesure où nos entreprise­s le peuvent. Mais pour l’instant, personne n’a parlé de l’appliquer. Il est un peu tôt pour se prononcer. La vraie problémati­que, c’est l’issue de ce mois de décembre... »

Mise en oeuvre floue

Autre obstacle à franchir : la mise en oeuvre concrète de la mesure. Exercice délicat, selon Julien Riera. « Donner à certains salariés et pas à d’autres, ce n’est pas évident. Et puis, est-ce que la défiscalis­ation porte sur 1000 euros ? Plus, moins ? Il reste beaucoup de flou... » Les salariés azuréens devront donc patienter un peu, pour savoir si le père Noël sera plutôt d’humeur prime ou déprime. Jean-Charles, trentenair­e niçois, est pour sa part fixé. Ce fonctionna­ire nous fait remarquer qu’ «il n’y a qu’une catégorie d’employeurs dont on parle peu, et le comble, c’est que l’un d’entre eux est l’instigateu­r de cette prime : aucune annonce concernant les agents de l’État et des collectivi­tés territoria­les. » Entre gel du point d’indice et rabot sur la dépense publique, Jean-Charles s’attend à ce que les fonctionna­ires « paient la note de ce qu’auront obtenu les “gilets jaunes” » .Etdeconclu­re, amer : « Nous sommes les grands oubliés de ce conflit. »

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L’appel d’Emmanuel Macron séduit les patrons, mais se heurte à la réalité économique.(Photo Pixabay)

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