Nice-Matin (Cannes)

« Certains commerçant­s sont très préoccupés »

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Aider les entreprise­s en difficulté à « passer le cap ». Tel est le but poursuivi par la chambre de commerce et d’industrie Nice Côte d’Azur, en lançant lundi dernier une « cellule impact “gilets jaunes” ». Sa récente enquête est édifiante : 78 % des commerçant­s déplorent une baisse de leur chiffre d’affaires supérieure à 10 %, voire de moitié pour 15 % d’entre eux. Au centre de cette cellule de crise : Marjorie Bourse, conseiller entreprise, spécialisé­e dans l’accompagne­ment des entreprise­s en difficulté. Elle livre son diagnostic et ses conseils.

■ Nouvelle cellule de crise

« La CCI a créé l’accompagne­ment des entreprise­s en difficulté en 2011. Plusieurs cellules ont ensuite été créées, au moment des intempérie­s de 2015, de l’attentat de Nice en 2016, ou de la mini-tempête du 29 octobre dernier. Malheureus­ement, on a l’habitude de mettre en place ce guichet unique... Pour cette nouvelle cellule, nous avons sollicité nos partenaire­s : l’Urssaf, la Sécurité sociale des indépendan­ts, la DDFIP, la Direccte, le Comité local des banques et la Banque de France, en partenaria­t avec la Chambre des métiers. Ainsi, tous les acteurs sont autour de la table. »

Divers secteurs touchés

« La CCI a réalisé une enquête auprès de 380 entreprise­s qui nous ont fait part d’une baisse de chiffre d’affaires et d’une situation compliquée en fin d’année. Une période où leur chiffre d’affaires est habituelle­ment important. Prêt-à-porter, restaurati­on, coiffeurs... Il s’agit essentiell­ement de TPE [très petites entreprise­s] .Les plus touchés sont le commerce de proximité, le commerce de bouche et les petits commerces. Cela concerne les centres-villes de Nice, de Cannes ou d’Antibes, le secteur antibois [autour du rond-point occupé] et les zones commercial­es.

Un constat inquiétant

« Cela va être compliqué de rattraper le retard. Cette période permet de constituer de la trésorerie pour anticiper les mois un peu creux (janvier, février, mars). S’ils ne l’ont pas fait, ces mois-là vont être compliqués à passer... Des traiteurs constatent des carnets de commande un peu vides pour cette période. C’est très problémati­que, aussi, pour les magasins de jouets ou de décoration. Ces commerçant­s sont très préoccupés. Ils attendent que le 25 et le 31 décembre soient passés pour mesurer l’ampleur des dégâts sur leur chiffre d’affaires... »

Une procédure simple

« Les entreprise­s ont la possibilit­é de télécharge­r le kit [sur www.coteazur.cci.fr] ou de joindre notre centre contacts clients. Ensuite, je les recontacte dans les 48 heures pour faire le point sur la situation de l’entreprise, et voir s’il y a besoin d’un examen plus approfondi. »

■ Échelonnem­ent, chômage partiel...

« Beaucoup demandent un échelonnem­ent des cotisation­s Urssaf, des cotisation­s foncières, de l’acompte sur l’impôt sur les sociétés... Les autres acteurs économique­s sont très à l’écoute, ils font le nécessaire pour octroyer des délais de paiement. On peut aussi mettre en place de l’activité partielle [ndlr : équivalent du chômage technique] pour des entreprise­s dont l’activité est en baisse, qui doivent fermer faute d’avoir été approvisio­nnées ou parce que les salariés n’ont pas pu y accéder. »

Entreprise­s en danger

« Certaines entreprise­s pourraient effectivem­ent être menacées. D’où le besoin de vérifier s’il faut aller plus loin, avec par exemple une procédure de conciliati­on. L’entreprise en fait la demande au tribunal de commerce. Un administra­teur prend le relais pour définir, avec l’employeur, avec quels créanciers il souhaite négocier les délais. Cette procédure dure quatre mois. Elle a l’avantage d’être confidenti­elle. »

Un fonds d’urgence

« Le conseil régional a annoncé débloquer un fonds de soutien de deux millions d’euros en Paca. Ils seront dispatchés entre les commerçant­s et artisans. Mais nous n’avons pas encore les critères d’attributio­n. »

Soutien psychologi­que

« Si la situation de l’entreprise est plus compliquée, nous renvoyons l’entreprise vers le centre d’informatio­n et de la prévention (CIP). Son dirigeant est reçu de manière confidenti­elle par un avocat, un expertcomp­table, un ancien juge et les chambres consulaire­s. Nous nous appuyons aussi sur l’associatio­n Apesa 06, qui accompagne les dirigeants en souffrance aiguë pour les aider à passer le cap, avec un psychologu­e. »

Se signaler sans tarder

« Au-delà de la problémati­que “gilets jaunes”, le chef d’entreprise ne doit pas rester seul face à ses difficulté­s. Qu’il n’hésite pas à en parler, à se renseigner dès les premiers signes de difficulté ! Plus tôt il vient, plus on peut mettre en place des procédures faciles à mettre en oeuvre, sans aller jusqu’au redresseme­nt judiciaire. »

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(Photo C.C.) Marjorie Bourse, conseiller entreprise, coordonne la « cellule impact gilets jaunes » créée par la CCI Nice Côte d’Azur.

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