Le cavalier seul
Patrick Rambaud poursuit ses chroniques du règne de nos souverains. Après Nicolas
Le Teigneux et François Le Petit, le voici aux basques d’Emmanuel Le Magnifique.
Héros stendhalien, forcément, « le Prince était un adolescent d’autrefois », émancipé bien avant l’heure des goûts des galopins de son âge. A la façon Grand Siècle patinée de facétie qu’il manie en virtuose, l’alacrité féroce pour flamberge, le lauréat du Goncourt (La Bataille) triture sans égards la jeunesse et la conquête du pouvoir d’Emmanuel Macron. Dans un style impayable, l’ambitieux est pourfendu sans égards. En langage contemporain, cela donne ceci, dans une interview à L’Obs : « Macron possède comme les Jésuites ce goût de séduire, de dire aux gens ce qu’ils veulent entendre et de maquiller la fausseté par des grands discours. » Comme quoi, les réseaux sociaux n’ont pas le monopole de la cruauté. La préciosité pastichée de Rambaud fait plus que tous les égosillements du moment pour régler leur compte aux faux-semblants du pouvoir.
Et ce n’est pas fini. Comme pour Sarkozy, l’écrivain nous promet des suites. Car il l’avoue en conclusion, la solitude de Macron l’a un peu laissé sur sa faim.
« Comme pendant son enfance, il n’avait pas d’amis, seulement une poignée de fidèles, un troupeau de courtisans et une armée qu’il épuisait. » Heureusement pour Rambaud, les tempêtes ont fini par arriver. L’opus suivant, Le Temps des orages ,lui permettra, pense-t-il, d’épingler de nouvelles têtes.
« Hélas, pendant sa première année de règne, le Prince fut seul visible, on ne put rire des courbettes de ses courtisans. » Ce fut peut-être son plus grand malheur.
Emmanuel Le Magnifique, Grasset, 197 pages, 18 euros.