Nice-Matin (Cannes)

L’ébéniste, véritable mémoire du Grand Pont

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Tout au bout de l’impasse sans issue du Grand Pont (ex-impasse du Camp Long), à l’aplomb de l’escalier métallique qui mène au tablier de l’ouvrage en pierre, l’enseigne d’ébénisteri­e était la première, en 1972. Et elle demeure la seule véritablem­ent en activité sous les arches… Remontons le temps avec Claude Pozzo, le dynamique octogénair­e qui a fondé cette entreprise et l’a gérée pendant presque 47 ans ! Avant de céder son affaire. « Au départ, je me suis installé ici à mon compte, parce que je travaillai­s avec 22 autres employés chez un ébéniste cannois qui avait fait faillite. Mon exfemme qui travaillai­t au tribunal de commerce. Et l’un des syndics avec lesquels elle était en contact savait que je cherchais un atelier. Il m’a donné les clefs pour voir ce que je pouvais faire de ce local… Je lui ai immédiatem­ent rendu le trousseau tellement c’était horrible ! » [rires]. C’est vrai qu’il y avait de beaux volumes, 120 m2 sous voûtes, mais sans eau ni électricit­é, avec de la terre battue au sol… Cela ne l’a pas empêché, finalement, de développer son activité en créant « des meubles de type provençal, puis moderne mais uniquement en massif, des bois nobles : noyer, merisier, châtaigner et acajou avec mes trois ouvriers ».

Mûrisserie de bananes ! Puis le retraité, qui a quitté le Mouré Rouge pour s’installer dans la jolie maison juste en face nous parle de ses voisins : « Sous d’autres arches, des mûrisseurs de fruit déposaient ici dans ces caves des régimes entiers de bananes vertes, achetés sur les docks de Marseille et arrivés d’Afrique par bateau. Puis ils les vendaient ensuite sur les marchés locaux. » Quelques mois plus tard, la société GarraudFra­nchitti posait à son tour ses conduites et ses ballons sous les arches adjacentes… Un voisin de longue date qui s’est forgé une réputation en proposant ses services à la Ville de Cannes, mais surtout dans des palaces cannois tels que le Martinez ou le Radisson, avant de quitter les lieux pour se rapprocher des grands groupes de parfumerie grassois (Robertet, Firmenich, Charabot, etc.) avec lesquels il travaille en étroite collaborat­ion. Claude a ainsi vu se construire, un à un, les immeubles autour de lui.

Mais avant ça, avant l’arrivée Claude et des autres artisans, peu le savent, « les chars du carnaval — car le carnaval nous a été volé par les Niçois ! s’insurge a posteriori l’ébéniste né à Cannes — étaient entreposés ici, sous ce pont ! »

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