Nice-Matin (Cannes)

Chat Sauvage au Chat Carti

Cofondateu­r et guitariste du mythique groupe de rock des 60’s, Jean-Claude Roboly apparaît dans la série Mousketal, tournée dans la vieille ville. Souvenirs...

- RECUEILLI PAR P.F.

Ah, les années 60... JFK, le Vietnam, Woodstock. La minijupe, les yé-yé, le western spaghetti. L’essor du rock’n’roll. En pleine Beatlemani­a, en France, aussi, les têtes d’affiche s’arrachent les faveurs du public. Johnny, Les Chaussette­s Noires d’Eddy Mitchell et... Les Chats Sauvages. De 1961 à 1965, le groupe niçois, mené – au départ – par Dick Rivers, va enchaîner les tubes [Twist à Saint-Tropez, Est ce que tu le sais...] avant la séparation. Eh bien, figurez-vous que l’on a retrouvé l’un des « wildcats » au Chat Carti de Grasse. Cofondateu­r et guitariste, Jean-Claude Roboly – alias « John Rob » – est, en effet, venu faire une apparition dans la mini-série de promotion de la taverne, Moustekal. L’occasion de revenir sur ces années folles et celles qui ont suivi, avec une étonnante reconversi­on Outre-Atlantique.

Comment vous retrouvez-vous dans l’aventure Mousketal ?

J’ai rencontré Benoit [Lamouche, le réalisateu­r] il y a quelques années lors d’un projet de film sur la Siagne. J’avais pensé à chercher des fonds côté Amérique et faire venir le réalisateu­r Jeannot Szwarc [Les Dents de la Mer II, Supergirl...] sur le projet. Finalement, ça ne s’est pas fait. Puis Benoit m’a rappelé pour évoquer un documentai­re sur Les Chats Sauvages. Il n’y en a jamais eu avant... De fil en aiguille, il m’a parlé de Mousketal et me voilà...

Paraît-il que vous avez été Grassois, le temps d’un été...

Oui, j’avais - ans et mon oncle était le gérant du cinéma. Il me gardait, ma mère travaillan­t à Nice. Alors, je passais mes après-midi à regarder les mêmes films en boucle. Lesquels ? Oh, je ne me souviens plus... Mais mon amour de l’image et du cinéma est peutêtre né à ce moment-là.

Comment avez-vous basculé vers cet univers ?

J’ai fait le figurant à La Victorine sur des films d’Allégret, Borderie, Ustinov... Des petits rôles, mais j’apprenais le métier en regardant ces gens. Puis, grâce à la notoriété des Chats, j’ai eu l’honneur, en , de rencontrer Grace Kelly à Monaco, où s’achevait le tournage d’un James Bond. Elle m’a présenté le producteur anglais Euan Lloyd. Il m’a dit : “Je vous prends sur le prochain James Bond. Rendez-vous dans un an à Miami.” Moi, je voulais absolument aller aux ÉtatsUnis. C’était la fin des Chats Sauvages : j’ai vendu ma guitare, mon ampli et je suis parti, bien avant la date du tournage.

Alors, ce James Bond ?

Je ne me suis jamais présenté à Miami... Comme j’étais parti avant, il fallait bien manger et ce n’était pas facile de trouver quelque chose aux USA. Alors, je suis allé au Canada. Je me suis marié, et, à l’arrivée, j’ai produit et/ou réalisé plus de  films pour la télévision, de  à .

Qu’est ce qui vous a poussé à revenir en France ?

En -, j’avais un énorme projet : j’avais acquis, avec l’auteur Henri Vernes, les droits de la BD Bob Morane pour une adaptation TV. On devait faire six téléfilms de  h . TF devait produire. J’ai rencontré Patrick Le Lay, viceprésid­ent de la chaîne. Il m’a dit : “Je ne ferai pas ça : j’aime pas Bob Morane.” Je me suis tourné vers Antenne , ça n’a pas abouti. On a, alors, tenté une adaptation au cinéma.

Résultat ?

On a contacté Gaumont et, pour le scénario, Christophe Gans [Le Pacte des Loups, Crying Freeman...]. On a commencé à travailler sur le casting et j’ai approché l’agent d’Arnold Schwarzene­gger. Mais on avait besoin d’une caution auprès de Gaumont et, pour faire court, ça ne s’est pas fait. Une compagnie belge a racheté les droits et en a fait un truc pas terrible. Un épisode de ’a été diffusé et c’est tout... C’est dommage, car James Bond est beaucoup inspiré de Bob Morane. Voilà, après la perte des droits, je suis resté en France. J’ai fait quelques trucs sur Paris puis je suis rentré à Nice.

Que vous reste-t-il de l’époque Chats Sauvages ?

Fabuleux, une époque merveilleu­se. Les années , c’était la nouvelle vie de la France, la liberté. En moto, en mob’, on roulait à , sans casque [rires]. Les cinq années qu’ont duré les Chats Sauvages, c’était extraordin­aire. On a fait plus d’un million de kilomètres en voiture, dans toute l’Europe. On a même vendu en Chine ! On l’a vu sur le relevé de royalties. Bon, deux ou trois disques, mais quand même [rires]. C’était super, même si on a raté le coche...

C’est-à-dire ?

On ne le savait pas mais certains de nos disques étaient joués dans les juke-box des « diners » américains. Un jour, un avocat nous écrit chez Pathé Marconi, pour avoir plus d’infos. Puis il a renvoyé un courrier : “J’engage les Chats Sauvages. Je leur ai dégoté le Ed Sullivan Show”, qui était le summum à l’époque. J’ai même rencontré Ed Sullivan, qui m’a présenté Bobby Darin [chanteur américain populaire dans les ’s’s]. J’étais fier comme pas deux, je suis rentré tout heureux en France. Mais, au final, Marconi ne nous a jamais libérés. C’était “Les Chats Sauvages sont français, ils restent français.” On est donc pas partis et on a coulé pas longtemps après. J’ai été dégoûté par cet épisode. C’est là qu’est née mon envie de partir aux États-Unis...

 ?? (Photo P. F.) ?? Jean-Claude Roboly, ex « John Rob » (au centre) entouré de l’équipe de tournage à la taverne du Chat Carti.
(Photo P. F.) Jean-Claude Roboly, ex « John Rob » (au centre) entouré de l’équipe de tournage à la taverne du Chat Carti.

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