Assurance chômage : une réforme critiquée
Dégressivité, bonus-malus pour les contrats courts, conditions d’ouverture des droits durcies... Les partenaires sociaux vent debout
Le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud ont dévoilé, hier, lors d’une conférence de presse la réforme de l’assurance chômage. Principale mesure du plan du gouvernement, le durcissement des conditions d’accès et de rechargement des droits au chômage. Il faudra avoir travaillé six mois sur les vingt-quatre derniers mois au lieu de quatre mois sur vingt-huit pour accéder à l’assurance chômage à partir du 1 novembre. er Les conditions de « rechargement » des droits seront également durcies : il faudra avoir travaillé six mois au lieu d’un pendant sa période de chômage pour voir son indemnisation prolongée d’autant.
Dégressivité des droits
Le gouvernement a également confirmé la dégressivité pour les droits les plus élevés. Les demandeurs d’emploi qui avaient un revenu de travail supérieur à 4 500 € brut par mois verront leur indemnisation réduite de 30 % à partir du septième mois. Cette mesure, qui ne concerne pas les chômeurs de plus de 57 ans, sera appliquée jusqu’à un plancher d’indemnisation de 2 261 € net.
Bonus-malus sur les contrats courts
Un système de bonus-malus sur les contrats courts, contesté par le patronat, va être mis en oeuvre le 1er janvier 2020 dans sept secteurs de l’économie, tandis qu’une taxe de 10 € par CDD d’usage va être créée pour ce contrat spécifique, a annoncé le gouvernement. L’exécutif, qui avait annoncé la semaine dernière que cinq à dix secteurs seraient concernés, en a finalement retenu sept, dont l’hébergement et la restauration, l’agroalimentaire, l’eau et les déchets, la plasturgie ou encore le bois et papier. Deux gros secteurs utilisant beaucoup de CDD échappent à la mesure : le bâtiment et la santé.
Les démissionnaires seront indemnisés
Édouard Philippe et Muriel Pénicaud ont également annoncé l’ouverture de l’assurance chômage aux salariés démissionnaires. Sous certaines conditions, ils auront le même niveau d’indemnisation que les autres demandeurs d’emploi. Pour toucher le chômage, les démissionnaires devront avoir au moins cinq ans d’ancienneté dans l’entreprise et avoir un projet professionnel.
Plus de conseillers à Pôle emploi
Plus de mille nouveaux conseillers Pôle emploi seront recrutés pour mettre en place de nouveaux services d’accompagnement, mettant ainsi fin à trois années de diminution des effectifs de l’organisme public. À partir du 1er janvier, les conseillers de Pôle emploi vont, par ailleurs, proposer deux demi-journées d’accompagnement intensif aux demandeurs d’emploi qui le souhaitent dans les quatre premières semaines qui suivent leur inscription à l’organisme de recherche d’emploi.
La CFDT « en colère »
Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, s’est dit « en colère » contre la réforme « profondément injuste » de l’assurance chômage. Une réforme « archi perdante » pour l’ensemble des demandeurs d’emploi et qui ne « responsabilise qu’en partie» les entreprises «qui usent et abusent de la précarité »,a-t-il dénoncé. Cette réforme « inefficace » et « inique » représente un « durcissement majeur des conditions d’indemnisation des privés d’emploi », a de son côté réagi Catherine Perret, dirigeante de la CGT.
Le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a, lui, regretté la mise en place du bonus-malus sur les contrats courts, CDD et missions d’intérim, pour les entreprises de plus de 11 salariés. «Sans nier qu’il y a dans certains cas des abus, la réalité, c’est que ce sera soit inefficace, soit au pire ça découragera l’emploi, a-t-il dit à sa sortie de Matignon. C’est une vision punitive de l’économie qui aura très très peu d’effet. » En revanche, il a salué « le renforcement de Pôle emploi » et jugé que le « volet indemnisation » delaréforme va « dans le bon sens ».
Objectif : , milliards d’économies
La réforme de l’assurance chômage vise à réduire de 150 000 à 250 000 le nombre de demandeurs d’emploi et à atteindre 3,4 milliards d’euros d’économies sur la période 20192021. Les différentes mesures de la réforme entreront en vigueur progressivement, avec un premier train le 1er novembre (ouverture de l’assurance chômage aux démissionnaires et indépendants, durcissement des règles d’éligibilité, dégressivité à partir du 7e mois pour les salaires supérieurs à 4 500 € brut). Au 1er janvier 2020 suivront le bonus-malus sur les contrats courts dans sept secteurs ainsi que la taxation de 10 € pour chaque CDD d’usage signé.