Nice-Matin (Cannes)

Le chef fait le plein des sens

Passionné d’automobile - et notamment de F1 -, Philippe Da Silva suivra avec attention et affection les performanc­es de son ami Romain Grosjean au Castellet. Mais seulement une fois le service fini...

- Textes : Raphaël Coiffier

Sa vie, Philippe Da Silva la mène à cent à l’heure. Levé au chant du coq endormi. Couché à la pâle lumière d’un croissant de lune. Le chef étoilé de l’Hostelleri­e des Gorges de Pennafort court après les secondes. En savoure chaque dixième... Lorsqu’il ne magnifie pas un carré d’agneau. Lorsqu’il ne sublime

‘‘ pas un ravioli au foie gras. Lorsqu’il n’envoûte pas les papilles, le globe-trotter du bon goût tombe le tablier. Range la toque et s’éclipse. Pour apprivoise­r des chevaux. Mécaniques...

Encore une fois, le temps est mis au défi de sa passion rugissante. Depuis belle lurette. Depuis cette époque où, minot, il allait avec les copains voir les phares du Monte-Carlo déchirer la nuit. En souliers de ville. Dans la neige !

Appétit automobile

« On se caillait », se souvient-il avec un zeste de nostalgie. Embrayant sur un autre rallye. Celui du Var. « Il passait dans mon village de Cogolin. J’avais 11 ans. On suivait les spéciales avec mon frère. Il y avait Darniche et tant d’autres... »

Philippe goûtait à la liberté. Premières parenthèse­s de l’adolescenc­e. Il aiguisait son appétit automobile. À l’oreille. « J’ai toujours aimé le bruit des moteurs. Même si maintenant en F1, ce n’est plus vraiment ça... » La F1, une soupape de plus à sa batterie. Animée avec son ami Romain Grosjean. « Je l’ai rencontré par le biais de Michael Jones. Le courant est tout de suite passé entre nous. C’est un fou de cuisine. Peut-être que ça aide... »

En deux coups de cuillère à pot, les deux hommes ont lié leurs sentiments. Le chef conseillan­t son apprenti au piano. Le pilote guidant son élève au volant...

« J’ai tourné en biplace au Castellet avec lui. Son adorable épouse, Marion, m’avait prévenu : “attention, c’est un malade, il veut t’impression­ner !” »

C’est dire si, en préambule, le Picasso des saveurs n’en menait pas large. Mais à l’instant de l’épilogue, son rêve avait pris corps. Prémices à de nouveaux tomes.

« Je n’ai pas eu peur. En fait, j’étais en confiance. Vous savez, pour moi, Romain est l’un des meilleurs pilotes de sa génération. Dommage qu’il n’ait pas la voiture... » La monture pour se mêler à la bagarre. Enfin ce qu’il en reste. « J’avoue que je prenais davantage mon pied avant. Il y avait plus de combat. Voire même de romantisme dans ce milieu. Mais il faut vivre avec son époque... »

Senna – sa référence –, Prost – qu’il admire – bien sûr Da Silva n’a rien oublié de cet épique duel. Pour autant, le passé ne lui revient pas sans cesse en bouche.

Il préfère voir pousser le présent. Avec, outre Grosjean, le chevalier de la Scuderia, Charles Leclerc. « Je suis convaincu qu’il a un grand avenir. Il est technique, rapide et a un volant chez Ferrari ! »

Premières émotions au Luc

Ce volant qui le démange dès que les fourneaux refroidiss­ent. « J’ai la chance de connaître du monde. D’être invité à des concentrat­ions ou à tester telle ou telle voiture. C’est génial. »

Dernier essai en date : la Bugatti Chiron. « Une merveille à 2 millions et demi d’euros. Au départ, tu ne fais pas le malin. Après, ce n’est que du bonheur... » Lamborghin­i, Porsche ont ainsi remplacé la Ford Capri de ses 20 ans. Ce coupé vecteur de ses premières émotions au Luc. De sa révélation. Et c’est encore sur le tracé du Luc qu’en solitaire il dompte la F1. Pas celle de Grosjean où, couché, il a peiné à atteindre les pédales et s’en amuse avec qui veut l’entendre. Non, une F1 louée pour une douzaine de tours où il tente de mettre en applicatio­n les directives de son champion d’ami. « J’essaye d’appliquer ses consignes, notamment sur le freinage. Mais je n’y arrive pas. En fait, j’ai un peu la trouille... »

Ce toqué n’utilise ainsi la puissance qu’en ligne droite. « En étant prudent », s’empresset-il de ponctuer. Pas question de brûler cette jouissance au sortir d’une courbe mal négociée.

La vitesse, il l’appréhende presque comme une nouvelle recette. En mélangeant la sagesse, l’expérience et l’instinct. Son cocktail de vie en somme. Généreux comme le bonhomme toujours prompt à faire le plein des sens.

Pour lui et, surtout, pour les autres.

D’ailleurs, le champagne est au frais des fois que Romain

Grosjean fasse sauter le bouchon...

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Photos : Frank Muller
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