Nice-Matin (Cannes)

Cancer et sexualité, si on en parlait ?

À la une Première étude scientifiq­ue mondiale à donner la parole à tous les malades, ComPaRe Baguette magique livre leurs propositio­ns pour une meilleure prise en charge

- NANCY CATTAN

Il faudrait que l’on nous écoute davantage. Que l’on tienne compte de notre expertise. Et surtout que l’on nous prenne au sérieux. » Trois pistes d’améliorati­on parmi les 150 déjà proposées par plus de 1 600 patients atteints de maladies chroniques, appelés à répondre à cette question simple : «Si vous aviez une baguette magique, que changeriez-vous dans votre prise en charge ? » « Environ 40 % de la population

(1) adulte en France, soit 20 millions de personnes, sont atteints d’une ou plusieurs maladies chroniques. Ces patients sont moins passifs. Ils refusent le paternalis­me médical, souhaitent être informés sur leur parcours de soins et tout ce qui concerne plus globalemen­t leur prise en charge. Ils disent : “Ma maladie chronique va impacter ma vie, c’est important que je prenne part aux décisions...” », résume le Dr Viet-Thi Tran, épidémiolo­giste clinique à l’Hôtel-Dieu AP-HP. Ce médecin a coordonné ComPaRe (Communauté de patients pour la recherche) Baguette magique, la première étude scientifiq­ue au monde à impliquer largement les patients dans la génération d'idées pour améliorer leur prise en charge. Et le moins que l’on puisse dire, alors que les premiers résultats de cette étude tombent, c’est que la communicat­ion entre soignant et soigné

gagnerait à être améliorée, à toutes les étapes de la prise en charge. En commençant par la consultati­on. « Parmi les 1 701 idées d’améliorati­on dans ce domaine, la plupart portaient sur la qualité des échanges entre médecins et patients, sur l’informatio­n des patients sur leur prise en charge, et sur l’adaptation du traitement du patient en fonction de ses préférence­s et du contexte », relève le Dr Viet-Thi Tran. Les propos d’une des participan­tes à l’étude, suivie pour un cancer du sein, illustrent parfaiteme­nt ces « revendicat­ions ». « Il n'est pas acceptable de devoir subir des décisions qui changent notre vie, sans avoir la main sur le peu de chose que nous pouvons choisir. Soigner une maladie c'est bien, mais si c'est pour laisser un patient non maître de sa vie... Je pense que certaines décisions servant à guérir un patient peuvent l'anéantir si ce n'est pas ce dernier qui les a prises ».

Coordonner, fluidifier

Autre sujet majeur de préoccupat­ion pour les malades chroniques : les difficulté­s d’orientatio­n dans le système de santé. « Je créerais une sorte de “chef d'orchestre’’ » qui évaluerait les besoins en soins du patient et l'orienterai­t au mieux, en lui évitant de se débattre dans certaines difficulté­s, alors que la survenue de sa pathologie l'a déjà rendu vulnérable », propose une patiente suivie pour sclérose en plaques. Ce rôle de chef d’orchestre, c’est celui qui est aujourd’hui confié au médecin traitant. Mais, « en pratique, il est souvent dépassé par la complexité de la maladie et de sa prise en charge. Quant au spécialist­e, il est difficilem­ent accessible...», argumente l’intéressée. Dernier grand axe d’améliorati­on du système de santé proposé par un très grand nombre de patients : une réduction du fardeau administra­tif. «Ils préconisen­t de faciliter les démarches d’accès aux soins, aux traitement­s et au remboursem­ent », résume le Dr Tran. Une patiente diabétique regrette par exemple « qu’il n’y ait pas plus de flexibilit­é au niveau des pharmacies. […] Partir en vacances plus d'un mois peut être compliqué : toutes les pharmacies refuseront de donner une avance. Vouloir avoir ne serait-ce qu'une petite “réserve” est perçu de manière très péjorative, or, c'est le fondement de toute indépendan­ce ! » L’indépendan­ce, un droit malmené par la maladie ellemême, qu’il nous appartient de favoriser. 1. l’objectif de ComPaRe est de rassembler à terme 100 000 patients partout en France pour accélérer la recherche sur les maladies chroniques. Rens sur : https://compare.aphp.fr.

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(Photo d’archive) Exit le paternalis­me médical, les « nouveaux » malades réclament de prendre part.

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