S’exercer avant d’exercer
Les étudiants de la faculté de médecine de Nice bénéficient des installations du centre de simulation médicale. Il leur permet de mettre en pratique leurs apprentissages
Rien de tel que la pratique pour venir conforter ses connaissances théoriques. C’est d’autant plus vrai pour les futurs professionnels de santé. Les étudiants de la faculté de médecine de Nice bénéficient des installations du centre de simulation médicale, ouvert en 2008. « L’originalité de ce centre est qu’il est essentiellement destiné aux étudiants et ce dès la 2e année et 3e année (ils sont encadrés par des tuteurs de 4e et 5e année). Ils y viennent pour s’entraîner au raisonnement clinique et, depuis cette année, pour les TP de physiologie. Les professionnels peuvent aussi s’exercer : radiologues, infirmiers de bloc, anesthésistes, sages-femmes, etc. », résume le Pr Jean-Paul Fournier, responsable de l’établissement. D’abord, ce dispositif permet de travailler sur la simulation procédurale. « Cela peut être très simple – comme s’entraîner à faire une injection intramusculaire – ou beaucoup plus complexe : on peut reproduire une intervention chirurgicale de A à Z, y compris en chirurgie robotique. » Il est également possible de réaliser un même geste mais avec des paramètres différents : par exemple une ponction lombaire sur un patient plus ou moins corpulent, avec un rachis plus ou moins souple, etc.
L’autre versant de la simulation, c’est le raisonnement : « on utilise des mannequins haute fidélité pour entraîner les étudiants à gérer une situation complexe, par exemple une douleur thoracique. Cela leur permet d’intégrer et d’appliquer les protocoles. Les enseignants établissent des scénarios qui sont ceux que les futurs médecins rencontreront plus tard dans l’environnement technique et technologique. Travailler le raisonnement, c’est fondamental. Les étudiants, par groupes, sont placés face à un patient qu’ils doivent prendre en charge. Ils peuvent donc
décider de demander des examens complémentaires afin de décider du traitement qu’ils vont prescrire. Cela permet aussi d’aborder la communication et l’éthique : ils doivent annoncer au malade le diagnostic. Cela non plus ne s’improvise pas », détaille le Pr Fournier.
Grâce à ce centre de simulation, les nouveaux internes n’arrivent pas vierges de toute pratique : ils auront pu s’exercer à réaliser des gestes techniques mais ils se seront aussi confrontés à des « patients » lors de ces jeux de rôles, auront eu l’occasion d’apprendre à s’adresser à un malade, à ses proches, à lui annoncer une mauvaise nouvelle, à lui expliquer son traitement, etc. « Ce qu’il se passe au centre de simulation médicale est confidentiel. Les étudiants se sentent donc en confiance : ils savent qu’ils peuvent commettre des erreurs. Justement : les erreurs sont bénéfiques à l’apprentissage. Nous avons constaté que ces mises en situation les font considérablement progresser. Ils améliorent leur raisonnement clinique, ce qui signifie que lorsqu’ils seront confrontés à un patient, ils vont mieux prescrire les examens complémentaires, mais aussi les traitements... On limite ainsi le risque de mauvais diagnostic, explique le Pr Fournier. Et les patients aussi peuvent y trouver un intérêt : ils se sentent davantage en confiance de savoir que l’interne qui les prend en charge a pu s’entraîner en amont. »
Apprendre à travailler ensemble
Paradoxalement, toutes les facultés de médecine ne sont pas équipées d’un centre de simulation ; et certains centres hospitaliers le sont. Ce dispositif est par ailleurs un bon outil pour aider les professionnels à collaborer entre eux. « Chacun suit son cursus universitaire. Sauf que dans les faits, les différents professionnels vont se côtoyer. Le centre de simulation permet de reproduire ce qu’il se passe dans une salle d’urgence ou au bloc opératoire : les chirurgiens travaillent avec les anesthésistes, les infirmiers, les sages-femmes, etc. Il faut qu’ils sachent comment coopérer, quelles sont les procédures à respecter pour les uns et les autres. Ce n’est pas la peine d’attendre qu’ils soient internes pour apprendre à travailler ensemble », rappelle le Pr Fournier. Le responsable du centre niçois souhaite que soit développé à l’avenir le programme de maîtrise des gestes techniques. D’autant qu’il a été montré que la formation sur simulateur a un impact qui dure dans le temps : la réalisation des gestes rend l’apprentissage plus efficace. Seule ombre – mais de taille – au tableau : les équipements coûtent cher et l’université n’a pas les budgets pour investir à hauteur de ce dont elle aurait besoin.
L’amélioration du raisonnement clinique et des prescriptions Pr Jean-Paul Fournier
Responsable du centre de simulation médicale