Les belles soirées venues du Brésil
Une des traditions de Jazz à Juan a longtemps été d’organiser une soirée de musique brésilienne. Tous les grands artistes de ce pays sont ainsi passés sur la scène de la Pinède-Gould. Y compris la légende brésilienne de la bossa-nova Joao Gilberto, décédée la 6 juillet dernier à l’âge de 88 ans. Il y a trente ans, le 21 juillet 1989, il était en effet sous les pins juanais avec Joao Bosco et Caetano Veloso. Je me souviens d’avoir assisté à ce concert, sans être un véritable fan de bossa-nova. Personnellement, la musique brésilienne se résume à Gilberto Gil et son fameux Palco. J’avais oublié que sans Joao, il n’y aurait probablement pas eu de succès pour Stan Getz. Sans Joao, il n’y aurait peut-être jamais eu non plus de bossa-nova.
Ce soir-là, trois génies de la musique étaient face à moi. Je n’en avais pas conscience, trop intéressé par un jazz beaucoup plus moderne et américain. J’ai su aussi que Joao Gilberto était un artiste imprévisible. Véritable icône au Brésil, il avait des exigences de star quand il se déplaçait, notamment à Juan. Un contrat draconien imposant des boissons gazeuses bien précises dans sa loge à la température « ni trop froide, ni pas assez fraîche », un durcisseur d’ongles, un coiffeur, une nourriture très particulière, un rasoir électrique de marque Philips à trois têtes… Beaucoup moins exigeant, mais tout aussi créatif, Gilberto Gil est venu à plusieurs reprises à Jazz à Juan. Y compris en ambassadeur de son pays, lorsqu’il était encore ministre de la Culture en 2007, Juan était alors sa seule date française. « Une coupure, des vacances », disait-il à l’époque. Il n’avait aucun caprice de star en coulisse. Juste des fruits secs dans sa loge. Un ministre abordable, et qui, au début des réseaux sociaux, lançait sur scène, à l’inverse d’un King Crimson : « Filmez-moi, photographiez-moi, enregistrez-moi ! Mais surtout diffusez ma musique ! »