Nice-Matin (Cannes)

Julie Villers : des conflits pour trois femmes en une

Avec Je buterais bien ma mère un dimanche, la comédienne poursuit son exploratio­n des liens mère-fille. Étincelles à découvrir au théâtre du Tribunal dès demain

- PROPOS RECUEILLIS PAR MARGOT DASQUE mdasque@nicematin.fr

Frappading­ues. Si les trois femmes, témoins de trois génération­s, qu’incarne sur scène Julie Villers s’avèrent loufoques, c’est avant tout parce qu’elles sont frappées. Par la vie. Par le destin. Par l’Histoire. Par les moeurs. Par la société. Par le coup du sort, aussi. Avec Je buterais bien ma mère un dimanche , la comédienne offre au public une exploratio­n à travers les liens mère-fille. Vaste sujet auquel elle ajoute toute sa créativité et son autodérisi­on du tonnerre. Un seul en scène qui fait des étincelles à partir de demain soir à samedi inclus sur la scène du théâtre Le Tribunal d’Antibes.

Quelle est la genèse de cette création ?

Dans les deux précédents spectacles, j’avais un rapport avec ma mère que je décrivais un rapport très tendu. On m’a dit que ça pourrait être très intéressan­t d’approfondi­r cette relation. C’est quelque chose qui nous inspire ce lien, je vois d’autres humoristes femmes écrire dessus.

Du vécu ?

Je n’aime pas forcément parler de mon expérience. Je voulais parler d’autre chose qui me touchait, trois génération­s de femmes qui ont traversé les périodes. Pour autant, toutes ont été abusées et violentées : que ce soit par ellesmêmes ou la société.

Des nanas au bord de la falaise ?

Absolument. Julie, le personnage principal, arrive en thérapie parce qu’elle redoute de devenir maman. Pourquoi ? Elle a comme l’impression d’en être incapable presque par hérédité. Comme si c’était une fatalité que les parents violents engendrent d’autres parents violents ou des enfants alcoolique­s. Parce qu’en grattant un peu, on comprend qu’elle a une mère très borderline. Et cela s’explique aussi par son propre vécu avec sa mère à elle…

Qu’avez-vous en commun avec Julie dans le spectacle ?

Cette peur de devenir parent que j’ai ressenti. Une surénergie pour cacher la détresse. Elle est à la fois timide et sa parole dépasse sa pensée en vitesse.

Ça fait du bien de grossir ses propres traits ?

Toujours ! Il faut rigoler de soimême, c’est le premier truc à faire même. Si les Belges ont le vent en poupe c’est pour cette facette d’autodérisi­on. Pourquoi parler des autres si l’on ne parle pas avant tout de soi ?

C’est un spectacle féministe ? Ou le terme ne vous sied pas ?

Ah, je ne suis pas fan, le terme est devenu très galvaudé. Je dirai plutôt que c’est un spectacle humaniste : si je ne parle pas beaucoup des hommes, ce n’est pas parce que c’est leur faute. En fait, je parle des humains. Dans la prochaine création j’ai axé mon propos sur l’écologie, parce que je fulmine de ne pas voir un seul élément de nutrition qui n’a pas sa dose de plastique au supermarch­é. Bref, ça me rend dingo… Pour revenir au spectacle, il n’est pas « pro-femme ». J’évoque le fait que chacun est capable de prendre en main sa propre destinée. Et cela passe surtout par l’acceptatio­n de son histoire. Et de tout ce que cela comporte.

Avez-vous un processus d’écriture ?

Alors, a posteriori je me rends compte que le processus était très long. Parce que je suis passé de décrire la difficulté du passage d’une vie à une autre en quittant le métier de prof pour la scène à une vraie évolution. Au final, il ne reste que le personnage de Julie et sa mère qui avait déjà été évoquée. L’essence reste. Sur le nouveau spectacle, j’ai un plan d’écriture grâce à un coauteur.

Et toujours de la rigueur !

Oh que oui ! Et j’en ai bien besoin à mes côtés : parce que personnell­ement, je n’en ai aucune ! [rires] J’ai toujours travaillé avec des gens rigoureux, c’est très important. J’ai  idées à la minute, il faut me canaliser.

Vous êtes sur les ondes de Rire & chansons avec Le Top de l’actu dans la matinale : cet exercice vous fait appréhende­r l’écriture différemme­nt ?

Pour le Top, j’ai travaillé pour trouver un mécanisme d’écriture. D’ailleurs, après les vacances, je dois m’y remettre. Sur ce formatlà j’ai eu de l’aide d’Élodie Poux et Michel Frenna, également sur la station.

Vous parlez des rapports mèrefille sur scène : vous étiez quel genre de gamine ?

On m’a dit que j’étais très indépendan­te, fonceuse. Très joyeuse aussi, à faire des blagues tout le temps !

Et quel genre de maman ?

Je lui apprends toutes les mauvaises chansons [rires]. Je détourne les paroles de ce qu’elle apprend à l’école. Je lui dis que si la maîtresse a dit quelque chose, cela marche à l’école mais pas forcément partout. Je souhaite lui montrer qu’il n’y a pas qu’une seule voie, qu’elle est libre, qu’elle peut être tout ce qu’elle souhaite.

Savoir + Je buterais bien ma mère un dimanche, de demain à samedi, à 20 h 30, au théâtre Le Tribunal, 5 place Amiral-Barnaud àAntibes.Tarifs :11,13 et 15 euros. La première à 8 euros. Rens. 06.43.44.38.21.

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