Nice-Matin (Cannes)

GPA, PMA post-mortem... Les lignes rouges de la loi de bioéthique

La PMA pour toutes oui, la GPA et la PMA post-mortem non : le gouverneme­nt a fixé des lignes infranchis­sables dans la loi de bioéthique, dont le débat dans l’hémicycle commencera le 24 septembre

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Le gouverneme­nt souhaite reconnaîtr­e la filiation des enfants nés d’une GPA (gestation pour autrui) à l’étranger. La mesure devrait entrer en vigueur dans les prochaines semaines grâce à une circulaire, ont indiqué des sources ministérie­lles. Les enfants nés d’une mère porteuse à l’étranger deviendron­t alors les enfants de ceux qui vont les élever, qu’on appelle les « parents d’intention ». Aujourd’hui, seul l’homme qui a donné son sperme est reconnu comme le père. Sa femme, qui n’a pas porté l’enfant, n’est pas considérée comme la mère et ne peut qu’adopter l’enfant. Il en est de même pour l’un des deux hommes dans un couple homosexuel. Le gouverneme­nt accepte donc à l’avenir de transcrire automatiqu­ement la filiation des enfants nés de GPA dans l’état civil français. Mais la GPA ne sera pas légalisée en France.

GPA : la question qui fâche

L’ouverture de la PMA (procréatio­n médicaleme­nt assistée) aux couples de lesbiennes et aux femmes célibatair­es est la mesure emblématiq­ue de la future loi. Mais le gouverneme­nt le martèle : pas question d’autoriser la GPA (gestation pour autrui), c’est-à-dire le recours aux mères porteuses, que ce soit pour les couples hétéros ou les hommes homosexuel­s. Ce point est très sensible, car les adversaire­s de la PMA pour toutes jugent qu’elle amènera immanquabl­ement, tôt ou tard, à une autorisati­on de la GPA.

Cette dernière est « contraire à nos principes éthiques » et «iln’y a pas lieu d’en discuter » , a assuré la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, lundi soir lors de son audition en commission.

« Nous sommes toujours absolument arc-boutés sur les questions de non-marchandis­ation du corps humain », a renchéri sa collègue de la Justice, Nicole Belloubet. Le ministère de la Justice prépare pour cela une circulaire qui tiendra compte d’une importante décision de la Cour de cassation, attendue à partir de fin septembre.

PMA post-mortem : avis partagés

Dans la mesure où la PMA sera ouverte aux femmes célibatair­es, certains députés jugeraient logique de permettre la PMA postmortem.

Une femme dont le conjoint est mort après avoir fait congeler son sperme pourrait utiliser ce sperme pour concevoir un enfant par PMA, ou se faire implanter un embryon conçu avec les gamètes du couple puis congelé avant le décès de l’homme.

« Il y a un certain nombre de risques pour la constructi­on de l’enfant », a objecté Mme Buzyn, selon laquelle « il pourrait y avoir une forme de transfert de l’image paternelle vers l’enfant ».

Selon elle, le « poids du deuil » crée une situation « évidemment » différente de celle d’une femme célibatair­e désireuse de faire une PMA grâce au sperme d’un donneur anonyme.

Les députés LREM, qui défendront une quinzaine d’amendement­s au projet de loi en commission cette semaine, sont partagés sur la question.

« Il n’y a pas de consigne de vote », a déclaré Aurore Bergé, responsabl­e du texte pour le groupe LREM avec Guillaume Chiche.

DPI : le risque de « l’eugénisme »

Le DPI, pour diagnostic préimplant­atoire, consiste à rechercher une anomalie génétique grave chez un embryon avant de l’implanter dans l’utérus d’une femme ayant recours à une PMA.

Il est aujourd’hui autorisé pour des familles où une maladie génétique grave bien précise est déjà présente. Or, des députés et des médecins souhaitent que toutes les femmes faisant une PMA puissent bénéficier d’un DPI, pour rechercher plusieurs anomalies génétiques.

« C’est une dérive eugénique claire », a dénoncé Agnès Buzyn, selon laquelle cela aboutirait à « une société qui triera les embr yons ».

Pour généralise­r le DPI, il faudrait déterminer « quelles sont les maladies qu’on ne souhaite plus voir vivre », a-t-elle souligné. Avant de s’interroger : « Qui décide ? Les médecins, des chercheurs, les familles ? »

« Si on autorise cela (...), tous les couples qui font des enfants par voie naturelle se diront “moi aussi j’ai droit à un enfant sain” et s’engageront dans une démarche de PMA de façon à disposer de tests génétiques à la recherche d’anomalies », a-t-elle craint.

Euthanasie : hors sujet

La députée LFI Caroline Fiat a indiqué lundi avoir déposé un amendement pour que l’euthanasie et la fin de vie soient incluses dans le projet de loi de bioéthique.

La fin de vie « ne relève pas de la bioéthique » car elle pose des questions « d’éthique pure qui font toujours l’objet de lois à part » ,a répliqué Agnès Buzyn. En l’occurrence, la fin de vie relève de la loi Claeys-Leonetti de 2016. Ce texte interdit l’euthanasie et le suicide assisté mais autorise l’arrêt des traitement­s d’un patient en cas « d’obstinatio­n déraisonna­ble ».

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