ans ferme à des proxénètes sud-américains
Le tribunal correctionnel de Grasse a infligé jusqu’à 5 ans de prison ferme à des proxénètes sudaméricains, hier soir. Ils organisaient la venue sur la Côte de femmes monnayant leurs charmes www.antibesjuanlespins.com
Oui, chéri ». Au téléphone, la voix féminine est teintée d’un accent sud-américain prononcé. Sur un ton aguicheur, elle énumère les prestations sexuelles proposées : « amour », « fellation »... Les tarifs ? 100 euros la demi-heure, 150 l’heure, 250 si la prostituée fait le déplacement. Au moment de raccrocher, la jeune femme ignore que ce client cache, en réalité, un gendarme qui traque des proxénètes. Les gendarmes cannois appellent deux numéros de téléphone communs, associés à de petites annonces repérées sur le site Vivastreet. À chaque fois, le même discours, les mêmes tarifs. Et le même accent latino. En novembre 2017, les militaires mettent ainsi un terme aux agissements de proxénètes colombiens venus sévir sur la Côte. Ou plutôt « travailler », assurent-ils. Eric Lopez Polanco, 35 ans, n’est pas là pour plaisanter : « Je suis là pour travailler. Je le prends au sérieux ! C’est un travail qui demande beaucoup de
concentration et de minutie. Je ne fais pas la fête. Je n’ai pas pris de vacances, pas une plage dans tout ce p... de mois d’août ! »
Ces propos, captés lors des écoutes téléphoniques, figurent parmi les multiples charges récoltées par les enquêteurs. La présidente du tribunal Laurie Duca les reprend une à une, méthodiquement, implacablement, lors de l’audience correctionnelle à Grasse hier aprèsmidi. De quoi pousser dans ses retranchements Eric Lopez Polanco. Il avait déjà admis avoir logé, nourri et véhiculé des prostituées.
Les petits extra d’un chauffeur Uber
Le Colombien a été mal inspiré de passer le numéro de l’une d’elles à un dentiste, ou d’acheter cash une Mercedes à 23 000 euros. Ces deux erreurs ont mis les gendarmes sur sa piste. Ils ont recensé onze jeunes femmes, réparties entre quatre appartements à Cannes et Antibes. Leurs lignes téléphoniques turbinnaient à un rythme « extrêmement soutenu », relève Laurie Duca : 400 appels et SMS par jour !
Pour les amener sur la Côte, Eric Lopez Polanco avait recruté en Espagne un compatriote, Jonier Roman, 31 ans. Et pour les conduire chez les clients, Lopez louait les services d’un chauffeur Uber désireux de faire des extras. « J’ai vite compris le manège », concède ce trentenaire à la barre. Il évoque une cinquantaine de courses.
« Certes, ce n’est pas un dossier d’esclavage moderne », reconnaît le procureur Annabelle Salauze. Ces femmes assurent qu’elles voulaient gagner de l’argent, qu’elles reversaient 50 % de la recette à Lopez. Elles étaient néanmoins dans un « état de vulnérabilité, de marchandises, face à des hommes qui savaient parfaitement ce qu’il en coûtait à ces jeunes femmes ».
Est-ce parce qu’Eric Lopez Polanco « a lui-même été prostitué » ,parle passé, qu’il n’a « pas la même perception de ce qu’il a pu faire » ? Me Gérard Baudoux le pense. Mais le pénaliste niçois martèle : «Iln’a commis aucun acte de violence, de pression ou d’assujettissement. » Au vu « de la gravité des faits et du nombre de victimes », le tribunal inflige 5 ans de prison à Lopez – soit les réquisitions du parquet – et 20 000 euros d’amende. Il l’interdit définitivement de séjour en France. Même interdiction pour Roman, défendu par Me Marie Seguin, qui écope de 30 mois ferme. L’ancien chauffeur Uber, défendu par Me Jean-Denis Flori, s’en tire avec un an de prison avec sursis.