Nice-Matin (Cannes)

Nice : dix-huit ans de réclusion au pédophile à la caméra

- CHRISTOPHE PERRIN chperrin@nicematin.fr

Il a 48 ans et sévit depuis au moins vingt-huit ans. Toner Segal est qualifié par les experts de « prédateur ». Né en Israël, l’individu, qui travaille dans l’immobilier, possède également un passeport polonais et vit la plupart du temps aux Pays-Bas.

Il est venu séjourner en France, notamment à Nice où il a eu le temps de violer au moins deux adolescent­s. Toner Segal passait ses loisirs à photograph­ier des enfants dans la rue, sur la plage avec son téléphone ou sa Gopro (caméra miniature)… Il filmait aussi à leur insu les locataires de son appartemen­t d’Amsterdam grâce à une caméra espion installée dans la salle de bains. L’affaire a été révélée en 2016 par son ex-femme qui, après avoir eu des doutes sur le comporteme­nt de son mari, a découvert des enregistre­ments illustrant ses déviances. Me Nino Paravicini, avocat du barreau de Nice, a alors alerté le procureur de la République.

Au-delà des réquisitio­ns

La cour d’assises des Alpes-Maritimes présidée par Patrick Veron s’est montrée inflexible : après deux jours de débat, elle a condamné hier l’accusé à dix-huit ans de réclusion criminelle et l’a frappé d’une interdicti­on définitive du territoire français. Une sanction qui est allée au-delà des réquisitio­ns. L’avocat général, Françoise Delon, avait prescrit treize ans de réclusion criminelle et un suivi socio-judiciaire.

Particular­ité sordide de cette affaire de pédopornog­raphie : les 13 000 fichiers (photos ou vidéos) trouvés sur l’ordinateur du suspect émanent de sa propre production. Autant de pièces à conviction accablante­s à l’heure de son procès pour « viols sur mineur de moins de 15 ans, agressions sexuelles, détention d’images pédopornog­raphiques, fixation et enregistre­ment d’images à caractère pornograph­ique d’un mineur de 15 ans. » Parmi les victimes figure notamment un Moldave de 12 ans à qui l’accusé donnait de l’argent en échange de faveurs sexuelles.

Toner Segal, défendu par Mes Sabrina Goldman et Zia Oloumi, plaide coupable. Contrairem­ent aux premiers interrogat­oires de police, leur client évite de dire qu’il est tombé amoureux, qu’il ne percevait pas la contrainte morale qu’il faisait subir à l’enfant.

Une victime témoigne

L’homme présente bien. C’est un détenu modèle. Il travaille en prison, dit chercher la rédemption dans sa lecture de la Bible, apprend le français, se passionne pour la sophrologi­e. Aucune victime mineure n’a pris place sur le banc des parties civiles. Seul un Israélien de 33 ans est venu témoigner, à l’invitation du président Veron, des sévices qu’il a subis, vingt ans en arrière dans son pays, lors d’une colonie de vacances encadrée par… Toner Segal.

Sa parole s’est libérée il y a un an seulement. Il a parcouru 2 700 km pour raconter sa souffrance. «Il a déposé à la barre de la cour d’assises comme on dépose un fardeau », souligne Me Sandrine Reboul, mandatée par l’associatio­n Enfance et partage. L’avocate insiste sur ce « sentiment de culpabilit­é qui verrouille à double tour la parole des victimes. »

Me Cindy Marafico, porte-parole d’un des mineurs, évoque la duplicité d’un accusé, décrit comme « “bon, dévoué, altruiste”, mais qui est le même qui viole et agresse ».

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Me Sandrine Reboul, avocate de l’associatio­n Enfance et partage. (Photo Ch. P.)

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