Dans le Nord, Édouard Philippe cajole les territoires ruraux
Venu hier à la rencontre des maires ruraux en congrès, le Premier ministre a annoncé une série de mesures pour redynamiser les petites communes. Principaux axes : l’écologie et les commerces
Redonner de la confiance aux élus ruraux et renouer un dialogue quelque peu distendu entre les maires des petites communes et le pouvoir central. C’est le défi auquel s’est attelé Édouard Philippe lors de sa venue, hier, devant l’Association des maires ruraux de France, réunis en congrès jusqu’à demain soir à Eppe-Sauvage, dans le Nord. Pour préparer ce discours, le Premier ministre a pu s’appuyer sur l’« Agenda rural », rédigé par plusieurs dizaines d’experts et remis le 26 juillet dernier à la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault. Un catalogue de 200 mesures, dont le gouvernement a décidé d’en retenir 173.
Sur la base de ce corpus, Édouard Philippe veut bâtir une politique publique qui s’appuiera sur quatre axes majeurs : « la transition écologique, la proximité des services publics, la sécurité et l’attractivité ». « Nous voulons faire des territoires ruraux des territoires de pointe en matière de transition écologique », a-t-il indiqué, estimant qu’il était « essentiel d’évaluer et de prendre en compte ce capital naturel exceptionnel » que constituent la faune et la flore des territoires ruraux. Une mission va être spécifiquement conduite sur cette thématique. Autre volonté affirmée : la lutte contre l’artificialisation des sols. Dans le viseur du gouvernement : les zones commerciales périphériques, et les espaces urbains et péri-urbains, au premier rang desquels les lotissements. « Peut-être avons-nous été trop loin ? », s’est interrogé Édouard Philippe. « Nous devons désormais penser ce développement urbain de façon à la fois sobre et économe. »
Faciliter l’installation d’échoppes
Le gouvernement a aussi l’intention de travailler sur l’attractivité des territoires ruraux en redynamisant les coeurs de village. Pour y parvenir, une batterie de mesures est envisagée, dont le fait de doter les municipalités de possibilités d’exonération fiscales pour l’installation de commerces, que l’État pourra en partie compenser. Edouard Philippe a aussi évoqué la création de nouvelles licences IV, mais non transférables d’une commune à une autre, dans les communes où ont disparu les débits de boissons. Pour accélérer les installations de manière générale, une simplification des contraintes de sécurité et d’accessibilité sera proposée.
Autre axe fort de ce plan : la jeunesse, avec le déploiement en 2020 d’une plateforme regroupant les services offerts aux jeunes au niveau national (comme le permis à 1 euro) et local (cartes de réduction pour les transports…) ; la création de 15 000 services civiques dans les territoires ruraux ; l’arrivée de 33 campus connectés, permettant de poursuivre des études supérieures à distance avec un accompagnement renforcé ; ou renforcer les moyens de l’Éducation nationale selon « l’éloignement ». Les jeunes ruraux pourront aussi bénéficier d’un accès facilité aux stages de 3e et à l’alternance, via un programme jusque-là réservé à ceux issus des quartiers de la politique de la ville. Édouard Philippe a également apporté des éléments de réponse au sujet de la taxe d’habitation. Il a annoncé la mise en place d’un mécanisme de répartition qui permettra d’éviter les effets pervers du basculement de la taxe foncière vers les communes.
Accueilli par de timides applaudissements, le discours d’Édouard Philippe va devoir désormais passer l’épreuve du réel. « On sent bien que la crise des “gilets jaunes” a été un accélérateur pour faire prendre conscience au gouvernement des inégalités territoriales, notamment dans le monde rural », note Yvan Lubraneski, maire des Molières et président des maires ruraux de l’Essonne. Pour l’édile, à la tête d’une commune de 1 957 habitants, « cet “Agenda rural” a le grand mérite d’inventorier tous les sujets, et il semble qu’il y a une réelle volonté d’acter le potentiel des territoires ruraux. Mais cela prendra du temps », ajoutet-il.