Le nécessaire débat
On ne peut quand même pas accuser Emmanuel Macron de tout et son contraire. Lui reprocher son inconsistance sur les thèmes régaliens, puis le taxer d’opportunisme lorsqu’il met la question migratoire sur la table.
Si épaisse paraisse la ficelle, à six mois des municipales, c’est lui intenter un mauvais procès. D’abord, parce que l’hétérogénéité et les sensibilités parfois aux antipodes de sa majorité, sur ce dossier, ne lui garantissent pas une navigation en eau douce. Ensuite, parce que ce débat est, tout simplement, nécessaire. Cela fait trop longtemps qu’il est traité de manière éruptive, au coup par coup, au gré de l’hystérie médiatique, en laissant les rancoeurs s’agréger et l’extrême droite extraire les marrons du brasier. Le chef de l’État a raison : ce n’est pas sur les terrasses de Cimiez à Nice, du Faron à Toulon ou autour des golfs de Valescure que l’immigration chamboule la vie. Ce sont les petites gens qui l’affrontent au quotidien. Il faut savoir entendre Philippe Vardon, l’un des leaders du RN en Paca, quand il décrypte son façonnement politique : dans la cité niçoise des Moulins où il a grandi avec sa mère aide-soignante, la coexistence des communautés s’est peu à peu transformée en « affrontement ». Il s’est, dit-il, vécu comme «unexilé de l’intérieur ». Cela ne signifie évidemment pas qu’il faille enfourcher illico les chevaux de bataille du Rassemblement national. Le débat n’en doit pas moins être posé, plutôt que laissé en jachère tout courage banni. Le sujet, d’ailleurs, est peut-être celui qui se prête le mieux au credo macronien. Il semble possible, en même temps, d’ériger quelques balises naturelles et de bon sens, conjuguant humanité et fermeté : il est barbare de rejeter des migrants qui ont pour seul vilain tort d’être nés au mauvais endroit ; il faut absolument aider à l’essor de l’Afrique, dans des proportions vertigineuses ; il faut, enfin, continuer à accueillir une immigration régulée qui n’est pas la submersion caricaturée par certains. Mais le tout, en scellant d’indispensables parapets. Le volant migratoire ne prend, en effet, de sens qu’à la mesure de l’intégration. Pour être direct, l’islam ne peut prétendre s’immiscer dans l’espace public, comme y aspire une partie des musulmans. Ne parlons pas de racines chrétiennes, notion belliqueuse qui entretient l’hostilité. Mais de pays à l’intangible culture laïque. Où les mêmes règles doivent s’imposer à tous à l’école, dans l’entreprise et jusque dans les piscines, sans avoir à user de vaseux critères d’hygiène pour y interdire, sans trop se mouiller, le burkini. Ceux qui désirent venir nous enrichir de leur diversité ont vocation à épouser un modèle préexistant, clair et non négociable. Cela n’a rien de bien méchant.
« L’immigration ne prend de sens qu’à la mesure de l’intégration. »