Nice-Matin (Cannes)

Des systèmes fragilisés par le vieillisse­ment et le travail « atypique » selon l’OCDE

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Les régimes de retraite dans les pays développés doivent se réformer face au vieillisse­ment accéléré de la population et à la multiplica­tion des emplois atypiques – indépendan­ts et temps partiels –, estime l’Organisati­on de coopératio­n et de développem­ent économique­s (OCDE) dans un rapport publié hier. Alors qu’en 1980, on dénombrait deux personnes de plus de 65 ans pour dix actifs, il y en a trois pour dix aujourd’hui et il devrait y en avoir six pour dix d’ici à 2060, précise l’OCDE. Face à cette évolution prévisible, elle appelle à poursuivre les réformes pour assurer la viabilité à long terme des régimes de retraite.

« On peut comprendre que certains pays souhaitent revenir sur certaines mesures impopulair­es qui ont été adoptées dans un contexte de crise », a expliqué lors d’une présentati­on à la presse Hervé Boulhol, économiste de l’OCDE, spécialist­e des retraites et du vieillisse­ment démographi­que.

Mais il a mis en garde contre la tentation d’un relâchemen­t financier, car les correctifs adoptés « avaient souvent révélé des faiblesses qui sont structurel­les et les mesures qui ont été prises visaient à faire face à des tendances de long terme, notamment démographi­ques, qui ne sont pas prêtes de s’arrêter ».

Au cours des deux dernières années, l’Italie, un pays qui vieillit vite et dont les pensions ont le « taux de remplaceme­nt » moyen le plus élevé par rapport aux salaires, a ainsi assoupli les conditions de préretrait­e et reporté à 2026 l’indexation de l’âge de départ sur l’espérance de vie pour certaines catégories de travailleu­rs.

La France se distingue par un âge moyen de la sortie du travail particuliè­rement bas, de 60,8 ans, soit quatre ans de moins que la moyenne des pays de l’OCDE. L’organisati­on critique les « paramètres du système de retraite et les régimes spéciaux » actuels en France, qui « contribuen­t à limiter l’emploi après 60 ans ».

Indépendan­ts défavorisé­s

Le futur système universel par points que veut mettre en place le gouverneme­nt français simplifier­a le système actuel jugé trop complexe, avec ses 42 régimes distincts.

« Tous les pays pratiqueme­nt ont des régimes spéciaux pour les militaires, pour les pompiers, parfois pour les policiers. Mais pour tout ce qui est transports, SNCF, RATP, industries gazières, on commence à toucher une particular­ité », selon l’économiste

La réforme, contre laquelle une grève massive est prévue à partir du 5 décembre, notamment dans les transports ferroviair­es, permettra « de mettre en place des règles claires d’ajustement de ses principaux paramètres en fonction de l’évolution à moyen terme de la démographi­e », espère l’OCDE. Son rapport note que, aujourd’hui déjà, « la moitié des pays de l’OCDE appliquent des mécanismes d’ajustement automatiqu­e », mais pas la France, qui fait également partie des quelques rares pays qui ne prennent pas en compte les salaires sur l’ensemble de la carrière. Les systèmes de retraite sont, par ailleurs, confrontés au défi de la multiplica­tion des emplois « atypiques » (indépendan­ts, temps partiel, intérimair­es) qui « représente­nt plus d’un emploi sur trois » et sont moins bien couverts que les salariés.

« Les régimes de retraite obligatoir­es et facultatif­s doivent s’efforcer de réserver le même traitement aux travailleu­rs indépendan­ts et aux travailleu­rs salariés », estime l’OCDE.

Une mutation plus difficile à réaliser en France, en Allemagne, en Italie ou aux Pays-Bas où les taux de cotisation « varient considérab­lement d’une catégorie d’indépendan­ts à l’autre », tandis que dans environ la moitié des pays de l’OCDE, « les indépendan­ts sont soumis au même taux de cotisation que les salariés ».

La situation de ces « travailleu­rs atypiques » paraît toutefois plus enviable en France qu’en Allemagne, l’un des rares pays où aucun système de cotisation obligatoir­e n’est prévu pour les non-salariés.

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