Nice-Matin (Cannes)

Le Conseil d’Etat saisi pour clarifier le « droit à l’oubli »

- ALP

Que peuvent bien avoir en commun l’inventeur d’une fourche de vélo quasi révolution­naire, une ancienne actrice de sitcom, le maire d’une ville moyenne de l’Ouest, un ex-porte-parole de l’Église de scientolog­ie et un homme condamné pour pédophilie ? Tous, pour des raisons évidemment bien différente­s, veulent être « déréférenc­és » du moteur de recherche Google. En d’autres termes, ils entendent user de leur « droit à l’oubli », en obtenant de la firme de Mountain View la disparitio­n de certains liens mis en avant à leur sujet par l’incontourn­able moteur de recherche. Cette question a fait l‘objet d’un examen scrupuleux, hier, à Paris, devant les juges du Conseil d’Etat, quelques semaines après que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) eut justement traité de cette question dans un arrêt daté du 24 septembre. L’objet essentiel des débats a consisté dans l’examen du sort réservé par les moteurs de recherche aux données personnell­es dites « sensibles » : opinions politiques, conviction­s religieuse­s, orientatio­n sexuelle, origine ethnique, mise en examen, infraction ou condamnati­ons pénales touchant le demandeur. La justice européenne a estimé, eu égard à la masse de données qu’ils traitent, qu’il était impossible pour les moteurs de recherche d’opérer un tri a priori dans ces informatio­ns.

Protection de la vie privée ou intérêt public ?

En, revanche, elle a édicté un certain nombre de règles concernant les demandes de déréférenc­ement, dont le Conseil d’Etat va aider à préciser la mise en oeuvre par le biais des décisions qu’il s’apprête à rendre. Pour l’y aider, le rapporteur public a exposé aux juges un certain nombre de préconisat­ions, en s’appuyant sur la notion de mise en balance entre la protection de la vie privée d’une part et l’intérêt public d’autre part. Concrèteme­nt il faut, pour évaluer l’opportunit­é de procéder à un déréférenc­ement, être en mesure de juger à l’aune de plusieurs critères essentiels : la notoriété de la personne concernée, l’intérêt pour le public de l’exposé des faits accessible­s et l’exactitude des données concernées par les liens mis en avant par Google. Evidemment, la décision de maintenir l’existence du lien vers une page faisant état de l’invention d’une fourche de vélo brevetée voilà plus de dix ans pose moins de questions que celle, éminemment plus complexe, de continuer à rediriger les internaute­s vers des articles de presse relatant la condamnati­on d’un pédophile, de surcroît récemment libéré sous contrôle judiciaire, à sept ans de prison. Mais c’est justement tout l’enjeu de cette procédure, pour les citoyens comme pour les acteurs d’Internet : « Google a toujours cherché à se conformer aux indication­s de la Cnil (1) et de la Cour de justice de l’Union européenne », a ainsi assuré l’avocat du géant américain Patrice Spinosi, qui s’est dit convaincu « de détenir avec cette décision à venir une grille de lecture applicable » aux demandes de déréférenc­ement que reçoit chaque jour le moteur de recherche. En déterminan­t, au cas par cas, les demandes légitimes au regard de la justice européenne, la décision du Conseil d’Etat pourrait, en effet, permettre de donner un cadre à l’exercice d’un droit aujourd’hui largement méconnu. La décision sera rendue dans quelques semaines. 1. Commission nationale de l’informatiq­ue et des libertés, compétente pour intervenir en cas de refus de déréférenc­ement.

Des centaines d’agriculteu­rs ont convergé, hier, vers Paris à l’appel des syndicats FNSEA et Jeunes Agriculteu­rs, où ils ont bloqué le périphériq­ue durant toute la journée, en attendant d’être reçus par l’exécutif. A l’issue d’un rendez-vous avec le ministre de l’Agricultur­e et de conseiller­s de l’Elysée, la présidente de la FNSEA Christiane Lambert a demandé aux agriculteu­rs qui ont manifesté dans toute la France et bloquaient toujours en soirée le périphériq­ue parisien de « suspendre le mouvement », annonçant qu’une rencontre « aura lieu le  décembre à  h  », avec Edouard Philippe et ses conseiller­s, ainsi que les Jeunes Agriculteu­rs « pour refaire un point sur l’ensemble des sujets ».

De son côté, le ministre de l’Agricultur­e Didier Guillaume a estimé, hier soir, que la réunion « s’était très bien passée ».

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(Photo AFP)

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