Le nouveau procureur veut « restaurer la confiance »
Xavier Bonhomme a pris la tête du parquet de Nice le 15 novembre. Après l’affaire Legay qui a fragilisé son prédécesseur, le magistrat fixe sa feuille de route. Première interview niçoise
Les remous de l’affaire Legay et de l’enquête autour du Negresco n’ont pas encore délaissé la baie des Anges. Mais le nouveau procureur de la République de Nice aspire à naviguer par temps clair. Après la Corse et la Guadeloupe, Xavier Bonhomme a pris la barre du parquet de Nice le 15 novembre. Ce magistrat de 55 ans succède à Jean-Michel Prêtre, nommé avocat général à Lyon, et fragilisé par des mois de polémiques sur sa gestion de dossiers sensibles.
Originaire du Nord (Maubeuge), région à laquelle il voue « une affection particulière » , ce grand voyageur se dit néanmoins «apatride ». Xavier Bonhomme évolue « au soleil depuis une vingtaine d’années, dans le Sud ou dans les îles. Pourtant, je ne demande pas que des postes attrayants touristiquement ! Je n’avais pas demandé que Nice ».
Chargé de conduire la politique pénale sur la moitié Est des AlpesMaritimes, le nouveau procureur connaît la région : à Marseille, il a enquêté sur les transferts de l’OM ou requis contre les époux Mégret, élus à Vitrolles. Mais il découvre la Côte d’Azur côté professionnel. Et c’est à Nice-Matin qu’il accorde sa première interview depuis son arrivée effective, le 18 novembre.
On dit parfois que lorsqu’on a été procureur en Corse, on peut l’être partout. Confirmez-vous ?
Cela a été le poste le plus difficile à occuper. De surcroît à une période assez « chaude », marquée par les assassinats du bâtonnier Sollacaro, du président de la CCI, du président du Parc régional de la Corse… Poste compliqué, mais exaltant. Vais-je réussir ici parce que je suis passé par la Corse ? Ce serait présomptueux de le dire…
Votre feuille de route est-elle de remettre en route ce parquet qui a connu des heures agitées, mais enfin revenu à effectif normal ?
Je suis en phase d’observation, je me laisse quelques semaines. Sur le plan budgétaire, on est au niveau prévu. Cette juridiction a des atouts. Il y a des choses qui fonctionnent. On n’est pas dans une situation dramatique !
Maintenant, j’ai conscience d’arriver dans des circonstances particulières. Mon objectif, c’est d’abord de restaurer la confiance.
Vis-à-vis de qui en particulier ?
En interne, déjà. J’ai la chance d’avoir une bonne équipe, qui tient la route. Je réfléchis à une organisation du parquet plus lisible et efficace. Il y a une bonne entente avec les magistrats du siège, chacun dans son domaine de compétence. Et à l’extérieur, il faut que le parquet soit reconnu comme un interlocuteur fiable et professionnel.
Votre ligne directrice ?
Mon critère, c’est l’efficacité. Sérénité, efficacité, professionnalisme : c’est vers cela qu’il faut tendre. Et la confiance se gagnera.
Quelle approche prônez-vous face à l’immigration illégale ? Le parquet a été désavoué dans des dossiers d’aide humanitaire…
Ce sera une politique ferme, que j’espère efficace, dans le respect des textes. Je sais qu’il s’agit d’une problématique majeure. Face aux passeurs, le but sera d’être réactif, via des comparutions immédiates lorsque cela est possible. Dans les dossiers que vous évoquez, les poursuites avaient été engagées en , avant que la loi n’évoque une aide dans un but strictement humanitaire. Dès lors qu’on est dans ce cas de figure, il n’y a pas de poursuite possible.
La lutte contre les violences conjugales, une autre priorité ?
C’est une priorité nationale depuis des années. En revanche, il faut que l’on s’améliore dans la prise en charge des victimes et des auteurs. On ne classera pas de dossier parce qu’on n’a pas le temps de les traiter !
À Nice, la radicalisation est un autre front sensible…
C’est une priorité majeure, que je n’ai pas connue jusqu’ici. J’ai bien sûr à l’esprit que Nice a vécu, il y a trois ans, quelque chose de majeur. J’ai un magistrat délégué à la lutte antiterroriste.
Beaucoup d’affaires financières n’aboutissent pas, ou finissent mal. Comment faire mieux ?
On peut toujours faire mieux, dans tous les domaines. C’est effectivement une priorité. Il ne faut pas qu’une enquête dure dix ans, ce qui fait des monstres de procédure. C’est à moi de fixer des priorités. C’est à nous de driver les enquêteurs de la police judiciaire, en étant des directeurs d’enquête. Plus encore que dans d’autres matières.