INONDATIONS : LEROY VEUT TAPER FORT
Au lendemain des épisodes pluvieux de ces derniers jours, le maire de Mandelieu est lassé d’attendre le bon vouloir de l’Etat pour protéger ses administrés. Et il demande aux parlementaires de prendre leurs responsabilités.
Trente millions d’euros de dégâts sur l’espace public, 80 véhicules des services techniques endommagés, quelque 100 personnes relogées... On n’inclut évidemment pas dans ce décompte, les sinistres relevant du privé dont on ignore encore l’évaluation. Mais le fait est que les dernières inondations ont coûté cher à Mandelieu dont le maire, Sébastien Leroy, n’a aucune intention de prêter le flanc à la fatalité.
C’est même tout le contraire. Face à l’inimaginable – deux vigilances rouges en deux week-ends, «dujamais vu en France » –, Leroy attaque, propose et revendique aussi le pouvoir... de disposer. Il souhaite ainsi répondre à l’inquiétude de ses administrés, à leurs interrogations légitimes. Et rétablir quelques vérités... Tiens, celle-ci par exemple, qui s’accompagne d’une explication de texte : « Je comprends la colère des gens, leur ressenti et, dans ces cas-là, c’est toujours la mairie qui prend parce que c’est
‘‘ elle qui gère la crise. Mais pour bien comprendre les choses, il faut repartir de l’origine. La Côte d’Azur a été urbanisée depuis les années cinquante, elle est donc relativement jeune en termes de constructions. Avant, à Mandelieu, il n’y avait que des champs, le village historique de La Napoule et celui de Capitou. Cette ruée vers l’or immobilier, a conduit à faire n’importe quoi. Personne, insiste le maire, ne s’occupait de l’écoulement des eaux, du risque incendie, des milieux humides ou de l’historique des territoires. Et avant les lois de décentralisation des années quatre-vingt, il faut quand même rappeler que c’est l’État qui accordait les permis de construire, pas les villes. »
La précision est d’importance car, l’État décidant alors de tout, «il est responsable de toute l’urbanisation massive de la ville. Les résidences construites le long de l’Argentière du Riou, c’est l’État. Cannes Marina, c’est l’État, etc. »
Les mairies, elles, ont commencé à gérer l’urbanisation à partir de 1982, date de la première loi de décentralisation. Pour autant, rien n’a vraiment changé sur la forme... « Les territoires sont passés en mode “Faites-vous plaisir”. Et c’est comme cela que l’on a assisté à des choses aberrantes, comme le lavoir de La Napoule rasé pour faire place à un immeuble. En fait, poursuit Leroy, c’est à partir des années quatre-vingt-dix que la notion de gestion des risques est apparue et qu’a commencé à germer l’idée qu’il fallait prendre des règles. Sauf que chez nous, à Mandelieu, toutes les constructions qui posent problème aujourd’hui étaient déjà réalisées. »
La situation aurait-elle pu être pire encore ? « Oui, assure encore Sébastien Leroy, parce que lorsqu’Henri Leroy est arrivé en 1995, il a découvert dans les dossiers de la majorité précédente un projet prévoyant le doublement des surfaces constructibles. Tous les terrains disponibles étaient voués à la construction et Mandelieu aurait dû devenir en 2010 une ville de 50 000 habitants, alors qu’elle n’en compte que 25 000. Autant dire qu’ici, la folie immobilière n’a avorté qu’en 1995, avec l’élection de mon prédécesseur. » Voilà pour le constat, le bilan, l’évidence de l’existant. « Notre défi désormais, c’est de réinventer la ville car les événements climatiques s’accélèrent. 2015 a été le coup de tonnerre. On s’est dit qu’il fallait prendre des mesures fortes mais la mairie s’est retrouvée face aux réalités de la loi en France. Au maire la responsabilité, à l’État la décision. C’est lui qui est compétent en termes de lutte contre les inondations, lui qui valide les projets. Ainsi, pour faire avancer les choses sur nos territoires, il faut des années d’études. La ville, elle, ne peut plus rien faire : consolider les berges, aménager les cours d’eau, nettoyer les vallons, refaire des quais, poser des batardeaux, tout cela est impossible sans l’aval de l’État. Depuis 50 ans, la réglementation s’accumule, on fait des lois sur des lois et ce qui pourrait prendre six mois, prend 6, 8 ou 10 ans. Tout est bloqué. On est dans la paralysie totale. »
Et celui qui est candidat à sa succession n’épargne personne... « Ce dont on parle, c’est d’un fiasco en chaîne, tous partis confondus – y compris le mien (LR, Ndlr) –, depuis 20 ans. Aucun gouvernement ne peut donner de leçon à un autre. Les lois auxquelles nous sommes soumis sont issues de plusieurs majorités et certaines sont très dangereuses, l’une des pires étant la loi SRU, irresponsable et déconnectée de toute réalité. Il faut faire en sorte qu’elle s’arrête. » Leroy en veut aux législateurs, aux parlementaires... « C’est à cause d’eux qu’on en est là, et de tous ceux qui sont aux commandes de ce pays depuis des décennies. Je veux qu’on arrête ce délire et que Mandelieu-La Napoule devienne la ville pilote de lutte contre l’inondabilité en France et même en Europe de l’Ouest. Je veux que l’on soit au niveau de ce que font les Pays-Bas ou certaines villes d’Italie. Il faut être dans l’audace et l’ambition, que
Notre défi d’aujourd’hui : réinventer la ville ”
‘‘ Mandelieu doit devenir ville pilote ”
l’on ne se refuse rien. Et si l’on doit raser des immeubles, on le fera, raser des maisons, on le fera, démonter et reconstruire différemment, on le fera. S’il faut faire des bassins, on le fera, équiper et étanchéifier des copropriétés aussi. Je veux des travaux dès demain parce que nous sommes dans une course contre-la-montre. Je n’accepterai plus d’attendre. Le temps est à l’action!»
Une action qui démarre dès ce mercredi matin par « les États Généraux de Mandelieu La Napoule ». Une réunion programmée en présence de nombreux acteurs du territoire, dont la souspréfète, Anne Frackowik-Jacobs, elle-même très impliquée dans ce combat comme elle l’a démontré lors des deux récents épisodes pluvieux. « La violence de ce qui nous est arrivé fait que l’on va réagir comme jamais », promet Sébastien Leroy qui met les parlementaires en garde : « Ils doivent modifier les lois actuelles parce que s’ils ne le font pas, ils ne pourront pas dire demain qu’ils n’étaient pas au courant, et porteront toute la responsabilité des drames à venir. »