L’art d’échapper au renseignement intérieur

Au procès Coulibaly, plusieurs policiers sont entendus en visioconférence, sous couvert d’anonymat. Un responsable de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) remet l’attaque du  février  dans le contexte de l’aprèsCharlie et des départs massifs en Syrie. L’asssassinat de Hervé Gourdel, l’aura du recruteur Omar Diaby, l’explosif stocké par Ibrahim Boudina à Mandelieu... Plusieurs noms cités relient la Côte d’Azur au fléau djihadiste.

Au coeur de ce phénomène, l’enquêteur de la DGSI pointe du doigt « le projet totalitaire, génocidaire et terroriste de l’Etat islamique ». Ce terreau idéologique va contribuer à radicaliser l’influençable Moussa Coulibaly. Le  janvier , il quitte Mantes-la-Jolie pour Nice. Puis Toulon. Il embarque pour Ajaccio. Passe par une agence de voyages, en Corse, pour réserver un vol vers Istanbul, via Nice à nouveau, puis Rome. « Tout cela pour masquer sa destination finale », résume le policier.

Le  janvier, Moussa Coulibaly débarque en Turquie, sas d’accès vers les zones de conflit. Il est aussitôt refoulé. Les hommes du renseignement intérieur l’ont-ils signalé à leurs homologues ? « Les policiers turcs ont compris que M. Coulibaly n’était pas le touriste qu’il prétendait être », résume le chef de service de la DGSI.

« À partir de là, on le suit »

Les enquêteurs entendent ce drôle de voyageur dès son retour à Nice. Puis le laissent repartir. Ils ne sont pas dupes de ses « mensonges éhontés ». Mais ils n’ont pas assez d’éléments pour le placer en garde à vue, explique le policier. A défaut, « à partir de là, on le suit ».

Ecoutes. Filatures. Ces « techniques de renseignement » ne permettent pas d’anticiper le passage à l’acte de Coulibaly. Après avoir regagné son hôtel du quartier de la gare, puis erré dans Nice, il attaque les militaires. Il rejoint ainsi la cohorte de ces individus « frustrés de n’avoir pu se rendre sur place [en Syrie, ndlr], imprégnés de la propagande de l’Etat islamique, qui décident de passer à l’action à leur retour. »